Sans oignons

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Bol de céréales à 16h, parfois une douche, un appel pour commander à bouffer, télé, manger, alcool, alcool, alcool, fatigue, sommeil.

Un bref résumé des journées d'Aurélien et Guillaume. Bref parce que pas vraiment précis : entre les repas se glissaient souvent quelques baisers, ou autres gestes amoureux.

Des gestes amoureux, belle affaire.

*

- Sauce piquante seulement. Mh. Ah et pas d'oignons.
- Pff, pas d'oignons, répéta Orel d'une voix aigüe, se moquant de Gringe.
- Ouais c'est ça, au 4ème, dit ce dernier avant de raccrocher. C'est quoi le soucis ? reprit-il.
- Depuis quand tu veux pas d'oignons toi ?
- J'sais pas, j'ai pas envie.
- "Pas d'oignons" répéta une nouvelle fois Orel en levant les yeux au ciel.
- Tu vas arrêter de casser les couilles, oui ?

Après avoir mangé, ils se trainèrent en ville pour retrouver leurs potes et entamer une nouvelle soirée.

Ça faisait près de 2 mois que Gringe avait déclaré qu'ils étaient ensembles.
"M'enfin ça reste entre nous tu vois, même à Claude j'irai pas lui dire que tu m'suces tu vois", avait-il dit entre deux gorgées de Vodka, il y a quelques semaines.

Toujours élégant, ce Gringe, d'ailleurs.

Du coup, d'un point de vue extérieur, rien n'avait changé : parce qu'ils n'avaient simplement rien dit à personne. Leur quotidien était tranquille, sans beaucoup d'obstacles.

Ils géraient leurs soucis et questions calmement, sans se prendre la tête.
"J'veux pas qu'on soit 2 lesbiennes qui puent la merde, alors arrête de gueuler pis j'arrêterai d'chialer" avait lâché Orel un soir.

*

- Tu penses vraiment qu'il est aveugle ?
- Vu la couleur de sa veste, j'espère.
- Et vu sa gueule aussi...
- Et la gueule de sa meuf, surtout !
- Il doit juste avoir des goûts particuliers, parce que franchement il nous fixe de ouf pour un aveugle, remarqua Claude.
- Roh merde, soupira Orel.
- Pas de quoi s'inquiéter, si il veut nous démonter on enverra Ablaye.
- Ferme ta gueule ! J'suis pas dans vos embrouilles de blancs !
- Vous gueulez comme des meufs alors qu'il est tout seul et qu'on est 6, rit Gringe.
- Il est p'tet pas aveugle mais sa veste va m'achever... C'est quoi ça, un genre d'orange fluo ? articula (difficilement) Aurélien, bien entamé.
- Oooh, jolie créature que voici, enchaîna Claude en suivant une femme du regard, j'aime bien.
- Soif, marmonna Orel.
- T'as déjà assez bu.
- Je t'ai demandé ton avis Monsieur Guillaume ?
- Tu pues l'oignon putain.
- Mais c'est pour ça que t'as pas pris d'oignons ! Pour pas puer parce qu'on sort ? Bah tu sais quoi, j'vais aller puer l'oignon ailleurs !

Orel partit en titubant vers le bar, il était vraiment bien bien bien allumé ce con. Bouteille, Ablaye et Claude le suivèrent, bien partis pour se mettre dans le même état que le premier.

- T'es marrant ces temps, dit Skread.
- Moi j'suis marrant ? répondit Guillaume, amusé.
- Avec Orel, j'sais pas t'es maman-poule, c'est énorme.

Gringe secoua la tête en soufflant du nez, puis observa Aurélien qui se trouvait à quelques mètres. Il était con mais il tenait vraiment à lui.
Ouais, il y avait des moments comme ça où Gringe se rendait compte de certaines choses, parfois surprenantes.

Par exemple, là, quand il fixait Aurélien, appuyé sur le bar, en train de rire et de gueuler jusqu'à ne plus avoir de voix, il se rendait compte à quel point il était important.

Il le trouvait étrangement beau, avec ses mèches qui tombaient devant ses yeux, son sourire débile et sa veste imbibée d'alcool. Il le trouvait beau tout le temps, mais quand il était bourré pile au stade où il était heureux, c'était là qu'il était vraiment... Parfait. Quand il était heureux, qu'il ne réfléchissait pas.

- LA MUSIQUE EST VRAIMENT TROP FORTE !!!

Quand on parle du loup.

- Tu rigoles ou quoi ? On l'entend presque pas.
- Baaaah moi j'trouve qu'elle est trop forte ! Ça te pose un problème ? Même Ablaye le dit !
- Orel, je viens de te dire que j'en ai rien à foutre, soupira Ablaye.
- Et pourquoi on va pas danser ?
- Que ça n'étonne personne si je le tue avant la fin de la soirée, lâcha Ablaye.
- Z'êtes pas drôles. Moi j'y vais. Tu viens Gringe ?

Aurélien attrapa l'avant-bras de Gringe, qui, un peu surpris mais amusé, se laissa faire.
Orel le traîna jusqu'à se retrouver au milieu de la foule et s'arrêta de marcher, mais il ne lâchait pas le bras de Gringe, qui le regardait danser d'une des façons les plus ridicules qui existe.

- Tu fais n'importe quoi ! se moqua-t-il.

Aurélien relâcha sa prise sur le bras de Guillaume sans pour autant le lâcher, puis glissa ensuite sa main dans la sienne, en fixant son regard dans celui de Gringe, devenant tout à coup plus sérieux.

- Faire n'importe quoi, tu dis ?

On aurait dit qu'il lui lançait un défi du genre : qui de nous deux est le plus bourré, mais édition spéciale "gays refoulés".

Contre toute attente, Gringe joua le jeu.
Il détacha sa main d'Orel, se plaça derrière lui et dansa, tout en se collant de plus en plus à lui.

Sous les regards consternés de leurs amis.

Définitivement, l'alcool n'est pas seulement mauvais pour la santé, mais aussi pour la réputation...

ObsessionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant