La bibliothèque

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Outch.

     Ça fait mal. Je frotte ma tignasse brune énergiquement. Qui est le débile qui ne regarde pas où il met les pieds ? C'est peut-être bien moi. Je souffle. Aléa on ne fera jamais rien de toi. Tu n'es pas possible. Je lève la tête. Un torse? Je lève un peu plus les yeux, ma nuque se crispe. C'est inhumain d'être aussi grand. Ho !  Le nazi de l'autre jour. Comment il s'appelle déjà ? Ses orbes clairs s'illuminent d'une lueur furtive. Il me reconnaît, je crois.

- Ho la fille qui n'a jamais eu de copain ! Aléa ! C'est ça ? un sourire étire ses lèvres fines bien dessinées. Plutôt canon. Dommage qu'il ne retienne que le fait que je ne sois jamais sortie avec qui que ce soit. 

Merci Angel... Tu me le paieras, c'est une promesse. Et si je remplaçais son rhum par de l'eau ? Bonne idée. Je ferai ça. Je m'imagine sa tête outrée, s'en pourprant de colère. Je jubile, déjà. Je réprime un rire sadique. Pas en public Aléa.

Zut, le nazi. Je l'avais oublié. Gênée, je tente de lui sourire.

- Oui c'est moi. Par contre, toi, comment tu t'appelles ? je vois un peu déception dans son regard. Il faut vraiment que je fasse un effort pour me souvenir des prénoms.

- Awen. Faut que j'y aille, je suis en retard. Et sur cette réponse gelée il s'enfuit laissant derrière lui un parfum bien masculin. Je fronce les sourcils. C'est pas gagné avec lui. Je reste quelques secondes à observer sa démarche, elle n'est pas aussi assurée que ce que j'avais imaginé. Un manque de confiance chez lui ? Étonnant. Je me détourne, je sens des regards peser sur moi. Je déteste ça. Il n'y a rien de mal à analyser, si ?

Je continue mon chemin vers la bibliothèque, mon endroit préféré du campus. Un lieu rustique, au parquet daté qui grince, une pièce lumineuse, où s'entasse des centaines de livres, romans, revues, journaux de tout types, sur de vieilles étagères en bois. Une grande table en chêne massif au centre, toujours occupée par une dizaine d'élèves studieux. Je ne m'y assieds jamais. La populace et moi, ça ne fait rarement bon ménage. Mais, il y'a un fauteuil défraichi, rouge au style baroque, dans un coin. C'est là que je vais. Toujours. Personne n'y vient, jamais.


     Je pousse les lourdes portes de mon sanctuaire. Wouah. Il faudrait penser à aérer, ou bien, la population devrait réfléchir à prendre une douche de temps à autres, ça épargnerait ce genre de désagrément à mon nez fragile. 

Je me dirige vers l'une des nombreuses fenêtres, en ouvre une. J'inspire l'air frais du printemps. C'est agréable, doux. Les boutons des fleurs apparaissent çà et là. Je souris. J'aime les changements de saison.

Derrière moi, j'entends quelqu'un se plaindre. Le calme laisse place à la colère. Je réprime un rictus, et me tourne vers l'élève, un sourire hypocrite sur le visage. Tu ne vas pas être déçu toi.

- Si toi et tes camarades, vous puiez moins je ne serais pas obligée d'ouvrir cette foutue fenêtre.

Il râle, fait de grands gestes inutiles, mais je n'y prête aucune attention. Mon regard est attiré par une paire d'yeux malicieux.

- Mais vas-tu te taire ? Je lance un regard assassin, exaspérée, à celui qui m'importune. Il s'en va, la mâchoire crispée, vexé. Bien fait. Et n'oublie pas, les douches ne sont pas en option !

Je me concentre de nouveau vers les deux orbes noires. Disparues. À la place, le garçon aux doc Martens hilare. Il s'approche de moi. Aujourd'hui, il ne porte pas un t-shirt blanc, mais, un de couleur ciel, et, autour de son cou un médaillon.

- Sacré caractère la gamine. Il m'adresse une mine satisfaite. D'où sort-il, lui ? Je croise les bras sur moi poitrine. Je ne sais pas pourquoi, mais je resens le besoin de me protéger. Il a l'air pourtant inoffensif. N'importe quoi ma fille, tu délires. Mes yeux toujours absorbés par les siens. Ils m'intriguent. Il rentre ses mains dans les poches de son jeans noir et me laisse plantée, là, abasourdie.

Je n'ai jamais vu des yeux aussi sombre. Ils sont envoûtants. Des puits sans fond, aux lueurs indéchiffrables. Sérieusement, il porte des lentilles? Je lui demanderai la prochaine fois.


     Je peux, enfin, m'asseoir dans mon fauteuil. J'ouvre un livre. Kant, "Critique de la raison pure". Un sourire se dessine sur mes lèvres. Prof de philo, petite pensée pour vous. J'essaie de me concentrer mais, les mots, les phrases défilent sans que j'en saisisse le sens. Non pas que ce soit trop compliqué. Non. J'ai été trop bien entraînée au lycée. Seulement, je n'arrête pas de penser à cette soirée chez Angel. J'aimerai les revoir. Tous. Le couple, Jeanne, le nazi Awen et monsieur regard sombre. 

Oui, j'en parlerai avec cet ivrogne de meilleur ami.  

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Voilà la suite. Faut croire que je suis plutôt inspirée. N'hésitez à me laisser un commentaire. Positif ou négatif. Je suis preneuse. ^.^

Petits aléasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant