Chapitre 15: Un passé dur

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- La maison n'est plus très loin ! Lui dis-je
Ben se contenta du silence pour me répondre. Il est anxieux, il répète sans cesse qu'il a une mauvaise intuition.
- Je suis sûre que tout va bien se passer Ben !
Je tente de le rassurer mais en vain.
- Tu ne peux pas en être sûre Alice !
- Je sais bien ...
Il se retourne vers moi et m'embrasse. Je le laisse faire persuadée que c'est le seul moyen de le calmer. Cela me rappelle la première fois qu'il l'a fait.

"- Tu te souviens des nuits interminables que tu passais enfermée dans la cave, la peur de ce qu'il te ferrait chaque fois qu'il descendait te voir, il faisait ça parce que tu as tué ton frère !
Je répétais en chuchotant "je ne l'ai pas tué, je ne l'ai pas tué, ..." tandis que la voix me disait le contraire.
On a tenté de s'échapper, profitant d'un moment de faiblesse de l'homme et de ces deux "soldats", c'est ainsi qu'ils les appelaient. Notre tentative d'évasion a échoué.
"Ses soldats" m'ont enfermés dans une petite pièce isolée.
L'homme a dit que nous allions souffrir pour ce que nous avions fait.

Depuis maintenant une heure, l'homme tente de me détruire en me parlant de mon passé:
- Ton frère est mort parce que tu ne voulais pas laisser ta poupée dans les flammes !
J'essaie de me persuader de ne pas craquer. Il ne faut pas que je lui laisse cette joie mais c'est tellement dur.
- Je n'avais que 4 ans ! Je ne l'ai pas tué ce n'est pas vrai !
- Oh tiens, qui voilà ? C'est le jeune Mathieu. Qu'est ce que je peux lui faire à lui ? Tu n'as pas une idée Alice, toi qui est si intelligente ?
Je pouvais entendre la voix de Mathieu derrière l'homme. Je pense qu'il se débattait, enfin c'était ce que les bruits laissaient comprendre.

Deux heures passèrent, lentement. L'homme me parlait toujours, il se répétait. Derrière sa voix je pouvais percevoir les cris de Mathieu. Des cris de douleur.
J'étais complètement abattue. Et même si je refusais de l'admettre, il avait gagné.
L'homme arrêta soudainement de parler. Et dans la seconde qui suivit, la porte en face de moi, la seule issue possible de cette pièce, s'ouvrit.
Deux hommes me prennèrent par les bras et me forcèrent à me lever et à avancer.
Il me ramenèrent jusque la grande pièce.
Arrivés à cette dernière, ils me jetèrent.
Benjamin était là lui aussi et sa présence me rassurait.
Il courut vers moi et me prit dans ses bras.
- Comment tu vas ? Qu'est ce qu'ils t'on fait ? Dis moi qu'ils ne t'ont rien fait s'il te plaît !
Ben était inquiet et le fait que je ne lui réponde pas ne le rassure pas !
- Dis moi juste si tu vas bien, Alice ?
J'étais trop perturbée pour répondre et tout ce que l'homme m'avait dit me remonta en tête. Et les larmes coulèrent.
- Je ne l'ai pas tué !
- Tué qui Alice ?
- Je ne l'ai pas tué c'est pas vrai !
- Mais qu'est-ce qu'il t'a fait Alice ?
A chaque question, je répétais la même phrase. En fait, je n'écoutais même pas ses questions.
Il me sembla qu'il me serra dans ses bras. Je pu sentir son coeur battre à vitesse anormalement rapide. L'angoisse peut être lui provoquait cela.
Je lâchai dans un élan de courage après dix minutes de silence:
- Il est mort à cause de l'incendie pas à cause de moi !
Après ces mots, j'eus du mal à respirer. Ben me disais de me calmer mais c'était impossible.
Un contact sur mes lèvres bloqua ma respiration pendant quelques secondes.
Puis celle-ci redevint fluide.
Mon premier réflexe fut de lever les yeux vers Benjamin. Et à ce moment là je compris ce qu'il c'était passé.
- Ça va mieux ? Tu veux parler ?
Il m'aida à me relever. On se dirigea vers les matelas.

