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_ Tu parles d'une surprise!

Carl regarda longuement Eddie qui ne sut quoi faire d'autre. Il n'avait pas bougé depuis que leurs regards s'étaient croisés et ne l'aurait sans doute pas fait si Arthur n'avait pas intervenu; il était le seul à ne rien comprendre à ce qui se passait.

_ Vous vous connaissez? leur demanda Arthur troublé par leur réaction.
_ Oui, répondit tout de suite Carl qui avait enfin repris ses esprits. On se connaît, en effet.

Plus que son sourire, on pouvait l'entendre rire lorsqu'il courut prendre Eddie dans ses bras et lui donna une bise sur chaque joue.

_ Dire que ma belle-soeur était la magnifique Eddie! s'exclama Carl. Sacrée surprise frérot, sacrée surprise.

Au même instant, la servante entra annoncer que le dîner était servi. Eddie regarda Arthur qui lui, jetta un coup d'oeil à son frère qui leur fit une révérence théâtrale.

_ Après vous, leur dit-il avant de les suivre tous les deux dans la salle à manger où Eddie aurait donné n'importe quoi pour ne pas y entrer, se demandant ce que sera le reste de sa soirée en compagnie de ses hommes qu'elle n'avait jamais pensé avoir un quelconque lien d'amitié voire qu'ils étaient frères. Elle la détestait déjà cette soirée qui marquait de ses empreintes, son lendemain dont elle redoutait énormément pour la première fois ce qu'il pourrait lui apporter, surtout quand Carl la gênait avec les sous-entendu de ses phrases maquillées d'une certaine note d'innocence dans le but de ne pas trop éveiller la curiosité d'Arthur. C'était d'ailleurs, l'unique point sur lequel ils s'étaient entendus durant tout le repas, assis autour de cette table bien garnie, malheureusement que seul Carl avait l'appétit nécessaire, mais non suffisante pour la défaire; son frère restait préoccupé par ce changement de vie imposé à lui et Eddie se déshydratait presque tandis qu'elle était assise dans une pièce parfaitement climatisée.

_ Tout va bien? demanda Arthur à Eddie qui était ailleurs, plus froide qu'à son arrivée au point de devoir la toucher en plus de citer son nom à deux reprises pour qu'elle se décida à revenir sur terre. Sa température avait baissé et pourtant elle suait à grosse goutte, on aurait dit qu'elle avait changé de couleur, sa peau devenant aussi rouge qu'une tomate, sous l'effet du stress tenté d'être géré tant bien que mal.
_ Oui, mais... Non, en vrai, il y a que je ne me sens pas trop bien.
_ Je vais te chercher de l'aspirine?
_ S'il te plaît, se pressa de dire Eddie qui voulut que l'un d'eux se retira le temps de respirer mieux une bouffée d'oxygène qui était plus difficile à s'approprier lorsque les deux étaient présents.
Arthur avait à peine quitté la pièce que Carl brisa le silence qu'elle désirait régner.

_ Je te manquais tant que t'es venue jusqu'ici! J'avoue que j'aurais aimé que ce soit moi qui reçoive le baiser de tout à l'heure, mais bon. En plus, cela aurait prouvé que tu t'ennuyais vraiment de moi.

Carl faisait référence à leur dernière conversation qu'ils avaient eue un peu plus tôt dans la journée. Il avait appelé Eddie pour qu'elle sache que leur soirée avait été annulée à cause d'un imprévu et celle-ci tellement ravie de ne pas avoir à inventer une histoire afin de se rendre à ce dîner si spécial par le fait qu'un membre de la famille d'Arthur y serait, s'était mise à lui témoigner sa fausse déception en lui disant qu'il allait lui manquer terriblement. L'une de ses pratiques utilisées afin d'embobiner ses conquêtes.

Eddie avait pris un plaisir fou à baratiner Carl au téléphone pendant que Dahanna riait de bon coeur le spectacle. Elle avait ensuite choisi sa tenue sous les conseils de sa cousine qui avait pris la place de Tania depuis leur dispute faisant d'elles de vraies inconnues s'étant croisées quelques fois par l'intermédiaire d'Arthur. Dahanna ne la faisait aucune morale ni n'essayait de lui donner des leçons sensées la faire regretter ses actes, donc ça allait à merveille entre elles; leur vie leur convenait autant qu'elles se ressemblaient.

