Elle se fige. Elle sent sa poitrine se serrer, son coeur se comprimer sous l'effet de l'angoisse. Elle suffoque presque. Elle rabat ses cheveux devant ses yeux pour cacher sa stupeur. Sa douleur. Son esprit, désemparé, presque noyé sous la mer de panique qui déferle dans son crâne, hurle un Pourquoi maintenant?! désespéré.
Elle ne voit pas les scènes se dérouler devant ses yeux comme le décrivent ses romans, mais de minuscules détails, d'étouffantes impressions, lui reviennent en tête et montent graduellement en puissance.
Elle est seule. Si seule.
Des regards. Moqueurs. Blessants.
Des rires. Qu'elle tente d'oublier.
Son roman. Dans lequel elle se réfugie.
Sa solitude. Qui pèse sur ses frêles épaules de petite fille.
Son sac, trop grand et trop lourd pour elle, comme sa peine.
Ça va grande soeur? Elle acquiesce en silence.
Sur sa peau, de minuscules entailles invisibles.
Elle ne veut plus écrire. L'Oiseau a perdu ses ailes.
Elle se sent seule. Si seule.
Elle doit brutalement oublier ses rêves de petites fille. C'est si dur.
Si douloureux.
Elle fait des erreurs. Tant d'erreurs.
Elle n'aime pas le comportement de son "amie". Mais elle n'est plus seule. Ou presque.
Des phrases, des mots, des histoires, des échappatoires. Des rêves dans son cauchemar.
Le regard désolé et moqueur de son amie de primaire.
Le regard dégoûté et dédaigneux de son amie d'enfance.
Les regards dégoulinants de pitié ou de méchancetés des autres. De ceux qui la juge sur ses pantalons de velour et sur ses tee shirts ridicules. De ceux qui forgent doucement son hyper sensibilité handicapante. De ceux qui la détruisent lentement.
Une main tendue vers elle. Plusieurs qui rejoignent la première.
Quelques mois de joie.
Le retour de l'écriture dans sa vie.
Un été.
Une rentrée.
Et quelques mains se retirent. Elle n'est plus vraiment seule mais ça fait mal. Si mal.
Un nouvel été.
Une nouvelle rentrée.
Et toujours ce poids sur ses épaules. Ces regards qu'elle capte sans le vouloir.
Ce qui doucement risque de la faire craquer.
Elle a un joli sourire.
Un si joli sourire.
Le théâtre l'aide un peu c'est vrai, mais son sourire est si beau, si beau.
Et puis, il ne reste que quelques mois pourtant. Que quelques mois avant un nouvel été. Une nouvelle rentrée.
Mais elle ne tient plus.
Et elle craque.
Et elle pleure.
Et sa façade s'écroule.
Et ses faiblesses sont visibles.
Et les regards pèsent sur elle.
Et les regards...
Les regards...
Les regards sont si lourds. Si pesants... Si horribles.
Alors elle rabat ses cheveux et elle pleure de plus belle.
Rien ne va plus.
Tout s'écroule.
Elle n'arrive plus à s'arrêter de pleurer.
À s'arrêter d'être triste.
Elle ne rend plus les papiers, les devoirs, les écrits. Elle ne sait plus. Tout est embrouillé.
Et elle a mal. Et elle ne sait pas vraiment pourquoi.
Et elle souffre en hurlant sa peine au monde. En explosant. Et elle sait qu'elle fait du mal à ses amies. Et elle s'en veux.
Mais elle a mal et elle ne sait même pas pourquoi.- Julie? Julie qu'est ce qu'il y a?
La jeune-fille halète. Elle vient seulement de se rendre compte de la main que son amie a posé sur son dos. Elle vient seulement de se rendre compte de la larme qui roule sur sa joue. Combien de temps s'est écoulé? Une seconde? Une minute?
Et elle n'arrive qu'à murmurer, la voix plein d'amertume et de ressentiment:
- Pourquoi maintenant bordel?
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Pluie de Larmes
RandomParce que parfois des larmes tachent mes textes. Et que les bavures qu'elles étalent ne sont pas si laides au final. Parce que parfois, écrire ne sert qu'à se vider d'un trop plein de noirceur, même si ce n'est pas sa propre histoire qu'on exprime...