Ce soir là, je rentrais du lycée,comme chaque jour, épuisée. Je savais déjà ce qui m'attendait chez moi : ma mère allongée dans le canapé, une bouteille de whisky dans une main, une cigarette dans l'autre, les traits tirés, les cheveux en bataille, les mêmes vêtements sales que la veille. Depuis la mort brutale de mon père décédé d'un arrêt cardiaque, elle passe sa vie ainsi, attendant sûrement que la mort vienne la chercher, lui permettant de rejoindre l'amour de sa vie. Elle aimait mon père comme personne ne peut aimer un homme. Je trouvais ça beau avant, maintenant je me rends compte que cet amour n'était pas beau, cet amour était destructeur. Il a détruit ma mère. Elle est devenue une loque. Un monstre. Elle passe sa vie à boire et je me sens démunie face à cela. Comment pourrais-je la consoler alors que je suis moi même inconsolable ?
"_ Tu as encore bu ? Lui demandais-je en soupirant.
_ Ta gueule c'est moi l'adulte. Je...je fais ce que je veux. Me répond-t-elle, la bouche pâteuse.
_ On ne dirait pas....Chuchotais-je."
Pendant un moment, j'ai pensé à la mettre dans un centre spécialisé mais je n'ai pas pu m'y résoudre. J'avais déjà perdu mon père je ne pouvais pas perdre en plus ma mère. Je pensais que ce n'était qu'une période, que tout s'arrangerait avec le temps, qu'elle ferait son deuil. A présent,cela faisait un an que je supportais son état, que je la voyais dépérir. J'aimais ma mère, dans le passé nous avions une relation très fusionnelle, je n'aimais pas la voir ainsi. Je voulais qu'elle aille mieux, néanmoins je ne pouvais pas me résoudre à l'écarter de moi, elle qui avait déjà perdu son mari, ou peut-être que j'étais trop égoïste pour avouer que je ne pensais qu'à moi en la gardant à mes côtés. Mais cette situation ne pouvait plus durer. Je ne pouvais pas continuer de regarder ma mère mourir à petit feu.
"_ Maman...tu dois te faire soigner....ça ne peut plus durer....
_ Quoi ? Qu'est ce que tu racontes ? C'est ton père qui va mal pas...pas...pas moi.
_ Je vais appeler le médecin. Tu dois être prise en charge maman. Tu es en train de te détruire et ce n'est pas ce que papa voudrait.
_ Ne parle pas de ton père ! Tu ne sais rien ! Il n'aurait pas voulu être séparé de moi !"
Elle fut prise de tremblements et se mit à pleurer en poussant de grands cris. Ses yeux étaient grand ouverts et elle se griffait la peau dans un élan de folie. Je ne l'avais jamais vu ainsi. Je restais ainsi, terrifiée, n'osant pas m'approcher. Du sang s'écoulait de ses plaies mais elle continuait,criant toujours plus fort. Je voulais lui dire d'arrêter, de me regarder, de s'en sortir, de m'écouter mais pas un son ne fut capable de sortir de ma bouche. J'étais immobile et incapable de bouger pour aider ma chère maman. Je la voyais dans sa folie. La bouteille éclata au sol alors qu'elle poursuivait sa crise s'arrachant les cheveux. Puis, tout d'un coup, elle cessa de crier, de bouger, ou de pleurer, ses yeux restèrent grand ouverts, fixes et vitreux. Elle était morte. Son souhait avait été exaucé : elle avait rejoint mon père. J'étais partagé entre le soulagement de ne plus la voir souffrir et la tristesse d'être devenue orpheline et d'avoir assisté à ce spectacle. Après ce qui me parut un long moment, mes membres recommencèrent à m'obéir, et je m'approchais du corps de ma mère. Les larmes devalèrent mes joues alors que d'une main tremblante je lui fermais les yeux. Au fond de moi, j'avais toujours su que ce moment arriverait un jour, j'avais juste essayer de me convaincre du contraire. Cette scène ne me quitterait jamais et je m'en voudrais éternellement de ne pas avoir su l'aider, de ne pas l'avoir fait hospitaliser.
"_ Tu sais maman je voulais juste que tu ailles mieux. Je suis désolée...Je t'aimais moi aussi. Je t'aimais.... "
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Je Voulais Juste Te Dire...
PoetryVous trouverez plusieurs parties parlant de la vie, de la mort, de l'amour, des sentiments que nous pouvons ressentir chaque jour, que vous ressentez peut-être à cet instant... Elles sont toutes indépendantes et fictives. Ce sont principalement des...