Recueil de textes isolés.

Le simple marchand de fleurs.

C'est un simple marchand de fleurs, comme il en existe des milliers. Il marche dans les rues, tenant son cageot à bout de bras, propose des roses ou des lys aux passants, en offre même aux plus démunis. Les habitants ont l'habitude de le voir déambuler dans leur rue chaque dimanche. Ce qui est beau, chez ce simple marchand de fleurs, c'est le sourire dessiné sans cesse sur ses lèvres. Qu'il pleuve ou qu'il vente, la météo lui importe peu. Lui, tout ce qu'il veut, c'est rendre les gens heureux. Certains lui jettent seulement un regard amusé en le voyant utiliser cette technique démodée depuis bien longtemps. D'autres se moquent un peu de lui, mais rien ne l'atteint. Rien ne l'atteint à part les sourires de ceux qui lui achètent des fleurs, pour un premier rendez-vous ou pour rappeler leur affection envers un proche. Une fois, il a même été abordé par une jeune photographe, qui a pris un cliché de lui et de son cageot plein de fleurs. Elle lui a demandé pourquoi il en vendait. Il lui a répondu qu'il voulait simplement rendre les gens heureux. Et elle a souri, c'était beau à voir. Il lui a offert une rose, en échange de son sourire. La semaine suivante, il a remarqué qu'une autre jeune femme le dessinait. À elle aussi il lui a offert une fleur, parce que son dessin était très joli. Tous les dimanches, il rend quelques personnes heureuses. Son cageot de fleurs est sa raison de vivre. Ce dimanche-là, il se retrouve face à un jeune garçon, qui ne doit pas avoir plus de treize ans. D'habitude, à cet âge, les garçons se moquent de lui. Mais celui-là... Non. Celui-là se plante face à lui, et lui demande quelle est sa fleur préférée. Alors le simple marchand de fleurs répond que c'est le Géranium, parce que ça signifie la gentillesse, et que le monde semble souvent oublier ce qu'est la gentillesse. Le garçon acquiesce, et lui achète une fleur de Géranium. Puis la lui tend.

-Je ne pense pas que beaucoup de personnes vous offrent des fleurs. Tenez, c'est un cadeau pour vous.

Et le garçon s'en va, laissant le simple marchand de fleurs ahuri mais comblé de bonheur par son geste.