Chapitre 5

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Uliva tomba lourdement sur ses genoux et s'effondra sur le sol. Une large auréolé de sang imbibait sa tunique de cuir. Sa respiration était haletante

« Il faut le soigner, apportez moi de l'alcool et un linge propre. Ordonna Dellah.

-    Ça ne servira à rien. Lui répondit Soïko. C'est un Dizurt, on ne peut les soigner que dans leur environnement naturel, pour lui, la forêt. Je sais que certains d'entre eux gardent sur eux quelques branches ou feuilles pour se protéger. Il en a sûrement sur lui. Cherchez dans ses affaires. Mereïn se précipita la besace d'Uliva, et il y trouva divers instruments étranges, quelques parchemins en runes, et une pierre ronde et bleue.

-    J'ai trouvé ! Cria un des gardes qui fouillait dans la veste du blessé. Il brandit une petite fiole en verre contenant un liquide transparent qu'il donna à Soïko.

-    Oui ! Ça doit être une eau de rivière de sa forêt. Il se pencha sur le corps, et répandit le contenu sur le torse mutilé de nombreuses et larges entailles. Uliva fut pris de convulsions et se réveilla un hurlant de toute sa voix, alors que, à l'étonnement de tous, les plaies commençaient à se refermer lentement sur son thorax. Il reprit petit à petit connaissance, sa respiration se stabilisa, son pouls se calma. Il se redressa péniblement, regarda ses compagnons tour à tour, puis tout d'un coup se leva d'un bond. Il paraissait affolé.

-    Où est il ? Où est il ? Hurla Uliva

-    Ne t'inquiète pas, il est parti, nous lui avons fait peur. Dit Dellah en tentant de le rassurer. Qui était ce ? Qu'est ce qu'il s'est passé, nous n'avons rien vu à part que tu te battais avec quelque chose ou quelqu'un.

-    Je ne sais pas, tout s'est passé très vite, il m'a pris par surprise. Il était armé d'espèces de lames acérées. C'était un excellent guerrier. Il m'a presque tué, heureusement que vous avez trouvé mon eau de source. Mais ne tardons pas il faut lever le camp, dépêchez vous, il va revenir, mais pas seul.

-    Pourquoi nous ont ils attaqués ? Demanda Mereïn.

-    Je ne sais pas. Lui répondit à Uliva d'une voix qui disait loins qu'elle n'en savait. Je te prends sur mon dos, nous n'attendons pas les autres.

-    Mais si ces inconnus les retrouvent avant qu'ils ne soient arrivés ?

-    Tu es plus important qu'eux, mais ne t'inquiète pas. Nous avons pris par surprise, maintenant nous sommes au courant, et nous serons sur nos gardes. »

Mereïn laissa alors sa petite compagnie autour de leur feu, fit de courts aux revoies, et grimpa sur le dos d'Uliva qui laissait ses dernières consignes. Par rapport à lui, Mereïn n'était pas plus grand qu'un enfant de 4 ans. Le Dizurt respira profondément, prit appui sur son pied, et s'élança. L'adrénaline montait à la tête du jeune homme qui n'avait jamais connu pareille vitesse. Il lui était impossible de s'endormir, tant l'expérience était inoubliable. Bientôt, le soleil se leva tendrement et envoya ses bras chatouiller la campagne qui frémissait avec le vent. Comme dans un conte, le décor apparut. Autour de lui, les paysages et les champs défilaient minute après minute. L'or de l'aube enflammait le blé d'une couleur mêlée de rouge et de doré. La respiration du Dizurt soulevait lentement sa poitrine, dans rythme de plus en plus saccadée.

« Ça va ? Nous devrions faire une pause, tu n'es pas en état de...

-    Non, nous sommes presque au port, dans quelques minutes. Le coupa Uliva en continuant de courir avec le vent qui sifflait. Nous avons tardé. En temps normal, je traverse Angör en une heure seulement... »

En effet, au loin, la silhouette des quais s'esquissa doucement. De grandes volutes de fumée s'élevaient lentement dans l'air.

Une minute après, ils étaient sur le pont d'embarquement d'un grand voilier couvert de grandes voiles noires qui flottaient avec le vent.

Le vieux Sermante descendit du bateau pour les accueillir.

«Vous voilà déjà là. Vous n'avez pas traîné. La mer est avec nous : le vent est clément et nous portera à Vivequo en seulement un jour ou deux, mais, où sont les autres ?

-    Ils arrivent, j'ai amené Mereïn avec moi, mais nous en parlerons plus tard. Nous avons rencontré quelques difficultés sur notre route. Je retourne chez moi, je dois me faire soigner. Je serai de retour dans quelques heures.

