Chapitre 5 - Temps révolu

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« Cousine ? Est-ce que ça va ? »

Ce fut la première chose que je pus comprendre quand je commençai à revenir à moi. Ma tête me lançait horriblement, et mon cœur battait la chamade. J'avais toujours les yeux clos, mais je sentais le sol trembler : quelqu'un montait me rejoindre. Je devinais que c'était Cyprien. Ce ne pouvait être personne d'autre.

« Astrid ?... Tout va bien ?... »

Sa voix trahissait son inquiétude. Il avait dû entendre le fracas de mon être éteint sur le bois, il y avait quelques instants. Malgré ce calme, mon rythme cardiaque était toujours aussi rapide. Je n'en savais guère la raison. Mon ventre était aussi noué, chatouillé par un quelque chose de pas très déplaisant. C'était quelque chose de spécial, en tout cas.

« Oh ! »

Je sentais le souffle court de mon cousin s'arrêter sur ma joue. Il était devant moi, même si je ne voyais toujours rien. Avec une force surhumaine, je me forçai à lever mes paupières lourdes. Je vis alors l'expression déconfite de mon cousin, qui semblait plus anxieux qu'autre chose. C'était la première fois que je le voyais ainsi.

J'avais à peine cligné des yeux que son regard verdoyant, d'habitude pétillant, s'engouffra dans mon regard azur. Ils brillaient d'une intense lueur d'empathie et de tendresse, ce qui m'étonna au plus profond de moi. Je ne l'avais jamais vu dans cet état. Il semblait même paniqué.

« Que... Que t'est-il arrivé ? articula-t-il en se hissant près de moi.

– À vrai dire, je ne sais pas moi-même ce qu'il s'est passé, cher cousin... lui répondis-je calmement en me relevant péniblement.

– Tu es sûre que ça va ? insista-t-il avec une lueur protectrice dans son regard pénétrant. Tu as mauvais mine.

– Dis donc, je ne connaissais pas ce Cyprien si protecteur... C'est nouveau où c'est une option ? le taquinai-je d'un faible sourire.

– On dirait que tu ne me connais pas sous mon rôle d'adulte... Je suis peut-être encore un enfant dans ce que je fais, mais je suis un adulte là-haut. Lorsque je vois quelqu'un en détresse, je ne suis pas une âme innocente et malicieuse. Je suis le grand qui réfléchit, qui aide, qui soutiens.

– C'est beau, ce que tu dis. C'est bien la première fois que je te vois comme ça, mais j'en suis heureuse. »

Nous nous mîmes à nous fixer intensément. Ce moment, je voudrais ne jamais l'oublier. Enfin, je voyais le vrai Cyprien. Pas celui que ses parents construisaient selon leurs idéaux. Celui qu'il avait décidé d'être. Et c'était mon cousin.

« C'est normal que tu ne portes pas ta plume ?

– Si c'est une blague, ce n'est pas drô... Eh mais, tu as raison ! Où est-elle passée !? Je l'avais mise ce matin ! »

Je m'étais relevée d'un seul bond. Je paniquais. Je ne voulais surtout pas perdre ce bijou si précieux à mes yeux... Ceux-ci balayaient les alentours et je tournai sur moi-même pour un meilleur angle de vue. Cyprien cherchait aussi du regard. Puis, nous entendîmes un bruit de métal tombant au sol.

Je baissai la tête, en suivant le son qui venait de s'échapper des entrailles du bois. Quel ne fut pas mon soulagement lorsque j'aperçus ma plume et ma chaîne, scintillants sous les rayons de lune ! Je soupirai de soulagement, qui en fit sourire mon cousin. Pourtant, je vis ce dernier froncer les sourcils sur la page de journal qui se trouvait à côté.

La plume & l'Oiseau [sous contrat d'édition]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant