Le feu de bois est assez simple à allumer dans l'ancienne cheminée des maisons abandonnées. Il y a souvent des magazines cachés sous les matelas que j'utilise comme combustible. La plupart sont destinés à un public mature. Ça ne me choque pas, à une autre époque, s'exhiber dénudé n'effarouchait personne. J'ai conclus cela car mon père a des peintures de ce style dans sa bibliothèque secrète. À ma grande surprise, je trouve des livres aussi. Ma dernière trouvaille, une pépite en très bon état qui a rejoint les deux autres que j'ai décider d'emporter : "Le comte de Monte Cristo".Il ne fait pas spécialement froid, mais la nuit apporte son lot d'angoisse. J'avoue ne pas faire la maligne une fois qu'elle est tombée. La seule lumière de mon briquet réveille des ombres fantômes sur les tapisseries centenaires. Le doux crépitement, produit par le bois qui se consume, a au moins le bénéfice de combler le silence inquiétant.
Je sors la petite couverture de mon sac à dos et l'étale sur le sol. Le canapé est sans aucun doute ravagé par les mites et les bestioles en tout genre alors je préfère de loin le carrelage dur, mais plus sain. Je prends ma carte de l'ancienne Europe où j'ai tracé mon chemin et mes haltes. Je la déploie sur la table basse que j'ai nettoyé au préalable. Ma boussole m'indique dans quelle direction je dois me diriger demain : le Sud-Ouest toujours.
J'ai décidé de ne pas passer par les grandes métropoles. Mon but : trouver un endroit, la maison, mon coup de cœur. Je sais que, sur mon chemin, je trouverai des lieux de rêve, mais il n'y en a qu'un qui m'intéresse : Le chalet au bord du lac. Cette idée me motive, me galvanise.
J'ai parcouru quelques kilomètres déjà. Une cinquantaine depuis une semaine. Je n'avance pas très vite. Le terrain est très escarpé et la forêt dense. Je n'ai encore croisé aucune âme qui vive mis à part des insectes répugnants ou quelques lapins. Je sais pourtant que le danger est présent. Partout où il y a des proies herbivores, se trouve des carnivores aux dents acérées.
Je sors la dernière barre de céréales du linge propre. Même si la faim me tenaille le ventre, j'en coupe un morceau que je laisse pour demain matin. Il est hors de question que je fasse demi-tour. J'aurais cru la chasse plus facile, mais les pièges que je place le soir ne fonctionnent que très rarement. Je vais devoir apprendre à rationner mes provisions.
Je casse une chaise abandonnée dans l'ancienne cuisine afin d'alimenter une seconde fois le feu. Je me couche et regarde les flammes. Mes yeux se ferment.
— Ze veux avoir un ranch avec des zevaux, des poules, des lapins et des p'tites brebis, ah voui et une vasse aussi, pour le lait, lui avoué-je en zozotant un peu, le pouce entre mes dents tout en triturant mes cheveux.
— Une ferme, quoi, avait conclu Aden distraitement.
Il est étendu sur le dos, les deux mains derrière la tête. Il contemple la nuit qui était tombée, au travers de deux planches du toit de notre cabane.
— Oui, c'est ça. Un endroit parfait où il ne fera zamais trop chaud, zamais trop froid. Attends, regarde.
Je retire mon pouce de la bouche et sors une petite image de ma poche que je lui fourre sous les yeux.
Il l'analyse cinq secondes. Je retourne la photo et lui lis la légende en tout petit et en italique :
— Cha...let Basque, Haut Stan...ding. Mon...ta...gne La Rhune.
— Hum...
— C'est beau, hein ? Devant, il y a un petit étang propre où on pourra se baigner avec les canards et leurs canetons.
— Qui ça « on » ?
C'est une question bête, ça fait mille fois que je lui en parle. Je range ma précieuse image.

VOUS LISEZ
Mysterious Eyes - En cours de réécriture (Dispo en Broché et Ebook sur Amazon)
Romance⚠️ POUR PUBLIC AVERTI ⚠️ Certaines scènes de cet ouvrage peuvent être choquantes (Sexe, meurtre, torture, viol) Ava est une jeune étudiante en médecine, fille d'un grand médecin, créateur des nouvelles lois martiales de Généapolis, cette ville consi...