Pendant les trois semaines qui suivirent, Adélaïde resta cachée. J'avais croisé sa mère plusieurs fois, une ombrelle noire à la main. Souvent, elle promenait en laisse un cochon rose qui reniflait partout, et lorsqu'elle me voyait, son sourire me donnait des frissons. Son mari aussi se baladait, souvent avec elle d'ailleurs, et me faisait un signe de la main lorsque nous nous croisions.
En ayant rencontré la famille Addams au grand complet, je ne comprenais pas comment les villageois pouvaient trouver Adélaïde plus effrayante que ses parents alors que pour moi, c'était tout le contraire.
Le soir, je voyais souvent une lumière dans la lucarne du toit.
Ma petite sorcière passait parfois devant la petite fenêtre et je pouvais la deviner à travers les voilages en train de lire un livre en faisant les cents pas ou écouter de la musique en dansant lentement. J'avais pris l'habitude de m'installer sur le rebord de ma fenêtre pour la regarder. Je ne sais pas si ça faisait de moi un voyeur, mais personne ne me l'avait encore reproché.
Depuis trois semaines, j'avais découvert plusieurs choses à propos de mes voisins et donc de « Mercredi ».
D'abord, tout le monde ne les détestaient pas. Certains même, se rendaient chez la famille Addams en quatimini pour se faire « tirer les cartes » ou expérimenter la shiromancie. Mme Crow semblait être une voyante reconnue et, en dehors de ces excentricités, était plutôt populaire pour une partie de la population.
Le père Addams était propriétaire de trois magasins, du musée et louait des locaux à de nombreux commerçants ainsi que des appartements. On pouvait presque dire qu'il possédait la moitié du village, si ce n'est plus.
Il était craint et respecté par beaucoup d'adultes. Jalousé aussi. Il me faisait pensé au Parrain que personne ne souhaitait se mettre à dos mais dont tout le monde parlait en mal secrètement.
En réalité, seule Adélaïde était vraiment rejetée par la plupart des villageois. Mais parce qu'elle les repoussaient elle aussi.
En ayant passé un peu de temps avec Pauline, celle-ci m'avait avouée avoir une relation « amitié-haine » avec ma voisine et était fascinée par elle.
Tous les lycéens du coin allaient dans la même école. Celle que j'allais intégrer dans trois semaines. Pauline et Adélaïde étaient dans la même classe depuis deux ans.
Au moment où les Crow étaient arrivés.
J'avais alors posé une question à la blondinette . Comment le père pouvait-il être propriétaire de tant d'immeubles, locaux commerciaux et même du théâtre et du musée de la ville, s'ils n'étaient arrivés en ville que deux ans auparavant ?
Pauline m'avait expliqué que c'était une sorte de « retour au pays » pour la famille Addams. Leurs ancêtres étaient à l'origine du village. Elle m'avait montré les ruines d'un château qui aurait appartenu à la famille Crow pendant des générations. Ils auraient même eu une particule à un moment. Bien évidemment, en partant aux état-unis, ils l'avaient perdu et avaient pris un nom anglophone.
Pauline était intarissable. Elle devait connaître l'histoire des Crow mieux qu'eux-mêmes.
Allongé sur mon lit, la musique en sourdine, je tentais d'organiser mes idées et de trouver une solution pour coincer Adélaïde et lui parler. J'avais mon téléphone portable à la main que je tournais et retournais machinalement dans tous les sens.
Trois semaines sans la voir. Et cette vidéo que je repassais tout les jours...
Le plan qui s'affinait.
Je me redressais soudainement sur mon lit, en sorti et, en ouvrant ma fenêtre, jetai un œil sur la maison de ma voisine.
Super. La lumière du toit était allumée.
J'enjambai souplement ma fenêtre et me laissai tomber dans le vide pour atterrir un étage plus bas.
Je traversai la route à toute allure et me fondant dans les ombres du jardin de mes voisins réfléchi à un moyen de monter jusqu'au toit sans être vu. Je longeai le mur gauche qui était emplit de lierre grimant. Les branches étaient trop fines pour que je puisse m'y accrocher, mais le mur derrière était en grosse pierre et donnait de bons appuies pour grimper.
Après un rapide regard aux alentours, je commençais mon ascension le plus silencieusement possible.
Ce fut simple et rapide, en deux minutes je me retrouvai sur le toit et atteints la fenêtre. Par chance, elle était entrouverte. Il n'aurait pas été facile de lui demander de m'ouvrir la fenêtre pour me laisser lui parler. Je voulais soigner mon entrée. Et ne pas lui laisser le choix.
Je regardais à l'intérieur pour découvrir où elle se trouvait.
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La sorcière de la plaine
ParanormalGabriel n'à jamais voulu quitter Paris pour s'installer dans ce bled pourri. Mais il va faire une rencontre qui va changer sa vie. Ses voisins étranges qu'il appelle "la famille Adams" et leur fille surnommée "Mercredi" cachent un secret. Et il pr...