La colère

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Les sentiments sont souvent incompréhensibles, et leur raisons se rattachent parfois aux personnes se trouvant là même si elles ne sont coupables de rien.


   Je ne bougeais pas. Lui non plus. Clément, éternel imprévisible, me souriait. Il tentait que cette expression soit sincère mais je n'étais pas aveugle. Je fis alors quelque chose dont je ne me serais pas cru capable : je courus pour le prendre dans mes bras.

   Je le serrais très fort contre moi. Son odeur assaillait mes narines et ses mains se rejoignirent dans mon dos. Je pouvais facilement l'imaginer, voir son faux sourire disparaître.

   De longues minutes s'écoulèrent. J'avais une conscience aigu du temps. Je me décalais. Je le regardais. Il pleurait.

   Je le fis alors asseoir sur mon lit. Je passais mes doigts sous ses yeux afin d'en essuyer les larmes. Je ne souriais pas. Il arrêtait sa comédie. Il me prit la main et empêcha que je me retire. Il planta ses yeux dans les miens et me reprocha :

"Pourquoi tu as fait ça ? Pourquoi tu ne m'as rien dit ? Ce n'est pas la bonne solution, tu le sais !"

   Je ne répondis rien. Mon silence allait l'énerver, je le pressentais. Seulement je ne disais rien. Je n'avais pas encore envie de parler. Pas encore.

"Tu comptes recommencer ? Tu comptes refaire une tentative ?"

   "Tentative"... Ce mot est bien faible.

"Non, répondis-je enfin. Non."

   J'étais incapable de dire si je mentais ou non. Avais-je envie de recommencer ? Non. Allais-je recommencer ? Je ne savais pas.

"Reste avec moi. Je t'en supplie, reste avec nous, avec les vivants."

   Il se rapprocha et me prit de nouveau dans ses bras, posant son menton sur ma tête. Je ne faisais rien. Deux minutes s'écoulèrent avant qu'il ne reprenne en prenant ma tête entre ses mains pour, une nouvelle fois, me forcer à le regarder.

"Jure moi que tu ne vas pas recommencer. C'est le premier amour, c'est normal. Ce sera dur de l'oublier mais... Mais tu pourras y arriver. Tu es forte Lili et... Tu pourras le faire."

   Je le regardais. Nos respirations étaient toutes deux irrégulières. Lui par le flux d'émotions ressentis, moi par un sentiment dominant. Et je lui répondis :

"Jurer ne servirait à rien. C'est de la confiance. Et je ne peux pas te garantir que je peux oublier. Ça va servir à quoi que je te promette ? D'accord, je l'ai fait une fois, et après ? Après quoi ? Tu ne veux pas que je recommence et je t'ai déjà dit que je ne vais pas recommencer, ça te suffit pas ?

-Lili...

-Non. Ecoute. Tu me crois ou tu ne me crois pas. Je ne vais pas recommencer. Pas besoin de jurer.

-Tu t'énerves pour rien.

-Non je ne m'énerve pas !"

   Je devais reconnaître que mon ton augmentait. Je m'étais levée. Je lui montrais la porte d'un signe de main.

"Sors.

-Lili...

-Sors !"

   Il se déplaça jusqu'à la porte et tenta une dernière fois :

"Je ne t'ai pas demandé de m'aimer, seulement d'oublier...

-Je ne jurerais pas !"

   Je claquais la porte d'un geste sec. Il ne s'était passé que trois minutes. Je n'avais pas envie d'oublier.

Cœur briséOù les histoires vivent. Découvrez maintenant