N'empêche qu'en ce moment celui qui était bien placé pour rire ne s'en gênait pas, mais Eddie voulait surtout savoir ce qu'il attendait d'elle. Carl ne cessait de se moquer de sa personne et ça la rendait nerveuse davantage au lieu de la mettre en colère. Quand même, elle fit de son mieux pour ne pas trop paraître vulnérable; elle se devait de garder la tête haute et de se maîtriser jusqu'à la fin.

_ Tu m'aimes dans le rôle du beau-frère? demanda Carl la fixant droit dans les yeux. J'espère juste que j'aurai toujours droit à mes gâteries, tu as promis.
_ Tu vas passer ta soirée à te moquer ou quoi? Qu'est-ce que tu veux? Tu attends quoi pour tout dire à Arthur?
_ Je rêve ou c'est bien moi qui subis une interrogatoire de ta part? demanda Carl qui cette fois, avait échangé son large sourire contre un regard froid et méprisant.
_ Mais ne t'en fais pas, poursuivit-il, ton voeu sera réalisé. Tu ne perds rien pour attendre.
_ Serait-ce des menaces? On n'est pas si différent que ça, je te fais remarquer.

Le ton d'Eddie se fit plus ferme d'un seul coup. Elle se savait prise dans son propre jeu et qu'elle n'en avait pas pour longtemps avec Arthur ni ne pouvait espérer mieux avec Carl tellement elle était occupée ces derniers temps à se donner complètement à Sandro qui visiblement, était le seul à avoir obtenu son amour. Alors, autant en finir pour de bon, pensa-t-elle en défiant du regard, Carl qui était devenu un pion gênant dès l'instant où elle avait su qu'il était son beau-frère en plus de son amant; sans savoir s'il avourait tout à Arthur au moment même où ce dernier rentrerait dans la pièce ou s'il attendrait son départ (ce dont elle priait de se produire), Eddie crut bon quand même d'essayer d'amadouer son futur ex beau-frère au moins jusqu'au temps de son départ.

_ J'ignore pourquoi tu voudrais en faire tout un plat, ce n'est pas comme si toi et moi avions une relation sérieuse. Elle était quelconque et sans lendemain, tu le sais aussi bien que moi parce que tous les deux, nous ne sommes pas stupides au point de croire qu'aucun de nous n'avait sa vie, voyons. On se ressemble trop pour ne pas y avoir pensé.
_ Tu n'as pas tort, on se ressemble bien trop; on aime frapper là où ça fait mal et c'est normal.

La voix d'Arthur de retour, ne donna pas à Eddie le temps de répondre. De par-là, elle se leva de table et annonça son départ plus que nécessaire selon ses dits.

_ Déjà? s'étonna Arthur tenant le flacon d'aspirine en main. Tu n'as même pas pris de dessert.
_ C'est vrai Eddie, ajouta Carl pour lui-même. On a gardé le meilleur pour la fin; il s'agit d'un pouding d'été typiquement anglais débordant de fruits, un vrai régal.
_ Tentant, dit Eddie avec un faux sourire lancé à Carl qui se levait de table comme elle venait de le faire elle-même. Mais non, je ne peux rester.
_ Juteux et garni de fruits, ces délicieuses fraises! Mhmm. D'ailleurs, ça me fait penser à cette fille dont je t'ai parlé Arthur, elle est toute aussi bonne. Celle avec qui j'ai été l'autre soir à la remise des prix.

Le coeur d'Eddie s'était alors mis à battre la chamade. Il parlait d'elle à Arthur et la suite était plus qu'évidente, il allait la balancer, là maintenant.

_ Elles sont pareilles à des fraises, ses lèvres. Également très surprenante, on s'est rencontré à l'Épidor du poste marchand.
_ Ah oui! Je me souviens, tu m'en as parlé effectivement. La cousine de l'autre fille...
_ C'est bien elle, coupa Carl. Devine qui c'est.
_ Quoi? Je la connais?
_ Mieux encore, tu sors avec elle.
                                  
                             

Fallait le direOù les histoires vivent. Découvrez maintenant