J'étais assise sur le matelas de Ben à côté de lui. Il posa sa main sur la mienne puis je commençai mon récit en prenant une bonne inspiration. Les premières larmes coulèrent avant même que j'ai commencé.
- J'avais 4 ans quand ma maison a pris feu, mes parents sont sortis à temps, moi j'étais montée dans ma chambre pour récupérer ma poupée au lieu de sortir, mon grand frère est venu me chercher, mais au moment où on allait repartir le feu s'était propagé dans les escaliers, il n'y avait aucun moyen de sortir, alors il s'est assis dans un coin a pris une écharpe qui traînait et l'a mis sur ma bouche. Les pompiers sont arrivés peu après, mon frère est mort à l'hôpital et moi j'ai survécu grâce à lui.
- L'incendie était dû à quoi ?
- D'après la police c'est un incendie volontaire mais ils n'ont jamais trouvé le coupable.
Je fis une pause pour sécher mes larmes trop abondantes pour continuer. Il m'a fallut quelques minutes, mais je repris quand même:
- La mort de mon frère a détruit mon père. Il m'en voulait, il remettait toujours la faute sur moi. Il rentrait ivre pratiquement tous les soirs. Un jour il m'a enfermée dans la cave, il m'a laissée dedans pendant quelques heures...
- Ta mère n'a rien dit ?
- Elle était partie une semaine aux États-Unis avec une amie.
- Ton père revenait te voir ?
- Oui, régulièrement, et ...
Je ne finis pas ma phrase mais je soulevai mon tee-shirt. Les cicatrices dans le bas de mon dos furent une réponse suffisante. Ben comprit tout de suite.
- Qu'est ce qu'il te fesait ?
- Il s'asseyait devant moi, buvait ses bouteilles de bière et chaque fois qu'il en finissait une, il la jetait sur moi. Parfois il ramassait les bouts de verre et les passait le long de mon dos une première fois doucement mais une deuxième fois en appuyant fort.
Voyant mes larmes qui ne finissaient jamais de couler, Ben me proposa d'arrêter."

- Alice ? Allô la lune ici la terre !
- Désolée, je repensais à la première fois où tu m'a embrassée !
La première fois, il m'a embrassée pour me calmer et cette fois c'est pour le calmer lui.
- Ce sont des bons comme des mauvais souvenirs ! Me dit Ben
- Je sais ! Lui répondis-je en baissant la tête.
Ben ne laisse pas un silence trop pesant s'installer, il change de sujet:
- Ça va ton épaule ?
- Pas tellement ! J'ai mal et je me sens fatiguée.
- Tu veux que l'on fasse une pause ?
- Je ne sais pas trop, peut être !
- Ce n'est pas une réponse !
Il s'arrête et il me fait signe de m'asseoir, ordre que j'exécute aussitôt.
- Fais moi voir ta blessure.
- Tu vas vraiment jouer les médecins ? Toi qui ne sais même pas où est le tibia.
Nous rigolons de bon coeur, cela fait du bien.
- Ça arrive de se tromper !
Il essaie de me contredire alors qu'il sait pertinemment que j'ai raison. Un jour, il m'a dit qu'il s'était cassé le tibia alors que c'était le radius (un os de l'avant-bras).
Benjamin lâche un cris de surprise à la vue de ma blessure. Je le regarde étrangement et lui demande:
- C'est si horrible que ça ?
- Pire que ce que tu imagines !
- C'est possible ?
- Apparemment oui.
Il arrache un autre bout de son tee-shirt pour le mettre sur ma blessure et changer l'autre trop imprégné de sang. Ben ne sait absolument pas bander mais je garde le secret pour ne pas le vexer.
- Tu vas finir par te retrouver nu !
- Je parie que cela ne te déplairait pas !
Il me dit cela avec un grand sourire comme si c'était normal. Je rougis à la suite de sa réponse extrêmement gênante.
- Il faut repartir, me dit-il, la pause est terminée !

Après une bonne demi-heure de marche, nous sommes arrivés à la maison. Je fais un pas mais Ben m'arrête.
- Sois prudente !
- Je suis toujours prudente, tu me connais !
- Justement !
Ben me prend la main, peu rassuré, toujours avec son intuition.
Je suis sur le point d'ouvrir la porte mais des voix inconnues se font entendre de l'intérieur de la maison. On aurait dit une voix d'adulte, une voix de femme. A bien réfléchir elle ressemble fort à la voix de la femme qui a tué Lina.

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⏰ Dernière mise à jour : Jun 10, 2017 ⏰

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