Risibles amours.

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11 janvier 2011, 14:00, Paris, Suga.

Je souffle encore une fois en regardant ma montre. Comme je l'ai fait il y a cinq secondes, et comme je le referais dans les cinq suivantes si il se bouge pas. J'ai mal au ventre, sûrement à cause du stress. La salle d'attente me donne la nausée, ses couleurs ternes qui tirent sur le vert n'arrangent pas les choses. Je croise mes bras en apercevant la tête de Ken.

-T'es en putain de retard, encore une fois.
-Mais au moins j'suis là, comme je l'avais dit, il m'embrasse rapidement.
-J'ai peur.
-Pourquoi ?
-Imagine si ça va pas.
-Penses pas à des trucs comme ça wesh, il me prend dans ses bras, j'te promets que tout ira bien.
-Collins Énes.

Ken se détache de moi et me suit à l'intérieur. Je remplis quelques papiers et elle me tend une sorte de petite blouse que j'enfile.

-Vous pouvez vous allonger. Cette première échographie va vous permettre de savoir depuis combien de temps vous êtes enceinte, et vous pourrez voir votre bébé sur l'écran.

Je prend place sur la table. Ken est debout à côté de moi, il me tient la main. La gynécologue étale son produit sur mon ventre. C'est froid la putain de sa mère. Elle glisse la sonde sur mon ventre. Ken me presse la main, ses yeux brillent. Je me tourne vers l'écran, mes yeux deviennent rapidement voilés. Je souris, pour de vrai cette fois.

L'examen se termine rapidement.

-Tout va bien, vous êtes enceinte de treize semaines.

11 janvier 2016, 15:00, Paris, Suga.

Megan me poudre une dernière fois le nez, elle prend du recul et contemple son travail. Elle lève son pouce en l'air, je souris et me lève du tabouret. J'enlève le peignoir qui couvrait mon corps jusque là. Benji me complimente, je rejoins la horde de mannequins. Le photographe appelle plusieurs d'entre elles, je reste en retrait dans les loges.

-Énes, Benji m'interpelle, y a quelqu'un pour toi !

Sûrement Clém.

Je n'ai pas le temps de répondre que mon nom fuse dans la salle.

-Excuse moi, dis lui de venir voir le shoot ! Je cours pour rejoindre le photographe.

-Tu peux te mettre plus à gauche. Voilà comme ça, super chérie, il prend quelques clichés, me suggérant de sourire par moment.

Benji entre dans la pièce, mon sourire disparaît d'aussitôt, ce n'est pas Clément. Je fixe le blond à la casquette, il sourit. Je serre les dents et continue de poser. Je me sens mal à l'aise, en sous-vêtements, devant lui. Je termine les clichés et retourne enfiler mon peignoir en loge. Ken y entre.

-T'as décidé que t'allais pourrir chaque moment de ma vie à Paris ?
-Non. T'es magnifique, il me dit.
-Merci. Pourquoi t'es ici ?
-J'voulais te voir, il hausse les épaules.
-Pourquoi tu fais ça Ken ? Pourquoi tu te laisse pas vivre heureux sans moi ?
-Parce que sans toi j'le suis pas, il souffle du nez.
-C'est des conneries, c'était une habitude qu'on se sépare, t'es habitué à être sans moi, je conclus.
-Il a fallu que j'oublie nos habitudes pour laisser ta place à la solitude.

Je ne sais pas quoi répondre.

-J'ai jamais arrêté de t'aimer, Suga, il reprend, et j'sais que c'est pareil pour toi, même si tu me recales presque à chaque fois.

Il pose sa main sur ma joue, mes yeux se ferment, je frisonne, c'est certainement à cause de ma tenue légère. Son souffle chaud se répand sur mes lèvres.

-Énes ! Benji croise les bras sur sa poitrine.

Ken détache ses lèvres des miennes.

-Benji. Hm, je bafouille, il.. je. N'en parle pas à Clément j't'en supplie.
-C'est plus à toi de lui dire qu'à moi, tu va lui dire j'espère, il s'inquiète.
-Non ! C'était stupide, et c'était la première et dernière fois, je n'ai pas envie qu'il me lâche, je fixe Ken pour qu'il imprime bien mes mots.

Il esquisse un sourire en coin et rabat la visière de sa casquette.

-Il va vraiment falloir que tu m'expliques tout ça, il soupire, rhabille toi, le chauffeur arrive dans vingt minutes.

J'hoche la tête et détache mon peignoir quand il a quitté la pièce.

-T'es inconsciente de faire ça devant moi, Ken rit.
-Non. Puisque je sais que rien ne se produira, j'ai dit que c'était la dernière fois.
-T'as aussi dit que c'était la première alors que c'est absolument faux, il remarque.

Je ne fais pas plus attention à ses paroles que ça. J'enfile mon pull et mon jean. Je cherche mes Cortez, impossible de les trouver. Mes pieds me supplient de ne pas rentrer en talons.

-T'aurais pas vu ma paire de Cortez bleues ?
-T'as essayé sous la coiffeuse ?

Je me frappe le front, je les ai laissées là quand Megan m'a refilé la paire de talons. J'attrape mes chaussures et les enfiles. Je mets ma parka et mon écharpe. Je m'apprête à quitter la loge.

-Au fait, Su, je me retourne vers lui, ça te va bien comme métier. T'es vraiment belle.

Je souris et quitte le bâtiment. Benji m'attends devant la Mercedes. Je monte à l'arrière et sort ma paire d'écouteurs.

-Enlèves tes écouteurs, on va parler, Benji prend place à côté de moi.

Je souffle et enlève les morceaux de plastique de mes oreilles.

-Y a rien à dire, je rétorque.
-C'est qui, lui ?
-Ben.. oublie, d'accord ?
-Non, non, non, Énes, c'est pas correct par rapport à Clément ce que tu fais.
-Je le sais très bien ! Mais c'est plus fort que moi, quand il est dans les parages j'peux pas m'empêcher de redevenir sa Suga, j'avoue.

Il prend quelques minutes de réflexion, je pense que j'en ai trop dit pour éviter le sujet à présent.

-Sa quoi ? Bordel, tu va m'expliquer ?
-Laisse moi le temps d'expliquer tout ça à Clément.

Il ne dit plus rien du voyage, il sait que je ne cracherais pas le morceau. La voiture se gare devant chez moi, je sors et monte directement. Je déverrouille ma porte et pénètre dans mon appartement.

-Oh, t'es là, Clément s'empresse de m'embrasser.

Ça me culpabilise de l'embrasser après avoir embrasser Ken alors je me détache au bout d'un certain temps pour ne pas l'alerter.

-Au fait, ma mère atterrit jeudi, elle a prit rendez-vous pour préparer le mariage !

Génial, manquait plus que ça.