-    Très bien, embarquons Mereïn, nous partirons à la tombée de la nuit, ne sois pas en retard. Dit il d'un air troublé. »

Ils montèrent tous deux à bord du bateau. Sur le pont, un équipage s'activait à astiquer le parquet, réparer le mat, nettoyer les voiles. Les appartements étaient situés à l'arrière et on y accédait par un petit escalier qui se continuait en petit couloir étroit qui ouvrait sur six petites chambres. La plus grande avait été donnée à Mereïn et Merenïs. Après le voyage fort peu agréable sur le dos d'Uliva, l'enfant voulu se reposer et changer de tenue. Mais à l'entrée de sa chambre, deux gardes d'Heleït Döm bloquaient le passage en croisant leur lances. Mereïn fut étonné que des soldats gardent l'entrée de sa chambre, et que l'on ne l'eut point prévenu.

« Bonjour messieurs, j'aimerai accéder à ma chambre.

-    Personne n'entre dans la chambre de la princesse. Dit l'un d'entre eux.

-    Mais je suis son frère... Je loge dans ces appartements.

-    Nous appliquons les ordres. Si nous...

-    Laissez le passer. Intervint Sermante en apparaissant dans le couloir. »

Aussitôt, les gardes se rangèrent et reprirent leur pose immobile. Mereïn voulut demander à Sermante la raison de leur présence, mais à peine s'était il retourné que le couloir était vide. Tant pis, le vieillard ne pourrait pas échapper à ses questions éternellement. Il poussa la porte, entra dans la pièce, et une seconde plus tard, les sentinelles barraient le passage. La lumière entrait dans la chambre par une fenêtre. Deux lits étaient alignés au centre, et sur l'un d'eux, Merenïs était allongée et plongée dans la lecture de « Créatures et plantes de l'au-delà ».

« Ma sœur, comment fais tu pour ne pas dépérir d'ennui...

-    Mon frère, comment fais tu pour être aussi peu cultivé... Elle lui sourit. Je suis heureuse de te voir. Je me suis inquiétée, je n'ai pas dormi de la nuit.

-    Mais pourquoi ? Pourquoi êtes vous tous si inquiets pour moi ?

-    Mais, tu n'es pas au courant ? Elle se mordit la lèvre. Après que tout le monde soit allé se réfugier aux étages supérieurs, les seigneurs d'Angör ont quitté le château en catimini, ont rejoint les rebelles, et leur ont fourni des armes, et leurs soldats. Les gardes du château ont été submergés, les insurgés ont forcé les portes. Ils sont entrés et ont réussi à prendre la partie la plus récente du palais. Le roi et les soldats se sont réfugiés dans la vieille enceinte fortifiée, dans la montagne. J'étais avec le reste de la cour, qu'Anteh surveillait de près, pour éviter les fuyards. Le Roi m'a alors fait venir près de lui, puis il s'est vite rendu compte que tu avais disparu. Et il a tout compris. Il était dans une fureur noire, cela faisait peur. Il a envoyé des tas d'hommes à ta recherche. Il m'était donc impossible de m'enfuir. Nous étions pris au piège. Anteh a fait réunir tous ses gardes, et il a mobilisé toutes ses troupes contre les rebelles, ce qui m'a permis d'échapper aux regards. Je m'attendais à ce que quelqu'un vienne me chercher, mais personne n'est venu à moi. Je suis donc sortie de la vieille enceinte toute seule. Heureusement je suis tombé sur les prêtres du Soleil qui se trouvait je ne sais pourquoi dans la foule. Ils m'ont conduit jusqu'à Sermante qui me cherchait. Je n'ai pas vu le combat mais à ce qu'on raconte c'était un carnage, aussi bien chez Anteh que chez le peuple. Cela a commencé en doléances, et cela va finir en révolution.

-    Le pays est divisé, Vanangaï ne doit que trop se frotter les mains.

-    En même temps, toute guerre commence à l'intérieur de son propre camp.

-    Je suis inquiet, Uliva me cache quelque chose. Quelqu'un nous a attaqué en chemin, il prétend ne pas connaître son agresseur, mais il est allé voir ses frères dans la forêt, il y est déjà allé hier, d'habitude, il n'y a va qu'une ou deux fois tous les deux mois...

-    Les Dizurt ont la capacité de se guérir, mais seulement à un certain endroit, Uliva doit être parti se régénérer quelque part chez lui, je ne vois pas ce qu'il y a d'exceptionnel à ça.

-    Je suis fatigué, arrêtons de parler et allons plutôt manger quelque chose. »

Les roses noiresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant