Le procès ( deuxième partie)

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Le témoignage de Nadia finit par m'achever.

J'ai vraiment des collègues en or.

Terriblement gêné, pas une seule fois je n'ai osé la regarder pendant qu'elle parlait. Et pourtant, comme Yann, elle est sans doute en train de me sauver la mise.

Dire qu'elle aussi elle en a vu de toutes les couleurs avec moi. Et pourtant, elle ne m'a pas laissé tomber.

Je regarde discrètement vers le président et ses deux juges et je remarque que leur attitude a changé. Ils ne sont pas bêtes, ils savent que l'un des témoins a menti. Le portrait que Nadia fait de moi est à l'opposé complet de celui qu'a fait le père de Vicky.

La phase d'instruction étant terminée, le président du Tribunal indique que nous allons débuter les débats.

Les avocats de la famille Tarranne sont les premiers à s'exprimer. Comme je m'y attendais, ils demandent au nom de leurs clients réparation pour le préjudice immense que j'ai causé à leur famille. Ils insistent sur le fait que ma qualité de médecin constitue une circonstance aggravante et ils demandent qu'en conséquence je sois rayé de l'ordre des médecins en raison des manquements graves dont j'ai fait preuve vis-à-vis de Victoria.

Ils concluent par une phrase qui me dégoûte totalement :

- Le chagrin de la famille Tarranne est immense et ils ne souhaitent pas que d'autres familles vivent cette douloureuse épreuve. Leur peine pourrait être légèrement adoucie si la Justice prend la décision la plus appropriée au sujet de l'homme qui a causé le décès de Victoria.

Je secoue la tête, dépité, écœuré par ce que j'entends. J'ai pleuré autant qu'eux la disparition de Vicky. Ils n'imaginent même pas ce qu'a été mon calvaire durant ces six dernières années.

C'est au tour du procureur de la République de prendre la parole. Son réquisitoire n'est que consultatif, le tribunal n'est pas obligé de le suivre. Philippe m'a expliqué que, le plus souvent, les réquisitions du parquet sont plus sévères que la peine finalement prononcée.

Cela voudrait dire que le procureur pourrait demander à ce que je sois inculpé pour homicide volontaire ou même meurtre.

Mais il peut aussi arriver que la peine prononcée soit plus importante que la peine demandée par le ministère public. Dans ce cas, ce serait l'inverse. Le tribunal irait plus loin que l'homicide involontaire si c'est ce qui ressort du réquisitoire du procureur.

Mon avocat m'avait également indiqué que ce dernier pouvait également requérir la relaxe ou l'acquittement.

Mais ça, naturellement, je n'y crois pas.

Et pourtant...tandis que j'écoute attentivement le réquisitoire, je commence à comprendre que quelque chose cloche.

Les avocats de la famille Tarranne semblent furieux et Alain les regarde avec une certaine incompréhension dans les yeux.

Je manque de m'évanouir lorsque j'entends le procureur qui demande mon acquittement pur et simple en insistant sur le fait que je n'étais pas gynécologue et que je n'avais pas à domicile le matériel permettant d'établir un diagnostic de GEU. Il passe en revue les conclusions des experts désignés lors de la première enquête et il indique qu'à son sens, elles sont parfaitement valables.

Je me tourne vers Yann et Nadia qui peuvent suivre la suite des débats dans la salle et mon interne me fait un discret signe d'encouragement.

Je regarde ensuite Philippe qui est toujours concentré sur le réquisitoire du procureur et je retiens ensuite mon souffle lorsqu'il prend enfin la parole.

L'inconnue des UrgencesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant