Déçue

79 3 3
                                    


     Je suis assise à la terrasse du bar L'alcool doux, le temps est doux et le soleil rassurant. Je passe ma main dans mes bouclent libres tandis que je sirote mon jus d'orange avec le nazi et Angel. Un goût aigre s'insinue entre mes lèvres et me fait grimacer. Il faut que vous changiez votre fournisseur de jus. Puis les images des soirées passées ici s'infiltrent dans mon esprit. Je passe ma langue sur ma bouche. Par contre, votre get est excellent. Je remue, et m'installe en tailleur, les arêtes du bois s'enfoncent dans ma peau. Et vos chaises aussi, faudrait les renouveler. Les lattes en bois c'est cool, mais pas sous un postérieur. 

Je dévie mon regard vers mes amis, une expression étrange, incrustée sur leur visage, qui ne leur sied pas bien. Ils sont maussades ? Je les observe curieuse, l'un à l'air anxieux, et l'autre dépité. Ils sont courbés au dessus de leur boisson et ne disent mots. Le silence est pesant. Mais il vous arrive quoi ? C'est moi qui tire une tête de quatre kilomètres de long habituellement, ne me piquez pas mon rôle. Je cherche quelque chose à dire en triturant l'une de mes boucles. Rien. Tu es vraiment pas douée Aléa. 

J'ouvre la bouche. Angel se lève et s'en va, me laissant seule avec Awen. Quoi ? C'est quoi ton problème ? L'incompréhension soudaine laisse place à la colère. Je déteste être laissée en plan. Je bouillonne. Si je n'appréciais pas un minimum le blond, je le laisserai à son tour pour suivre mon soi-disant meilleur ami. J'espère pour toi que tu as une bonne raison. Je recrache la gorgée de ma boisson immonde, c'est vrai sa mère est à l'hôpital. Comment ai-je pu oublier ça ? Je passe ma main sur mon front pour vérifier ma température dans un élan désespéré. On peut trouver mieux comme meilleure amie, sûrement. Zut. Je m'en veux. Prise de culpabilité, je le suis du regard jusqu'à ce qu'il tourne dans une rue adjacente. 

Je me concentre alors sur le nazi. Son visage est fermé, tendu à l'extrême, on croirait que l'on vient d'égorger sa mère. Je tente de sonder ses yeux bleus, comme le ciel. Il murmure. Il ne s'en rend pas compte, je crois.

- Désolé, tu m'en voudras sûrement. 

Je me penche sur la petite table pour croiser son regard. Heureusement que je n'ai pas un décolleté, sinon, ce serait porte ouverte. Il se masse l'arrière du crâne, gêné. C'est quoi le délire ? Mon visage est froid, sûrement, comme à chaque fois que je ne comprends pas, ou bien, que je me sens exclue. À cet instant mon ressenti est un mixte entre les deux. 

Il tente de me sourire, je le sens, mais sa bouche s'étire en un rictus hideux. Une vague de colère me submerge. Il refuse de me parler. Je repousse le bout de bois inconfortable sur lequel je suis assise. Ok. C'est bon, j'ai ma dose. Je me casse. Je lève les bras vers l'étendue bleue, exaspérée. Je le laisse seul avec sa bière pour seule compagne. Une envie violente de l'insulter s'empare de mon ça. Non mais qu'est ce qui lui prend ? Autant, Angel je peux comprendre, mais toi Awen, tu te moques de moi.  Je ne mérite pas de supporter ta mauvaise humeur. Je t'expose pas la mienne, alors, j'estime que tu dois faire pareil. Ou alors, tu m'expliques, tu ne te comportes pas en abruti dépressif. Je marche vite. Je pense de manière exécrable, d'une manière qu'habituellement je réprime sur les autres. Je me fais honte, mon estomac se serre. Il faut que j'évacue ma colère. Je fuis le nazi.


     Je me concentre sur mes pas, trop dynamique, trop tendue pour paraitre sereine aux yeux des gens. Je m'assieds sous un chêne et sors mon carnet. Mes dessins défilent, certains sont potables, d'autres moins. Je griffonne sur le papier blanc. Mes personnages sont étrangement souriants. Awen, qu'est ce qui t'arrive ? Attends Aléa, tu veux pas t'excuser non plus ? Je grogne. Et puis zut. La culpabilité revient plus forte encore. J'envoie un message à celui qui occupe mes pensées. Il est chez Adrien. Okay. J'arrive les loulous, je vais vous dérider, ça va être du vite fait. Tu dois être à moitié bipolaire Aléa. Je ricane. Je range mes affaires et quitte le vieil arbre. Je reviendrai.


      45 minutes de marche. Ils ont intérêt à être toujours là, sinon je les enterre vivants. Vous êtes prévenus les gars. Dans le halle m'attend une mauvaise  nouvelle : pas d'ascenseur non plus. C'est une malédiction ? Je souris en repensant à ma soirée chez Violette. Je grimpe les marches 3 par 3 jusqu'au 5ème étage, pestant contre mon pantalon mal taillé qui serre trop mes genoux. Il ne faut pas être bourré, c'est raide comme ascension. Je me stoppe. Des éclats de voix. Le nazi ? M. Regard sombre ?

- Mais, je n'ai pas le choix ! Je parie sur le blond, sa voix est plus cristalline que celle de l'autre. Gagné, tu es trop forte Aléa. J'entre sans frapper, au vu du vacarme, il ne m'entendront pas de toute manière. Je me poste au milieu du salon du métisse, souriante. Un silence de plomb tombe. Un malaise me prend doublé d'une vilaine impression qui me tord le ventre. Le brun me jète un regard désabusé et l'autre presque apeuré. Heu... Bonjour ? Non, même pas. Adrien croise les bras sur son torse. Je danse d'un pied sur l'autre embarrassée. Dites quelque chose, je sais pas, n'importe quoi. Je me dandine un peu plus passant ma main sur ma nuque. Je baisse la tête, fixant la moquette grise.

- Comme une gamine, tu débarques quand il faut pas. Adrien me balance ça, froid et indéchiffrable. Sa phrase me blesse et je sens les larmes monter. Ma respiration s'accélère. Je suis désolée. Mon assurance se brise. Je suffoque. Sans attendre d'autres paroles je sors de la pièce étouffante. Je dévale les escaliers en courant, manquant de finir sur les fesses plus d'une fois. Je réprime mes pleures qui menacent d'un mouvement rageux. Mais qu'est ce que je vous ai fait ? Une boule se forme dans ma gorge. Je veux crier. Dans la rue, j'entends les gens chuchoter sur mon passage. Quoi ? Retournez vous occuper de votre vie monotone, bien rangée et laissez moi. 

     Je plonge sur mon lit, épuisée. Je ne retiens plus mes larmes. Vous êtes tous des idiots !

Déception.

~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~

Il y'a très peu de dialogue dans ce chapitre, mais j'espère que ça vous plaît tout de même. ^.^

Petits aléasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant