Liù, esclave impériale

L'incendie

Je trouvais les couloirs déserts. Une clameur s'élevait de la ville. J'aperçus par-delà les jardins le rougeoiement de brasiers dans la nuit. Plus proches, des cris, un vacarme indescriptible semblaient provenir du Palais de l'Est. Une fumée âcre s'élevait dans le ciel.

Où restait Calaf ? Taïzu l'avait-il volontairement éloigné aux avant-gardes pour qu'il protège le peuple plutôt que sa propre famille ? Je redoublai l'allure.

Les jardins résonnaient de plaintes et du tumulte des combats. L'odeur de brûlé me piquait la gorge. Je traversai des salons silencieux. Personne non plus dans la chambre royale. Je repensai soudain au pavillon de prières où mon Maître passait de longues heures, juste à côté de la bibliothèque. Demi-tour.

Aux abords de mon dortoir, j'entendis des pieds nus courir sur les mosaïques. Quelqu'un venait à ma rencontre. J'allais me cacher derrière une tenture quand je reconnus la silhouette fuselée de la pouliche tartare. Elle tituba vers moi, hagarde, hébétée, le visage baigné de larmes.

— Ping. Ils l'ont tué !

Je l'étreignis brièvement, avant de la laisser à son chagrin. Je devais retrouver mon maître.

Je me précipitai de plus belle. Quelques mètres seulement me séparaient de la pagode. Un hurlement déchira la nuit. Taïzu !

Affolée, je franchis le seuil et surgis devant l'autel. Deux hommes caparaçonnés et armés de torches me considérèrent avec mépris tandis que je me précipitai sur mon roi. Il gisait à genoux, le visage caché dans ses mains. Je l'entourai de mes bras.

— Votre Altesse ?

— Liù, sauve-toi. Ils m'ont brûlé les yeux.

Les soldats me saisirent à l'épaule. Ils me relevèrent de force. Je ne comprenais pas leur langue mais l'expression de leur visage ne laissait aucun doute. La soie de mon hanfu se déchira laissant mes seins jaillir. Je tentais de me libérer quand un bruit de bottes suspendit leurs gestes.