Chapitre 2

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Le deuxième coup de gyeong retenti dans toute la ville alors que patiemment, je me tenais devant la résidence du prince. Ma grand-mère avait insisté pour m'accompagner, voulant voir le prince sortir, paré de tous ses magnifiques bijoux, de son chapeau de soie tressé, et surtout de sa tenue traditionnelle et brodée d'or, de dragons, de phénix, et de plusieurs sortes de fleurs. Elle me tenait alors le bras, me rassurant souvent lorsqu'elle voyait mon regard inquiet posé sur les autres candidats qui tous avaient plus de mérite que je n'en aurais jamais. Or, il était désormais temps pour tout ce beau monde de passer tous ces tests inconnus et donc de vivre cet échec en réalité. En effet, deux magnifiques jeunes femmes traversèrent le pont qui séparait la demeure du prince et notre rive. Sa demeure était entourée de douves profondes où s'était développé à profusion des fleurs de lotus. Sur le côté de notre rive, s'étendait un immense parc qui était parsemé de quelques arbres fruitiers que les jardiniers arrosaient depuis déjà un long instant. Je m'étais même surpris à calculer le nombre de seaux d'eau qui avaient été déversés sur le sol, me disant qu'avec cela ma mère aurait pu nous faire boire pendant un bon mois. Les fortunés n'avaient pas le sens de la mesure.

Le pont fut enfin libéré des entraves de tissu fin qui y avaient été installé, les jeunes femmes se courbant lourdement face au passage des jeunes garçons devant elles. Tous s'étaient précipités alors que pour ma part, j'avais pris le temps d'aider ma grand-mère à sortir du flot humain pour reprendre la route de la maison au vu du fait que le prince n'allait certainement pas sortir. Elle me salua alors et je pus passer le pont en bon dernier, saluant bien bas les jeunes femmes qui étaient sur les côtés. Elles fermèrent d'ailleurs la marche derrière moi et firent entrer tout ce beau monde dans une immense salle de réception. Là, avait été déposé plusieurs mets délicieux, des poulardes rôties, du bœuf grillé, des gâteaux de riz, des dattes et du miel, des fruits mûrs, et enfin il y avait une grande quantité de riz. Je ne comprenais pas pourquoi on nous servait de quoi manger, surtout que la matinée n'était qu'à peine commencée, mais apparemment tous trouvaient cela normal. Les jeunes femmes se mirent même de l'autre côté de la table, à notre opposé parfait, et saluèrent doucement.

« Le prince vous offre ce repas, prenez des forces avant les prochains tests. Bon appétit messieurs. » murmura doucement la première en se courbant.
« Tout est pour vous, ne réprimez pas votre appétit, faites comme si vous étiez déjà chez vous... » réplica l'autre n'oubliant surtout pas de sourire

Tous les garçons se précipitèrent pour prendre une place autour de la table tandis que j'avais osé hésiter. J'avais peur qu'il ne s'agisse déjà d'un test alors je m'étais assis lentement et patiemment, prenant mes couverts d'une main légère plutôt que de l'arracher de la table. Je m'étais servi en petite quantité, me contentant d'un bol de riz alors que je regardais peu à peu tous les morceaux de viande et toutes les friandises disparaître. Tous furent rapidement repus et reposant leurs baguettes dans un vacarme ils se mirent à discuter. J'avais naturellement été mis hors de la conversation et ce jusqu'à ce que les jeunes femmes ne reviennent pour nous mener dans une autre pièce où pinceaux, encre, et papier avaient été disposés partout dans la pièce. C'est donc naturellement que nous avions pris place dans la pièce, agenouillés face à papier.

« Nous allons continuer avec un test d'écriture. Sous votre feuille de papier, vous trouverez un modèle. Reproduisez-le de manière la plus fidèle possible. »
« Soyez rapides, précis, délicats... »

J'avais hoché de la tête et pris mon pinceau entre mes doigts. Sous ma feuille j'avais donc trouvé le caractère à recopier et mon cœur s'arrêta presque alors que le caractère chinois Biang me fit face. 56 traits étaient à tracer et je me sentais déjà transpirer à grosses gouttes. Le stress me fit alors tremper d'une main tremblante les poils dans mon pinceau dans l'encre, l'imprégnant bien trop. Je pris alors la pierre à encre entre mes doigts et j'avais tenté de l'éponger. Puis, j'avais commencé à tracer les lignes, essayant de ne pas trembler alors que je me souvenais des mots que ma grand-mère me hurlait auparavant « Tu as des doigts faits pour la destruction, pas pour être délicat et l'écriture. ». Le pire était surement le fait qu'elle avait raison. A la fin, le caractère ne ressemblait plus qu'à une grosse tâche d'encre gâchée. Rien que pour cela je méritais de perdre. J'avais voulu recommencer, mais le temps était écoulé et je le compris lorsque deux hommes en armes entrèrent dans la pièce en tenant le manche de leurs épées.

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