Jackson/Lizzy

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  Jackson/ Lizzy

Adossé contre le magnolia à l'abri des regards, je me laisse envouter par l'odeur qui se diffuse des jeunes fleurs, à travers leurs parfums, je puise le courage pour aborder Lizzy.

D'un regard attentif, j'observe la jeune femme qu'elle est devenue. Sa démarche évolue d'un pas assuré en direction du bar. Je revois la jeune fille au corps enfantin qu'elle détestait tant quand elle nous a quittés. Cette silhouette si pudique a laissé place à une femme, révélant une beauté dont elle-même ne doit pas avoir conscience. Si elle pouvait un instant imaginer le nombre de fois où j'ai désiré la maudire d'être partie, exigé à mon âme de la haïr mais, jamais je n'ai pu le faire.

Malgré toute la rage qui s'est accumulée en moi, pour rien au monde je ne pourrais la détester, car Lizzy est mon âme-sœur fraternelle, ma moitié pour toujours, et même la mort ne pourra endommager ce lien qui nous unit. Son visage rond brille d'un sourire féerique quand elle aperçoit Juju courir à son encontre pour se jeter dans ses bras, leurs retrouvailles si explosives de la part de notre Justine me fait sourire. J'ai longtemps cru que Ju ne pardonnerait jamais le départ de son amie mais grâce à son excentricité si flamboyante, elle nous a aidés à combler le vide que l'absence de Lizzy a irrigué en nous.

Le jean que porte Li épouse parfaitement la rondeur de ses hanches, trahissant sa grossesse qu'elle m'a avouée dans un torrent de larmes qui m'a ému, brisant mon cœur qu'elle puisse douter de mon amitié envers elle. Ce jour-là, je me trouvais à l'autre bout du monde. Je ne pouvais rien faire pour la réconforter physiquement, alors j'ai accepté durant une perme de parcourir les kilomètres qui nous séparaient pour être vers elle le temps des douze heures que je pouvais lui offrir. Malgré les trente-six heures restantes fractionnées entre l'avion, l'attente à l'aéroport et mon retour à la base, il m'était vital que je sois à ses côtés.

Lors de mon retour, mon visage exprimait à travers ses traits de la fatigue, une déprime qui s'était éveillée en moi par l'état de ma meilleure amie qui se dégradait mais qui souriait malgré tout, et cela grâce à Thomas qui malheureusement, nous a quittés une semaine après ma visite. Je ne pouvais que la soutenir mentalement, j'étais déployé pour deux ans et le peu de temps libre que nous avions ne m'a pas permis de la rejoindre. Chaque lettre, chaque appel vidéo que nous avons échangé, je la voyais sombrer de plus en plus dans un tunnel froid et lugubre. Je voulais déserter et être près d'elle pour l'aider à vivre sa grossesse dans la sérénité, mais la raison des conditions de vie que je lui aurais offerte n'était pas envisageable, je ne pouvais pas lui imposer une vie de fugitif. Et puis un jour, elle m'est apparue souriante, me montrant un bébé emmitouflé dans une couverture rose et là, j'ai su qu'Angèle serait la lumière qui l'aidera à traverser cet obscur et étroit passage de sa vie.

Depuis quatre ans, nous vivons notre amitié via Skype. Quatre putains d'années où je ne cesse de prêcher le faux pour connaitre la vraie raison de son départ. Malgré la relation qui vit entre nous, elle n'a jamais cessé de me répéter maintes et maintes fois cette simple réponse : un mec, une fille, une rupture. Connaissant ma Miss Bennet, surnom que je lui ai administré dans le but de la taquiner, le jour où je l'ai surprise à lire secrètement cachée dans son garage « orgueil et préjugés », et, tout naturellement, elle a acquiescé avec plaisir. Connaissant ma meilleure amie, je peux dire qu'une rupture n'est pas la cause de son abandon. Alors, je me suis juré que quoi qu'il m'en coûte, je découvrirais ce mystère inavoué qu'elle cache au fin fond de ses entrailles.

Mon entrée en scène approche plus vite que je ne le désire, mon cœur bat par intermittence, mes mains moites ne cessent de s'essuyer sur mon jean. Je suis un SEAL qui, en temps normal, a une parfaite maîtrise du contrôle de soi mais je peux dire que là, je perds toute contenance. Mes muscles sont tendus à leur apogée, ma respiration se fait sifflante, je crispe ma mâchoire par peur de sa réaction à chaque pas que je fais vers elle. Comment va-t-elle réagir ? Six mois que je ne lui ai pas donné de nouvelles. Là où je me trouvais, internet n'existait pas, le courrier était trop long pour entretenir une correspondance, alors tout simplement, je n'avais rien envisagé pour la tenir au courant de mes jours passés en déploiement. Deux mètres nous séparent, une légère brise apporte à mes narines une douce odeur de noix de coco, le parfum de Lizzy réveille en moi tous nos moments passés.

GabeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant