chapitre 6

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Paul et moi descendîmes finalement les degrès pour retrouver nos familles qui patientaient dans le hall. J'étais encore toute chamboulée par ce que Paul venait de me dire. Je tremblais et mes mains étaient moites. À ma vue, la jeune Clarisse lâcha la main de sa mère pour venir me sauter dans les bras. Je la reçus avec gravité puis la redescendis au sol. Je me baissais de façon à être à son niveau. Mon jupon noir traîna au sol et se plia. Je serrais fortement ses deux mains dans chacunes des miennes.

-Clarisse, vous êtes grande à présent et êtes en âge de comprendre... certaiens choses. Votre frère et moi avons une mauvaise nouvelle à vous annoncer.
-Est-ce la raison pour laquelle vous êtes, madame, habillés tous deux en noir? Je ne suis pas dupe, Qui est mort?
-Clarisse! la rappella Juliette à l'ordre.
-Père mère, Madame la marquise, nous serons mieux installés dans un salon. 

En prononcant ces mots, Paul fit porter l'attention sur lui. Jusqu'à présent, personne n'avait remarqué les marques qui changeaient son visage. Les quatres invités poussèrent un petit cri. Oubliant sa droite posture et son maintien,  la comtesse courut vers son fils.

-Seigneur, mon fils... murmura-t-elle en caressant le contour de son visage. Qui peut bien faire une chose pareille?
-Madame, veuillez excuser mon explicité, mais votre fils.
-Par..pardon?
-Mère, venez, allons nous asseoir. Nous avons tous à causer.

Paul et moi dirigeâmes la famille au travers des pièces d'apparat pour les mener vers un coquet salon. Ni Clarisse ni personne n'osaient dire quelque chose. Tous avaient la mine grave. Chacun s' installa et ma mère se plaça à mon côté. Paul était resté debout, accoudé à la cheminée. Il prit la parole.

-Comme vous l'aurez compris, j'ai, pardon , nous avons de mauvaises nouvelles à vous annoncer.
-Jean est mort c'est cela? Paul, mon fils, répondez! Mon enfant, ma chair m'a-t-elle été arrachée? A-t-il été rappellé à Dieu?
-Mère...
-Répondez!! Éléonore,  vous qui êtes une femme vous pouvez comprendre la détresse d'une mère. Je vous en conjure...
-Je ne dirai pas madame, qu'il a été rappellé à Dieu, mais à son abject opposé.

Juliette accueillit ces mots de larmes plus abondantes encore que celles du torrent qui dévastait son noble maquillage précédemment. Elle pointa Paul du doigt, son visage toujours ravagé.
-C'est vous qui l'avez tué!
La pauvre mère prit ses jupes à deux mains et se leva du pliant  pour courir hors de la pièce.
-Ce que dit mère... est-ce vrai?  Vous avez tué Jean?
- Clarisse...non, pas précisément.
-Mon fils, qui l'a tué si ce n'est pas vous?
-Moi.
-Tara? m'étranglais-je, que faites vous ici?
-Je vous ai entendus parler, je me devais de dire la vérité.
-Non, nous l'aurions dite, quoi qu'il advienne.
-Eléonore a raison, vous devez vous reposer, c'est important.
-Nous existons, quelle  vérité?
-La vérité père. Mon frère n'est pas celui qu'il a prétendu être. C'est un monstre.
-Comment pouvez vous dire cela? C' est votre frère. Ou devrais-je dire c'était. le comte avait craché ces mots.

Il lança à Tara un regard si méchant que celle- ci baissa la tête rouge de honte. Mais ce n'était pas le genre de Tara de s' écraser, elle releva sa figure, et lança:
-Monsieur votre fils avait séquestré son frère ici présent et maltraité. Il en a fait de même avec mademoiselle qu'il a contrainte de l'épouser sous la menace de tuer son réel fiancé qu'il gardait dans un lieu tenu secret. Ce lieu s' avérait être le grenier de cette bâtisse. Au jour d'hier, nous avons découvert où se trouvait caché monsieur Paul, le véritable, puisque Jean se faisait passer pour son frère. Mademoiselle de Flavigny et moi sommes monté le délivrer en postant un fidèle serviteur à l'étage inférieur pour nous protéger. Mademoiselle et moi étions armées d'un tison. Je suis restée qu pied de l'escalier menant au grenier quand mademoiselle est montée seule. Elle est plus apte à vous conter ce passage.
-Oui, merci Tara. Une fois en haut, je vis à l'autre bout de la pièce Paul seul sur une chaise. Il était amoché sur tout son visage, vous pouvez le constater, et était solidement attaché. Je défis ses liens, mais il était faible, très faible, il pouvait à peine parler. Nous n'eûmes pas même le temps de nous retrouver que Tara nous cria gare. Quelques secondes plus tard, je dus me battre contre ce malfrat qui venait de pénétrer dans ce grenier. J'avais un immense désavantage,  je ne sais pas me battre, et lui avait une épée. Il prit rapidement le dessus. Je ne tardais pas à me retrouver à terre, désarmée, maîtrisée. Au moment où il allait me porter un coup fatal, il s' écroula sur moi, son sang coulant sur ma poitrine.
-Je l'avais tué. C'était lui ou mademoiselle .
-Je vois , le choix était vite fait. Je ne vous en veux pas mademoiselle,  mon fils a toujours été une mauvaise personne. Vous avez sauvé la vie de ma belle fille, je vous suis redevable à vie.
-Oui monsieur, mais je vous ai enlevé celle de votre fils.
-Il méritait que Dieu le rappelle à lui, il a péché Dieu sait combien de fois sans jamais être avec des remors. Mais, une chose m'étonne, pourquoi le noir du deuil? 
-Ce n'est pas pour Jean père, mais pour notre ami que ce monstre a tué.
-Je suis désolé pour votre ami. Il va sans dire que nous annulerons le mariage pour en refaire un nouveau avec le comte mon fils, enfin, le vrai cette fois-ci.je ferais jouer mes relations.  Mais il va sans dire également que quelque soit le crime que mon fils ait commis, il a le droit une sépulture décente. Où se trouve le corps?
-Justement monsieur, il y a un léger problème...
-Qu'entendez vous par cela?
-Et bien... il a disparu.
-Comment?! Comment est-ce possible? Les morts ne disparaissent pas!
-C'est ce que nous pensons, mais nous imaginons que quelqu'un l'aurait emmené.
-Enfin! Mais dans quel but?
-Nous l'ignorons.
-Bien votre histoire est à s' arracher les derniers cheveux qu'il me reste sur le crâne... Il ne sera donc pas enterré avant que le corps ne soit retrouvé. Et pour annuler le mariage, je dois savoir s' il a été consommé.
-Non.
-Clarisse, venez, ne soyez pas trop attristeée par la mort de votre frère. Je devrais plutôt dire la mort fantôme de votre frère.
-Je ne suis pas trop attristé, il n'a jamais été gentil avec moi. Et puis, ce qu'il a fait à Paul et à Éléonore est impardonable. J'espère que mère comprendra.
-L'amour d'une mère est infini mon enfant, il est sûr qu'elle aura du mal à s' y faire, de plus elle n'a pas entendu l'histoire. N'ayez crainte. Vous la réconforterez.

Ma mère me prit la main et la serra fort dans la sienne. Elle n'avait rien à dire, son doux regard plongé dans le mien me suffisait.

Appelez-moi Madame T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant