Battement de coeur

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Je devais partir avant qu'elle ne me voit. Cela faisait plus de dix minutes qu'elle avait cessé de chanter.
Elle ramassait et s'occupait de ses plantes sans prêter attention autour d'elle. Le vent était retombé, et les seuls sons que l'on entendaient encore étaient les bruits familiers de la forêt.
Mais mon cœur battait trop vite, trop fort et mes jambes ne voulaient pas bouger. Elles se balançaient sous moi comme du bois mort.
Et en parlant de bois... la branche sur laquelle j'étais assis commença à ployer d'une manière assez suspecte.
Avant que je ne puisse faire quoi que ce soit, un énorme craquement m'informa que la branche cédait sous mon poids et je me retrouvais quatre mètres plus bas.

Adelaïde de tourna vivement vers moi au moment où j'atterrissais sur le sol. Je me réceptionnais comme je pouvais pour ne pas finir les fesses par terre. Je maudis mes réflexes. Certes, j'étais sur mes pieds, mais je ressenti une profonde douleur à ma cheville droite lorsqu'elle toucha brusquement le sol.
- Depuis quand es-tu là ? Demanda t'elle en s'approchant vivement de moi. Je reculai et tombai à la renverse en m'appuyant sur la cheville fragilisée.
Que pouvais-je répondre à ça ?
-Dix minutes. Grimassai-je en tentant de me remettre debout.
Bien sûr que je mentais. Cela faisait plus de vingt minutes que je l'observais. Mais cela aurait paru encore plus suspect que je lui avoue l'avoir suivie depuis le début. Ce qui reviendrait à avouer que je l'avais surprise à faire... à faire quoi ? De la magie ? Pour moi ça ne pouvait être que ça.
Sa voix avait éveillé les végétaux qui l'entouraient et le vent s'était joint à la fête.
Bon, dit comme ça, personne ne pourrait y croire un instant et les gens penseraient que je suis fou à lier.
Avec un soupir, elle me poussa doucement et je retombais par terre. Elle se baissa sur ma cheville et la palpa doucement. Mon cœur fit un bond.
Je me redressais comme je pu en position assise et reculai ma jambe, l'empêchant de me toucher.
Sa main était chaude. Et même si mon corps était plus froid que la normale, jamais une main humaine n'aurait pu être aussi chaude. Les sorcières ont-elles une température plus élevée que la moyenne ?
- Ne me touche pas.
- Ne fais pas le gamin. Ça risque d'empirer si je ne traite pas ton entorse tout de suite.
Elle sortit des herbes de son panier et les réduisît en miettes avant de les rouler dans ses mains pour en faire une sorte de pâte informe. Ensuite elle enfourna cette pâte d'herbe dans sa bouche pour la mastiquer, la recracher et me la coller sous la chaussette, à l'endroit où l'entorse me faisait souffrir. Je ne savais pas si je devais être dégoûté ou admiratif. Cette fille savait fabriquer un onguent en moins d'une minute, mais d'une manière assez... dégueu. Elle prit d'autres plantes qu'elle roula en boule dans sa main avant de me la tendre.
- Tiens, prends ça, mâche et avale. Tu auras moins mal.
Je ne fis rien pour prendre la boulette de feuilles alors elle la pressa sur mes lèvres. Je plantai mes yeux dans les siens avant d'ouvrir la bouche. La boule d'herbes roula sur ma langue et sur mes lèvres, les doigts d'Adélaïde restèrent un instant immobiles. Ses yeux semblaient plus foncés. Ils n'étaient plus vert d'eau mais d'un vert profond. Vert comme les profondeurs de cette forêt. Et ils me questionnaient.
- Qui es-tu ? Demanda t'elle finalement en retirant ses doigts. Pourquoi tu m'as suivi ?

La sorcière de la plaineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant