Chapitre 7

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Maël :

Je me réveille allongé dans un lit de fer garni d'un simple matelas sans couverture. Je parviens tant bien que mal à me redresser malgré mon crâne qui semble peser une tonne. Je tourne la tête. Mon cou est douloureux et des croûtes de sang séché tombent quand je passe la main dans ma nuque.

J'analyse le lieu où je me trouve. Une salle au sol de linoléum gris et aux murs de béton brut faiblement éclairée par de LED. Je m'aperçois que tous les autres élèves de ma classe sont à mes côtés, dans des lits semblables au miens. On a prit soin de laisser mon sac à dos au pied du cadran. Mes camarades reprennent peu à peu leurs esprits. Noémie est la première levée, suivie de Louann. Elles n'ont pas l'air de comprendre plus que moi ce qu'il se passe.

Personne ne parle. On est tous trop choqués pour oser dire quoi que ce soit. Il y a une porte au fond de la salle. Julie, une petite blonde aux yeux bleus et aux yeux (habituellement) rieurs s'en approche et l'ouvre. Nous retenons tous notre souffle. Une lumière vive nous aveugle immédiatement, suivie d'un vent frais. Je m'approche pour mieux voir et manque de m'étrangler de surprise. C'est une forêt de conifères. Le soleil s'écoule entre les branches faisant fondre la  fine couche neige sur les aiguilles des sapins. Je croise le regard de mes camarades bouches-bées. D'un accord tacite, tout notre petit groupe sort chacun son tour du sombre local. 

J'entends Mathilde souffler un "c'est impossible" dans mon dos. Moi aussi j'ai du mal à y croire. Je me remets à peine de mes émotions qu'une voix venue de nulle part s'adresse à nous.

- Bien le bonjour ! Avant tout, j'espère que votre réveil s'est bien passé. Ne vous inquiétez pas je ne vous veux aucun mal.

- Qu'est-ce qu'on fait ici, où sont les profs ! s'écrie Eva, une fille pâle aux taches de rousseurs, s'adressant au ciel. Mais la Voix ne semble pas disposée à lui répondre. Elle continue comme si de rien n'était :

- Pour commencer, vous allez enfiler les vêtements sur votre droite. Il y a un vestiaire pour les filles, et un autre pour les garçons.

On tourne tous simultanément la tête. Au milieu d'une petite clairière, dans la mousse et les aiguilles de pins, deux grandes tentes sont apparues comme par magie ainsi qu'une pile de vêtements devant chacune d'elles. 

- Il y a des étiquettes portants votre numéro sur vos habits et vos chaussures respectifs, poursuit la Voix, vous trouverez votre numéro tatoué sur votre poignet droit.

Je consulte mon avant-bras d'un coup d'œil. Je suis le numéro M1. Je n'avais même pas remarqué qu'on m'avait tatoué. Le plus effrayant c'est qu'on a rajouté en dessous à l'encre rouge sang  /!\ Incontrôlable | AB-. J'ignore totalement ce que ça veut direAlors que tout le monde a pris connaissance de son numéro, la voix lance :

- Alors qu'attendez-vous ? Allez vous changer ! Vous ne vous en sortirez jamais en jean !

Louann murmure à Jo " J'y comprends rien !". On se regarde perplexe. Le fait qu'on ne s'en "sortira pas" n'est pas du tout rassurant. C'est déjà étrange de se retrouver dans la forêt d'un lieu inconnu en plein voyage scolaire après avoir été drogué. Quelques élèves se dirigent en tremblant devant les tentes. Mais d'autres, dont Louann et moi restent immobiles.

- Allez vous changer, fait la Voix d'un ton beaucoup moins enjoué.

- Sinon quoi ? lance Thomas.

- Qu'est-ce qu'il nous arrive ?

- Je veux voir un prof !

- Vous n'avez pas à nous donner d'ordre !

Je n'ai pas le temps de comprendre ce qu'il se passe que tous les "rebelles" tombent à genoux en hurlant de douleur. Je vois Eimen se tenir le crâne à deux main en répétant en boucle "pitié, pitié".  Arthur est prostré au sol, les larmes aux yeux. Tous sont en proie à une sorte de tortionnaire invisible. Tous sauf moi. Je commence à comprendre la signification du terme "incontrôlable" sur mon tatouage.

- Le M1, profite de ton avantage, dit la Voix comme si elle avait lu dans mes pensées, ça ne durera pas. Et si tu tentes de jouer au plus malin avec moi, sache que je peux tuer tous tes camarades en clin d'œil.

Le calvaire de mes amis s'arrête instantanément. Ils se relèvent péniblement, se regardant avec effroi. Je m'aperçois que j'ai retenu mon souffle durant leur supplice. Je cours auprès de Louann qui s'est mordu tellement fort que sa lèvre inférieure saigne abondamment.

- Je suis navré que nous partions de si mauvais pied, reprend la Voix, mais comprenez bien à présent que vous devez m'obéir.

Nous nous dirigeons à contrecœur vers les tentes. J'enfile la tenue imposée de plus en plus perplexe et inquiet. Un T-shirt noir portant notre numéro, un pantalon de treillis, une paire de rangers et un coupe vent qui préserve la chaleur corporelle. Merde, qu'est-ce que ces inconnus  nous veulent à la fin ! J'adresse pourtant un sourire rassurant à Soen dont le teint a pris une couleur vert olive. Nous sortons de la tente. Les filles ont eu sensiblement les mêmes tenues que nous, si ce n'est qu'elles portent des débardeurs moulants en tissus synthétique à la place de nos T-shirts.

- Bien maintenant que vous êtes fin prêts je vais vous expliquer les règles de notre jeu.

- De notre "jeu" ? s'étonne Colline, une grande blonde au look très féminin.

- La règle est simple : vous êtes actuellement au sommet d'un immeuble de vingt étages. Votre objectif est de redescendre jusqu'au rez-de-chaussée. Pour cela, vous traverserez chaque étage afin de trouver les portes ayant le logo "sortie de secours" qui vous mèneront à des escaliers. Et ce ainsi de suite jusqu'en bas.

- Attendez, je coupe, il est où l'immeuble ?

- Vous y êtes, fait la voix d'un ton malicieux,  observez bien.


Ce qu'il arrive alors est totalement incroyable.





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