Analogie [Terminé]

18 - Paix [1]

Je sers Chanyeol de toutes mes forces dans mes bras, et il me rend la pareil, pleurant et tremblant. Je respire à peine.

- Mon Dieu c'est ma faute ...

Chanyeol ne fait que répéter ces mots inlassablement.

- C'est ma faute Baek... C'est à cause de moi qu'il...

Jamais il ne termine ses phrases. Il est trop bouleversé pour ça.

Il a soigneusement lu toutes les lettres, plusieurs fois pour certaines, même si elles étaient douloureuses. Je l'ai laissé, et n'ai rien dit jusqu'à maintenant.

- Ce n'est pas ta faute Chan, ne t'inquiètes pas. Il avait d'autres raisons, tu l'as lu.

- J-Je sais... Mais... Si je n'avais pas...

Les larmes de Chanyeol redoublèrent.

Même si ses mots n'ont aucuns sens, je les comprends. Je sais ce qu'il se cache derrière, et toutes la détresse qu'ils cachent.

Byun Baekhyun était de ces adolescents qui, à 17, avait déjà perdu tout espoir. Pour qui la vie ne valait plus rien. Pour qui le bonheur ne signifiait rien.

Il était surtout de ceux qui, en 2010, n'avaient pas eu leur diplôme. Et il avait eu le malheur d'être Coréen, de vivre dans le pays où la réussite valait plus que tout.

Byun Baekhyun était un adolescent qui n'avait plus de rêves, plus d'avenir, et qui faisait honte à sa famille. Son seul réconfort était Chanyeol.

Mais Chanyeol n'en savait rien. Chanyeol s'est disputé avec lui. Et depuis ce jour, Chanyeol n'a plus jamais revu Baekhyun.

Chanyeol, pendant huit ans, avait continué d'espérer, de lui envoyer des messages, de penser à lui.

Il avait essayé de passer à autre chose, était tombé amoureux de sa prof de musique et était sorti avec elle. Mais ça n'avait pas suffi. Chanyeol, jamais, ne fut capable d'oublier Baekhyun, il attendait chaque jour son retour.

La triste vérité que Chanyeol ne savait pas, et que j'avais compris en venant dans cette pièce, c'est que Baekhyun ne reviendrait jamais. Il aurait pu, mais le 10 août 2010, il a fait le choix de ne jamais revenir.

Le 10 août 2010, il a soigneusement fermé la porte à clé, ouvert une des fenêtres et a plongé dans le fleuve Han.

Il a fait le choix de ne jamais revenir, pas même à la vie. Et jamais personne en huit ans ne le sut.

Chanyeol s'en voulait. S'il ne s'était pas énervé contre lui, alors peut-être que Baekhyun serait toujours là.

Son étreinte autour de moi se détend, il ne hoquète plus. Après avoir pleuré pendant plus d'une heure, il se calme enfin. Ses yeux sont rouges, bouffis, sa bouche sèche et ses joues trempées de larmes.

- J'aurais dû... J'aurais dû comprendre ce qu'il voulait me dire lorsqu'il m'avait dit "adieu". Je pensais... Je croyais juste qu'il était énervé contre moi, comme moi je l'étais..

Je passe ma main doucement dans son dos en signe de réconfort.

- C'est ma faute s'il s'est tué, Baek...

Nous restons sans bouger, attendant que Chanyeol se calme. Au bout d'un moment, je demande :

- On rentre ?

Chanyeol hoche la tête. Il est vidé de ses émotions. Oui, on rentre maintenant. Cet endroit est trop douloureux.

Nous nous levons. Chanyeol ferme la fenêtre; elle grince horriblement. Il prend les lettres et les empile soigneusement dans un coin de la pièce. Il récupère la clé rouillée, la glisse dans sa poche.

- Est-ce qu'on devrait prévenir la police ?

Je réfléchis, pense à la famille de Baekhyun.

- Oui, on devrait le faire je pense.

Il hoche encore la tête, puis, enfin, nous sortons du théâtre. Malgré les courants d'airs qui passaient par la fenêtre et la fraicheur de l'endroit, j'avais l'impression d'étouffer. Nous sortons de l'école et commençons à marcher. Chanyeol me tient la main.

- Baekhyun...

- Oui ?

- Une question me turlupine... Comment connaissais-tu cet endroit ? Comment savais-tu que la clé ouvrirait cette pièce ? C'est un endroit que seul Baekh... Enfin mon Baekhyun connaissait.

- Mmh... Comme tu le dis, seul un Byun Baekhyun pourrait connaître cet endroit. Et c'est bien parce que je suis un autre Baekhyun que je le savais.

- ... Quoi ?

Je souris.

- Je t'expliquerai ça plus tard.

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