Chapitre 10

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Louann :

Un vent frais me tire de mon sommeil. J'essaie de me relever pour masser mon cou douloureux. Je me rends compte que je suis sur le dos de Jo. Elle souffle avec ardeur bien que chaque pas lui semble un enfer. Encore légèrement cotonneuse, je regarde le monde autour de moi. Mes camarades marchent à mes côtés. J'en vois quelques uns avec des légères égratignures sur les jambes. J'ouvre complètement les yeux et constate que la lumière orangée du crépuscule commence déjà à éclairer les sapins. Les autres sont en sueur malgré la température fraîche. Certains garçons ont retiré leurs larges pantalons de treillis au détriment de la pudeur qu'on a généralement en "civilisation". 

- Vous devriez vous couvrir, dis-je, la température chute la nuit.

-Enfin réveillé ? répond Mathilde en gloussant.

Notre petit groupe s'arrête. Jo, en nage, me pose sur l'herbe humide. Mes camarades à bout de souffle s'écroulent à mes côtés en s'épongeant le front.

-Combien de temps j'ai dormi ?

- Au moins neuf heures, fait Mathilde en observant le soleil.

-Neuf heures?! Tu m'as porté tout ce temps? 

-Non et heureusement, tu es plus lourde que je le pensais ! Tout le monde t'a porté à tour de rôle, dit Jo en rigolant. Tu n'as pas mal à ta cheville ?

Instinctivement, je baisse les yeux vers mon pied droit. Il a pris une teinte violette et est tout enflé. Quelqu'un a enroulé un vieux T-shirt autour. J'essaie de bouger les orteils pour voir. J'ai mal, mais la douleur est supportable.

Enora, une petite blonde portant des lunettes s'approche de moi et sors de son sac une trousse transparente remplie de matériel médical.

- J'ai trouvé ça dans le tas de victuailles, m'explique-t-elle pour répondre à mon regard interrogateur, je peux ? fait-elle en amorçant le dénouement de mon bandage de fortune.

- Eh bien, je ne suis pas vraiment sûre que...

- J'ai eu mon brevet de secourisme l'été dernier et, sans me vanter je n'étais pas mauvaise. Je vais voir si je peux faire quelque chose.

- Et sinon ?

Instinctivement, Enora, tous les élèves qui suivaient la conversation et moi-même levons la tête vers le ciel. Tentant vainement d'apercevoir une preuve existentielle de la Voix. Nous aidera-t-elle si on est gravement blessé ? J'en doute. Enora défait délicatement mon bandage et tourne doucement mon pied.

- Bon, heureusement pour nous ce n'est pas déplacé, elle se tourne vers Constance assise pas loin. Tu pourrais me trouver deux branche assez épaisses et les plus droites possible ? Je vais fabriquer une attelle. Eimen, j'aurais besoin de ficelle.

- Pas de problème.  

Pendant ce temps-là, Enora, telle une vraie infirmière applique une fine couche d'arnica sur mon front.

- Désolée, je n'en mets pas beaucoup mais j'essaye de l'économiser. On a qu'un seul tube pour trente et une personne.

Constance reviens un petit fagot de bois sur les bras. Notre infirmière improvisée en choisit deux et se met immédiatement au travail.

- Alors, je lance à Jo, pourquoi suis-je tombée, ou plutôt comment suis-je tombée ?

- On marchait depuis une vingtaine de minutes quand tu as fais un malaise. Je suppose à cause du stress ou de la fatigue. Tu es tombée comme une pierre, en plein au milieu du sentier. Ca aurait été très drôle si on avait pas entendu cet horrible craquement qu'a fait ton os. On a essayé de te réveiller, sans succès. Tu nous a fait une de ces peurs ! J'ai cru un moment que tu étais...morte.

DownstairsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant