Chapitre 20

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– C'est une blague ?

La porte grande ouverte, Constantin nous faisait face, les yeux ronds, et la mâchoire contractée. Il nous fixa l'un après l'autre, nous dévisageant alternativement. Si sa tête était assez amusante à voir, le Boss nous révéla plus tard que nous n'en menions pas large non plus. Je crus défaillir. Lui, s'occuper de notre entraînement ? Je n'en revenais pas. Je sentais qu'il serait compliqué de nous entendre avec lui, quand bien même son aura de puissance forçait le respect.

Preuve en est, nous avions prononcé ces quelques mots avec une synchronisation exemplaire, bien loin de celle que l'on penserait atteindre normalement. Nous nous fixions, sans vraiment y croire. Pourtant, quand notre regard croisa celui de John, on comprit que malgré son sourire naissant, il était parfaitement sérieux et conscient de ce qu'il nous imposait. Cela semblait même l'amuser un peu.

– Ai-je l'air de plaisanter ? Demanda-t-il.
– Eh bien oui, justement ! Répliqua Constantin, sur les nerfs. Votre sourire nous indique le contraire !
– Et de toute façon, ce n'est pas vraiment logique, ajouta Lucas, parce que vous savez que la coopération sera difficile, surtout si notre « entraîneur » n'est pas heureux de nous avoir avec lui.
– C'est justement là que tu te trompes, Lucas, répliqua le patron. Le fait de ne pas vous entendre est un élément décisif lors de missions. Si je vous mets ensemble, c'est bien pour améliorer tout cela. N'en déplaise aux âmes solitaires.

Je détournai le regard, et devinai que Constantin fit la même chose, au vu de son soupir dédaigneux. Pour dire vrai, je n'étais pas le plus enchanté. Travailler avec Constantin, en prenant du recul sur notre relation, s'avérerait difficile. Nos âmes solitaires se fondaient comme l'huile et l'eau, chacun des éléments marchant dans une direction opposée.

– Le travail d'équipe vous semblera peut-être futile parce que vous avez l'orgueil de ceux qui ont du potentiel, mais je vous assure que ça vous sauvera la vie.
– Si vous le dites... répondit Constantin.
– Et Constantin, si je te confie cette mission, c'est bien parce que tu es un de mes meilleurs élèves. Je te fais confiance. C'est pour cela que je veux que tu les entraînes, afin qu'ils perfectionnent leurs techniques. N'oublie pas ce que je t'ai dit la dernière fois.
– Bien. Vos désirs sont des ordres.

Constantin s'inclina légèrement et se retourna pour sortir à nouveau. Venais-je de rêver ? Il s'était incliné... Cela me surprit. Néanmoins, je me retins de faire un commentaire stupide, pour éviter de dégrader plus l'ambiance entre nous. Davis nous fit un petit sourire, nous indiquant de suivre notre guide. Avec Lucas, on se regarda, surpris, avant d'emboîter le pas à notre nouveau compagnon.

– Une dernière chose, nous interpella le Boss.

On s'arrêta, net, attendant ce qu'il allait nous dire. Un petit silence pesant retentit comme le son d'une cloche que l'on fait retentir. Ce dernier porta la main près de sa bouche, puis toussa :

– Allez-y doucement. Surtout toi, Constantin.

L'archer hocha la tête et sortit de la pièce, non sans un petit sourire. On put alors le suivre. Lorsque l'on franchit la porte du bureau pour retrouver l'air de dehors, un poids s'ôta de mes épaules. La tension qui régnait dans la pièce était oppressante. Les quatre murs qui nous entouraient semblaient, au fur et à mesure de l'entretien, se resserrer autour de nous, au point d'écraser nos cœurs. Plus d'une fois, j'avais vu que Lucas transpirait et regardait à droite puis à gauche.

Moi-même, je m'étais senti emprisonné. L'aura dégagé par cet étrange personnage avait oscillé entre le glacial et le chaleureux. Et même si je savais à présent que je pouvais faire confiance tant au Boss qu'à notre nouvel entraîneur, ce que j'avais ressenti quelques minutes auparavant restait coincé dans mon esprit et pesait sur moi comme le monde sur Atlas.

Virtuellement vrai [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant