Chapitre 11 - Chemin des Secrets

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Pour symboliser mon incompréhension, je courbais un de mes sourcils. Celui de gauche. Celui qui portait en lui même l'histoire de mon enfance. Je dévisageai longuement mes deux interlocuteurs. Que voulait-il dire par cette agressivité soudaine sur le ministre et sur mon oncle et tante ?

« Que voulez-vous dire par leur faute ? Qu'est-ce que je ne sais pas encore ? » m'exclamai-je en croisant les bras.

Mon regard devait être aussi solide que du diamant. Je jonglais avec leurs deux silhouettes. Ils étaient hésitants. Alix tourna la tête vers son compagnon, et captiva aussitôt son attention. Ils se fixèrent ainsi en silence, comme s'ils ne parlaient qu'avec la prunelle de leurs yeux. Moi-même je ne comprenais vraiment ce qu'ils se racontaient de si secret.

À cette pensée, mon cerveau réagit. Il fut pris d'une rage sourde et d'une détermination sans faille. J'en avais marre de tous ces mensonges. Je voulais tout savoir, quitte à ce que cela me brise le cœur. J'étais prête à tout entendre.

Enfin, je le croyais.

Alors, je me mis à cracher ces mots, comme s'ils sortaient tout droit de mes entrailles.

« Ça suffit ! Dîtes-moi sur-le-champ tout ce que je devrais savoir depuis toujours, et tous ces secrets que tout le monde me cachent depuis petite ! Je ne veux plus vivre dans le mensonge et dans l'obscurité, mais dans la vérité et la lumière. Je ne suis plus si frêle que vous le croyez : j'ai déjà surmonté treize années chez mon oncle et ma tante. Je peux endurer plus. »

La panthère s'était de nouveau réveillée. Ma respiration s'était légèrement accentuée et mes membres me chatouillaient méchamment. Je ne les lâcherai pas.

Et ça, ils semblaient le savoir.

Puis, ils se bougèrent enfin. Ils posèrent tous les deux délicatement leur regard incertain sur moi, ce qui me déstabilisa un instant. Qu'allaient-ils donc m'annoncer pour que leur mine soit aussi grave ?

« Tu es unique, commença Romain d'un ton empreint de douceur, et en même temps de sévérité.

– Non, je suis comme toutes les autres filles de mon âge, le contredis-je alors, d'un air ironique.

– Toi-même tu ne crois pas à ce que tu viens de dire. »

Il avait raison. Je ne me croyais pas moi-même dans ce que je venais de dire. Je doutais de ce que j'étais vraiment. Je ne savais pas pourquoi c'était à moi, et moi seule que toutes ces choses arrivaient...

Alors, je le relançai, avec malgré moi un petit intérêt et une curiosité soudaine.

« Pourquoi serais-je unique, comme tu le dis ?

– Parce que tes parents l'étaient. »

C'était Alix qui m'avait répondu. Me parler d'eux me fit frissonner. Pourquoi mes parents seraient-ils spéciaux ?!... Et comment se faisait-il que...

« Comment savez-vous cela ? protestai-je, une note de méfiance dans ma voix.

– Nous les connaissions, autrefois. »

Je fixai Romain avec une rare intensité. Ils avaient connu mes parents ?...

Mon dieu...

J'eus envie de pleurer. Pourtant, je n'en fis rien.

« Comment cela ?... balbutiai-je, choquée.

– J'ai cru comprendre que tu avais fait un rêve, et que tu avais revécu ton accident. Je me trompe ? » me coupa Romain, en fronçant légèrement les sourcils.

La plume & l'Oiseau [sous contrat d'édition]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant