Chapitre 19 : L'heure du départ

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Tobio fit irruption dans la pièce sans bruit. Il s'approcha doucement, et c'est en sentant son souffle chaud sur mon épaule que je sursautais.

-Qu'est-ce que tu fais plantée là, à bailler aux corneilles ? Il y a quelque chose dehors ? Demanda-t-il en reportant son attention sur la forêt sombre.

J'en profitais pour rassembler mes esprits, et tenter de rester calme, malgré l'excitation et l'impatience qui m'envahissaient, et semblaient prendre le contrôle de mon corps et de mon esprit.

-Il n'y a rien dehors, Tobio. Déclarais-je en souriant.

-Si tu le dis. Je venais juste te dire que la salle de bain était libre, vu que j'ai fini.

-D'accord j'y vais ! M'exclamais-je joyeusement.

-Tu pourrais m'expliquer pourquoi est-ce que tu sembles soudainement si heureuse ? Quelque chose de bien est arrivée ?

J'attrapais mes vêtements en chantonnant un air doux, et me retournais, prête à aller me laver. En passant je lui claquais une bise sur la joue, ce qui lui fit lâcher son linge d'étonnement.

-Non mais sérieusement, qu'est-ce qu'il t'arrive.

-Un truc de fille, tu ne pourrais pas comprendre. Ah, et non, avant que tu ne t'imagines des trucs, je ne suis pas enceinte.

Je le laissais là, bras ballant, et m'en aller en continuant de chantonner, heureuse de mon privilège. Qu'est-ce qui pouvait bien m'attendre au bout de ce chemin étoilé ? Nathan débarqua dans la chambre, au moment où je m'apprêtais à sortir.

-Bonsoir Nathan. Ta douche était agréable ? Bon, je te laisse, hein. Déclarais-je avant de lâcher un petit rire.

Il se tourna vers Tobio, qui haussa les épaules. Je n'attendais pas qu'on me pose de questions, et je me dirigeais tranquillement dans la salle de bain.

Je tentais de prendre le plus possible mon temps, afin de le faire passer plus vite. En vérité, je ne savais même pas pourquoi j'étais aussi heureuse de ce petit évènement. Il était presque sûr que j'allais être déçue au final, mais je ne pouvais m'empêcher d'être heureuse d'avoir quelque chose que moi seule avait. Je me demandais bien ce qu'Hiver me réservait. Juste le fait d'avoir ce privilège, une petite chance de me rapprocher d'une nouvelle saison, d'une nouvelle personne, voir juste de me changer les idées, cela me rendait étrangement joyeuse.

Alors que je venais à peine de sortir de la douche, et que j'arrivais tout juste dans la chambre, Marlène fit irruption.

-Bien, le couché est tôt ce soir.

Une vague de protestation s'éleva aussitôt.

-Désolé, mais la journée de demain va probablement être remplie. Ne traînez pas trop. Je repasserais d'ici une petite demi-heure histoire de vérifier que vous êtres bien couchés.

Elle nous fit un petit sourire, avant de ressortir de la chambre. Je m'empressais de la suivre jusqu'à la porte, et je refermais cette dernière, puis me tournais vers mes trois amis, ou plutôt, pour le coup qui allait venir, mes trois complices.

-Les gars...et toi aussi Juliette...J'ai un tout petit service à vous demander...Un tout petit, petit...

A cette réplique, ils se regardèrent, puis leurs regards convergèrent dans ma direction, méfiants.

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Une dizaine de minutes plus tard 

-Tu es sûr que la fenêtre ne va pas se refermer ? Je n'aimerais pas me retrouver bloquée dehors. Déclarais-je en inspectant la grande et seule fenêtre de la chambre.

Cette fenêtre se refermait toute seule, emportée par son poids. Pour la maintenir ouverte, il allait falloir la bloquer avec quelque chose. Néanmoins, je pourrais aisément passer par celle-ci. C'était la seule solution, sachant que j'avais quand même énormément de risques de rencontrer un garde en chemin.

-Je t'assure que non. Il suffit de la bloquer avec ce petit bout de fer, là. Je l'ai déjà fais, pendant la période d'essai de l'abri, pour aérer la chambre.

-Malgré cela, je trouve cela très imprudent. Commenta Juliette.

-Oui je sais...mais je meurs d'envie d'y aller. Vous l'avez vu comme moi, ce chemin étoilé mène à quelque chose, qui doit être très spécial, j'en suis sûre !

-Non justement. Tu es la seule à le voir, puisque c'est à toi qu'Hiver à donné la bille. Si tu te perds, qu'est-ce qu'on fera ? A l'aube, on ira dire que tu as mystérieusement disparue ? Ou bien on avouera tout ?

-Je sais bien que c'est risqué, mais comprenez moi, un peu. Qu'auriez-vous fait à ma place ? Et ne me mentez pas en me disant que vous n'auriez rien fait. Vous y seriez allés, parce que tous les Hommes sont rongés d'un mal : la curiosité. Tôt ou tard, ils cèdent. Et cela peut mener aussi bien à leur perte qu'a leur réussite. J'en suis consciente, mais je ne peux pas m'en empêcher.

-Je ne pense pas que te laisser y aller soit le meilleur des choix. Mais t'en empêcher est le pire de tous. Parce que tu trouverais un moyen d'y aller, qu'on le veuille ou non. Alors autant le faire, mais bien le faire, avec le maximum de sûreté. Commenta Nathan de sa voix calme et posée.

Il commençait enfin à communiquer en ma présence. Et je n'avais pas à m'en plaindre, puisque les deux fois où l'on s'était parlé, il m'avait donné la solution du problème, et là, il me défendait.

-Très bien. Soupira Tobio.

-Merci de m'aider.

-Ne me remercie pas. Remercie plutôt Nathan. Si cela ne tenait qu'à moi, je ne te laisserais même pas mettre un cheveu dehors. Déclara-t-il sèchement avant de s'éloigner, se dirigeant vers son lit.

Le fait qu'il le prenne mal me blessa légèrement, mais je préférais ne rien en dire.

-Allons tous nous coucher, Marlène ne va pas tarder ; tu n'auras qu'à partir après, Angélica. Déclara-t-il en accentuant volontairement mon prénom.

Je le fusillais du regard, ne comprenant pas son comportement. Il répliqua, en m'en envoyant un également. C'était la première fois qu'il m'envoyait un tel regard meurtrier, et j'étais déçue. Très déçue.

L'on se mit finalement tous au lit. Tobio évita le plus possible de m'adresser la parole et de me regarder. Je ne savais pas si c'était la jalousie qui le faisait se conduire ainsi, mais c'était réellement agaçant.

Marlène passa, comme prévu quelques minutes plus tard. Elle nous souhaita la bonne nuit, avant de sortir de la chambre, refermant la porte derrière elle.

J'attendais quelques secondes, avant de me lever, suivie par Juliette, qui se dirigea vers la fenêtre. De mon côté, je me changeais, j'enfilais mes chaussures chaudes, et un gros manteau. Je mettais également mon écharpe, avant de me diriger vers la fenêtre.

-Je suis la première à veiller ton retour. Le second sera Tobio, et ensuite Nathan. Chuchota Juliette en ouvrant ma seule porte de sortie.

-D'acc'. Merci beaucoup.

Sur ces mots, je lançais un dernier regard derrière moi, hésitant quelques secondes, avant de balayer ce doute, et de sortir de la chambre, plongeant dans la noirceur de la nuit et de la forêt ensommeillée.

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