Chapitre 4

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Louann : 

Pour une fois, on arrive à l'heure au rendez-vous des classes. C'est notre famille d'accueil qui nous y a conduit. Ça fait tellement étrange de conduire à droite ! Pour cette journée de tourisme, j'ai opté pour un simple T-shirt et un jean noir. Aussitôt arrivée sur la place, je laisse mes amies s'émerveiller devant la vitrine d'un magasin à quelques mètres et cherche Maël du regard.

Je le vois un peu à l'écart d'Arthur, Thomas et Eimen qui gesticule sans qu'on sache pourquoi. Ses écouteurs vissés (pour ne pas dire collés) sur ses oreilles, il est adossé à un poteau le regard perdu dans le vague. Maël regarde toujours dans le vague. Ses yeux sont toujours perdus au loin comme s'ils cherchaient à voir l'invoyable. Le bleu de ses iris se confond avec le ciel ce qui lui donne un air encore plus rêveur. Il  a mit sa veste en cuir avec un jean et des baskets. Tout comme moi, il a préféré mettre des vêtements confortables.Je m'approche de lui discrètement tandis qu'il passe la main dans ses cheveux bruns d'un air pensif.

-Salut ! je m'exclame, je te fais la bise ?

Surpris, il se débat en riant.

- Oh non pitié, vous les filles et votre bise de...

A cet instant, Eimen, un brun bouclé au teint mat rejoint notre "combat", suivi d'Arthur, de Dylan de Noémie et de Léo, un type pas très grand, certe, mais très vif et qui parle toujours très fort. Bientôt toute la 4è 3 se bagarre tandis que les autres classes nous regardent hébétées. Je rigole tellement que j'en oublie mon anxiété de la veille. Mme Kagny intervient alors que Léo est juché sur les épaules d'Arthur pour mieux taper Eimen et Soen qui se liguent contre Mathilde, Noémie.

- C'est pas vrai, la 4è 3 vous allez me rendre folle ! Calmez-vous tout de suite ! Léo, lâche-le maintenant !

- Arrêtez de faire n'importe quoi, à cause de vous on va partir en retard pour la visite de Madame Tussauds, renchérit Thomas.

Tout le monde le regarde avec un rictus tordu. Quel fayot celui-là ! Notre classe enfin calmée, les professeurs font l'appel et nous montons enfin dans le car. La 4è 1 et 2 ont droit à un grand bus à cinquante place. Quant à nous, on hérite d'un véhicule de location de taille moyenne aux flancs rayés.

- Désolée les enfants, question de budget, explique Mme Kagny, on ne pouvait louer qu'un seul grand bus.

On commence la visite de Londres par le palais de Westminster, suivi de Big Ben, Buckingham Palace et enfin Mme Tussauds. J'ai déjà dépensé les trois quarts de mon argents de poche dans des souvenirs attrape-pigeons et des habits. Jo et Noémie sont dans le même cas que moi. Cette dernière laisse à présent éclater sa haine contre le monde entier devant les clones de cire de la reine Elizabeth et de Michael Jackson.

- Les anglais sont des sales arnaqueurs, non mais attend...trente-cinq livres le T-shirt Big Ben en polyester ! Faut vraiment être un gros pigeon pour se laisser berner par une escroquerie pareille !

- Dans ce cas, fait remarquer Mathilde, dois-je considérer que tu es un pigeon ?

-Non je suis une mouette, répond Noémie du tac au tac.

On éclate toutes de rire.

- Une mouette qui a sacrément faim, ajoute-t-elle.

Moi aussi j'ai faim. Les sandwiches que nous a donné la vieille dame sont absolument répugnants. En plus, la mayonnaise avait une odeur douteuse alors j'ai préféré jeûner. A côté d'Ariana Grande, j'aperçoit un distributeur de snacks et de boissons.

- Je vous prends un truc les filles ? demandé-je.

- Une eau au citron, fait Mathilde.

- Une barre s'il-te-plaît, demande Léa.

- Coca, font Jo et Noémie d'une même voix.

Je me dirige vers le distributeur et en profite pour passer aux toilettes. En sortant, les mains encore humides, je me penche pour pendre un élastique dans mon sac quand une main se pose sur mon épaule. Je reste figée sur place. 

Cette voix... je la connais. C'est impossible. Je tombe à genoux, tremblante. Le contact de la main sur mon épaule me traverse comme une décharge électrique. D'ailleurs, je ne devrais même pas dire main...plutôt, je ne sais pas, tentacule, appendice...

- Non...je souffle d'une voix rauque.

Je rassemble mes forces pour sortir de ma torpeur et me retourne. Je me retrouve nez-à-nez avec monsieur Z. 

Ma peur retombe aussitôt.

- Louann, dit-il de sa voix éraillée de fumeur, vous avez l'air souffrant.

- Non, je vais bien, merci. J'ai cru que...hum c'est sans importance.

-Allez rejoindre vos camarades, ils vous attendent.

- Oui bien sûr.

- T'étais passée où ? demande Jo.

- Nulle part. Enfin si, aux toilettes.

- C'est le sandwiche de la vieille qui passe pas, s'esclaffe finement Noémie.

Je ne veux pas leur parler de ce qu'il m'est arrivé tout-à-l'heure. Elles me poseraient trop de questions et je serai obligée de tout leur raconter depuis le début. Je n'en ai jamais parlé à personne et je n'en parlerai jamais. De toute façon personne ne me croirait.

Ce secret terrifiant.

DownstairsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant