Vero. La gifle venait de Vero. Nox était sur ses talons et lui aussi semblait sur le point de me matraquer de coup de bambou psychique.
Ils se fichaient disaient-ils que je sois mordue, lorsque je leur montrais mon bras. Ils se fichaient que je risque de les mordre à mon tour disaient-ils. Ils se fichaient du monstre que j'allais devenir disaient-ils. Mais ils étaient furieux que je décide de m'enfuir, hurlèrent-ils.
"C'est qui lui ? demanda Nox d'un ton dédaigneux."
Lui et Vero remarquèrent enfin Hell, qui rougit.
"Je vous présente Robinson Crusoé, l'homme qui ne connaissait pas la mousse à rasée, riais-je."
Hell ria à son tour. Ses yeux semblaient dire: Robinson Crusoé, hi-la-rant !
Vero et Nox nous fixaient, interdits. On devait vraiment donner l'impression d'être deux grands cinglés. Je l'aimais bien Hell en fin de compte.
"Bon, dit-Nox, c'est pas que ce n'est pas drôle, mais si on allait se mettre à l'abris avant de servir de steak haché aux bouffeurs d'organes.
_ En plus la sauce tartare ne me va pas au teint, ironisa-Hell.
_ Oui, renchérit Vero faisant semblant de ne pas avoir entendu, on a trouver un lieu à peu près sur. Une maison, ou presque.
_ J'espère qu'il y a un nécessaire de rasage, souriais-je en fixant Hell."
On emboîta le pas à Nox et Vero. Hell me murmura à l'oreille:
"Dis donc, ils sont toujours aussi folichon tes copains ?
_ Heureusement que je suis discrète et sérieuse moi au moins, répondis-je sur un ton digne d'une grande actrice de tragédie."
Ils ne s'étaient pas fichu de nous ! La maison qui leur servait de refuge était géniale ! Il s'agissait d'une cabane, en hauteur, qui était facile à mettre hors d'atteinte des zombies, il suffisait de remonter l'échelle. J'adorais l'idée. Elle aurait presque pu venir de moi. Nox en tant normal avait le vertige, et quand on était petits, malgré le fait que, je cite, "je lui cassais les pieds", Nox avait toujours catégoriquement refusé de faire une cabane en hauteur. Je suppose que maintenant, il n'a plus tant le vertige que ça. Ah ! La fin du monde que ça change un homme !
Je fus surprise de voir que même sans moi ils avaient réussi à très bien survivre, trop bien même. Cela ne faisait même pas quatre jours depuis l'épisode de la maison d'horreur, et voilà qu'ils avaient une cabane avec tout un nécessaire de soin, des provisions, des couvertures, des produits hygiéniques...
"On a trouvé un épicier sur le chemin pas loin, et on a pensé que son proprio nous en voudrait pas trop si on lui piquait quelques trucs, expliqua Vero"
Je lui souriais, elle qui se sentait coupable en volant un grain de raisin dans un supermarché ! Hell cria "Houra !" en tendant d'une main triomphante un rasoir jetable. J'explosai de rire, et Nox roula les yeux au ciel.
"On en a deux maintenant, soupira-t-il"
Je lui tirais la langue, R.I.P la maturité. Mais en réalité je savais qu'il était heureux de me retrouver, et la présence d'Hell ne semblait pas tant le déranger que ça. Notamment lorsque ce dernier revient tout propre, tout frais, tout rasé.
Il fit un clin d'oeil à Nox avant de s'avachir sur une couverture et roupiller, et je jurais avoir vu Nox rougir avant de se mettre à la fenêtre pour monter la garde.
Aussi bêtement que ça puisse paraître, les semaines suivantes, la vie avait fini par reprendre ses droits. Bon, certes, les morts marchants traînaient toujours dans les rues, les maisons, les supermarchés, et certains étaient aussi bloqués dans la rivière près de la cabane. On les entendait de temps en temps pousser un grognement pour essayer de se sortir de la flotte. Précision numéro 1, les grognements des zombies sont un curieux mélange entre une symphonie de Prokofiev dont les instruments seraient emprunt à une maladie dissonante, et un aire de deathmetal dont le chanteur serait aphone. Je sais tout cela n'a pas trop de sens, mais à l'heure où les cadavres bouffent les humains, le sens est une question de perspective.
Vero me faisait quotidiennement passer des tests pour voir l'avancé de la "toxine", c'est le mot qu'elle employait, toxine. J'aime bien ce mot. "Toxine." Je trouve qu'il sonne bien.
"Tu réfléchiras à la sonorité des mots plus tard, me dit-elle d'un air à la fois sévère et attendrie, pour le moment donne moi ton bras."
J'obéissais comme toujours. La toxine, donc, ne semblait pas se rependre à la vitesse normale en moi.
Précision numéro 2, j'étais un cas anormal en morsure de zombie. Nox et Vero semblait penser que j'étais peut-être "immunisée" (avec cinquante mille guillemets et toutes les précautions nécessaires), que mes anticorps combattaient la toxine. (Décidément, je ne me lasserais jamais de ce mort !) Hell disait juste que j'étais trop têtue pour devenir une bouffeuse d'organe. C'est dingue avec quelle rapidité il avait fini par être adopté par l'équipe.
Précision numéro 3, j'étais le cobaye de Vero, plus qu'elle n'était mon médecin.
Précision numéro 4, si elle continuait à me prélever du sang ainsi, je ne tarderais pas à ne plus en avoir.
Notre train-train quotidien, se résumait à faire des explorations dans la ville, histoire de ne jamais être en manque ni de provisions, ni de cachettes secrètes. On montait la garde à tour de rôle. On s'occupait des bouffeurs-d'organes qui s'approchaient d'un peu trop près de notre refuge. Et on arrivait même a rire parfois. Surtout qu'Hell n'est pas mal dans son genre comme comique.
Oui, la survie ne craignait pas tant que ça quand on avait des amis avec qui la partager.
Encore une fois, j'avais la tête un peu trop dans les nuages. Hell me coinça derrière un mur, plaquant sa main sur ma bouche pour que je me taise. Je pense que c'était devenu une habitude. J'avais presque envie de le mordre pour le toxiniser.
"Chut, me dit-il alors que j'allais l'incendier d'insulte, regarde là-bas."
Sans faire de bruit, ou du moins en essayant, et en essayant de me montrer discrète aussi, je vis au loin un groupe d'hommes charger un zombie dans un camion. Les hommes portaient de longues blouses blanches comme les médecins à la télé, et des masques à gaz. Ne me demandez pas pourquoi mais les poils de ma nuque s'hérissèrent. Un frisson entier me parcouru. Et je renversai un bidon d'essence posé non loin de mon pied.
Hell jura dans sa barbe, qu'il avait fraîchement rasé. Et on se mit à courir.
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Une Cinglée parmi les Zombies
FantasyAu début, j'étais la seule cinglée de mon lycée, le genre de fille qui rit pour un rien et ne se prend pas au sérieux. Maintenant, le monde entier est devenu dingue. Les morts sont revenus à la vie pour tuer les vivants qui reviendront à la vie pour...