Ma sœur, Rosette. Je reconnaîtrai sa voix entre mille autres. Ce qu’elle pouvais m’agacer.
—J'étais aux écuries, bafouillai-je vaguement.
—Tu n’as pas oublié Céleste au moins ?
Céleste était le nom de son cheval. Je n'ai jamais compris pourquoi
elle l'avait appelé ainsi... C'était d'une légende que j'appréciais qu'elle avait tiré ce nom...On raconte qu'il y a fort longtemps, bien avant les grandes guerres humaines, mais dans un temps où tous n'étaient pas pacifiques, dans un temps qui ne pouvait même pas imaginer nos jours de 2304, une jeune femme, baptisée Céleste par les conteurs habiles, vivait dans la terreur d'un terrible secret. Sa famille s'étant éteinte, elle vivait presque seule. Alors, sans le savoir tout à fait, elle portait sur ses épaules une lourde responsabilité. Elle était la gardienne d'une créature démoniaque, cachée, endormie, mais fourbe et destructrice. Certains la décrivait comme une ombre, d'autres y voyaient la métaphore silencieuse d'une guerre. Néanmoins, cette malédiction ne l'avait pas troublée. Elle fit vaillamment son devoir et, pendant des années, tut son savoir. Elle se maria, eut trois chérubins. Des enfants qui eux aussi porteraient cette charge invisible. Ainsi la jeune femme s'en voulut de leur donner la vie dans une telle injustice. Ne pouvant se résoudre à leur transmettre la destinée de leur lignée, elle mourut en emportant avec elle la terrible réalité. Ceux qui auraient vu son corps rapporteraient que son visage était scindé en deux, comme par deux émotions : la peur glaçante et la joie béate.
C'était une histoire qui pouvait être qualifiée de tragique d'une manière. Voilà pourquoi je ne comprenais pas son choix. Je n'allais pas non plus m'abaisser à lui demander. D'un air fuyant, je lui indiquais que je ne m'étais pas approché de Céleste.
—Tu l'a encore oubliée ! Bon c'est l'heure du déjeuner... et le roi te
demande à sa table. File !Mon air consterné s'afficha de suite. J'avais bien quatre années de plus que cette enfant, et il était tout bonnement impensable que je la laisse me parler sur ce ton. Je me retins de lui lancer une réplique cinglante, ce qu'elle dut remarquer puisqu'elle parut soudainement moins enthousiaste. Elle ouvrit la bouche et prononça quelques mots que je ne pus saisir.
—Pardon ?
Elle sembla réfléchir quelques instants, en me dévisageant, puis reprit :
—Je voulais te dire... souffla-t-elle nerveusement. Pour l’écléade. Tu viens de déshonorer toute notre famille. Je suis déçue...
Je voulus protester. Elle ne m'en laissa même pas le temps, me tournant le dos et partant aussitôt en courant. Je me résignai à la fixer d'un oeil mauvais, espérant secrètement qu'elle trébuche. Je soupirai.
Je n'avais pas le temps... on ne fait pas attendre le roi...
Je me détournai donc de mon chemin initial, menant à la salle commune, pour me diriger vers la salle royale.
Ce que mon oncle pouvait m'agacer, certaines fois... J'ouvris timidement les portes, pour jeter un coup d'oeil rapide à l'intérieur. Sur l'instant, je me figeai d'incompréhension.
Ce que je vis dans la salle me coupa le souffle : une sorte d’œuf, immense, qui miroitait en projetant de la lumière sur le mur.
Je regardai les convives les plus proches de moi en demandant silencieusement des explications. Je ne reçus que des regards méprisants de leur part...
Je commençais sérieusement à me sentir intimidé. Cet objet ovoïdal faisait bien deux fois ma taille, et les murmures des aristocrates rassemblés pour le déjeuner du roi me fixaient en murmurant bruyamment. Ces souffles semblaient m'entourer dans une boucle infernale qui me rendait impuissant, exposé à leurs moqueries répugnantes.
Le roi prit la parole, me sauvant inconsciemment de cet état de vulnérabilité.
—Hayate, te souviens-tu du châtiment que je t'ai imposé ? Sache qu'il commence aujourd'hui, dès que ton maître arrivera.
Il eut un petit sourire satisfait et porta son regard sur l'oeuf, un regard où luisait un certain amusement.
L'oeuf se mit à briller plus fort, jusqu'à devenir aveuglant. Je fermai les yeux pour éviter la cécité, mais il me sembla qu'une porte s'était ouverte, dans un bruit métallique. L'étrange objet sembla exploser. De petits fragements s'envolèrent dans les airs, avant de laisser des pétales de roses tomber à leur place.
J'entendis des applaudissements et des commentaires enthousiasmés. Je rouvris les yeux pour apercevoir un homme, se penchant pour remercier son public, puis se dirigeant devant le roi pour s'incliner humblement.
Le souverain semblait particulièrement ravi. Il glissa quelques mots à l'homme incliné, avant de le faire se relever et de se tourner dans ma direction.
—Fils de Meniro, voici ton maître, Melman. Tu devras le suivre et
faire tout ce qu'il t'ordonnera de faire, annonça le roi.Je n'étais pas bien sûr d'avoir tout suivi, mais, muet de stupeur, j'acquiesçai d'un signe de tête alors que Melman s'approchait de moi. Il ne me parla pas, faisant une dernière révérence. Il m'exhorta à faire de même d'un signe de tête, ce que je fis sans m'attarder, encore bien dépassé par cette situation loufoque.
Il sortit de la salle en me tirant discrètement. Il prit une grande inspiration dès que la porte se referma.
—Je déteste faire ça, maugréa-t-il à voix basse.
Il porta son attention sur moi et me détailla rapidement.
—T'as l'air de jamais t'être battu, toi.
Je ne compris pas vraiment ce qu'il essayait de me faire comprendre. Était-ce une question ?
—Comment ?
Il soupira.
—Rien. Je vais juste te tester. Histoire de savoir combien j'ai de travail...
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Deuxième chapitre... ha ha, comme toujours, un petit commentaire ne fait de mal à personne, et c'est avec plaisir que je les lirai et y répondrai ! Sur ce, la suite est proche ;)
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La Reine Edmeralda
Fiksi IlmiahDans un monde qui a bien changé au fil des années, Hayate commet une erreur qu'il va bien regretter. ou peut-être pas ? Qui sait, peut-être que laisser la Princesse sortir du palais n'était pas une si mauvaise chose...