6ème mois - partie 1

2K 227 179
                                    

Depuis un mois, j'avais une nouvelle meilleure amie. Elle m'était fidèle. Toujours là quand j'en avais besoin. Je passais le plus clair de mon temps avec elle. De jour comme de nuit, la cuvette des toilettes était au rendez-vous, prête à recevoir en elle ce que mon cher fils décidait de lui envoyer.

- C'est pas les trois premiers mois normalement les nausées? Je veux mourir putain....

Et encore une fois. Je n'en pouvais plus. Pour pallier l'excès de bile qui pouvait être rejeter, j'avais trouvé une astuce infaillible. A coté des wc trônait désormais une bouteille d'eau. Quand j'avais le ventre vide et que je sentais que, malgré tout, ce dernier avait décidé de n'en faire qu'à sa tête, je buvais une bonne gorgée...qui ressortait si tôt avalée. Mon œsophage était alors devenu une nouvelle voie express...Youpi.

J'avais pourtant passé cinq mois relativement cool. Certes j'avais eu quelques nausées et quelques malaises, mais je ne me souvenais pas avoir été aussi mal. Alors pourquoi fallait-il que tout devienne catastrophique au sixième mois? Alors que j'étais en train de comater devant ma cuvette, la sonnette retentit. Ho merde....J'avais complètement oublié mes parents. La peur compressa une première fois ma poitrine, faisant battre mon cœur plus que nécessaire. Je ne leur avais encore rien dis. Je pris une bonne bouffée d'air tandis que mes muscles se raidissaient. J'avais reporté l'annonce de ma grossesse autant que j'avais pu, mais maintenant que j'arrivais à 6 mois, je ne pouvais plus garder ce secret. Eric m'avait bien proposé de les affronter ensemble, afin de leur montrer que je n'étais pas seule dans cette histoire, mais j'avais refusé. On avait également songé à dire que cet enfant était le notre, mais je n'avais pas spécialement envie de leur mentir. Cet enfant allait grandir. Il allait changer, et je ne voulais pas que mon entourage se pose des questions. Il finirait par savoir la vérité et là, leur réaction risquerait d'être terrible. Ainsi j'avais décidé de ne rien leur cacher.

Ma bouche s'assécha et un frisson me parcouru l'échine. Ils allaient me trucider, et s'ils ne le faisaient pas à cause de cette grossesse, ils le feraient très certainement à cause de mes cachotteries. Mon visage s'enflamma tandis que je sentais mes oreilles bourdonner. J'étais vraiment une fille indigne.

La sonnerie retentit de nouveau, offrant à mon palpitant une nouvelle excuse pour s'enfuir au galop. Bon, plus le temps de tergiverser. Je me rinçai sommairement la bouche et la figure avant de me contempler une dernière fois dans le miroir. Je réajustai ma chemise de nuit extra large de manière à cacher un maximum mes formes. Ensuite, j'enfilai ma robe de chambre que j'attachai de façon à ce que mes profils ne laissent rien paraître de mon ventre pointu. Une fois prête, je me dirigeai vers la porte d'entrée afin d'accueillir mes bourreaux sanguinaires...bon d'accord, j'exagérais, mais on mettra ça sur le compte des hormones.

-Bonjour maman, bonjour papa...

Je les invitai à s'installer dans le salon et rapportai trois tasses, ainsi que la cafetière encore brûlante. Je sentais mon cœur tambouriner dans ma poitrine et je refermai un peu plus ma robe de chambre.

-Tu aurais au moins pu t'habiller. C'est la moindre des choses quand on reçoit.

J'esquissai un léger sourire à mon père en guise de réponse avant de m'installer face à eux. Je savais que, si je commençais à jouer au jeu du qui à raison avec mon père, je ne leur annoncerais jamais. Alors, quitte à passer un mauvais moment, autant en finir rapidement.

-Tu es toute pâle, tu es sûre que tout va bien?

-Oui maman, ça va, mais heu..j'ai quelque chose à vous dire et c'est...ce n'est pas simple à dire...

-Marion, ne tourne pas autour du pot, tu sais que j'ai horreur de ça. Perdre ainsi son temps, c'est simplement...

-Papa! Le coupai-je. Je te demande juste d'écouter pour une fois.

Il agita son bras d'un air désinvolte, mais se tut. J'avais la sensation que mon cœur allait sortir de ma poitrine. Mes mains commençaient à trembler et ma bouche à s'assécher. J'avais l'impression de repasser l'oral de Français, tiens. Je pris une dernière inspiration et me lançai.

-Je suis enceinte....

Mes parents se décomposèrent devant moi. A voir leurs têtes, j'imaginais déjà ce qu'ils allaient me dire. Mais surtout, je n'avais annoncé la nouvelle qu'à moitié. Ils allaient bien se marrer quand je leur aurai dis le meilleur....

-...J'ai décidé de le garder...

Bon sang Marion! Un peu de courage bordel, arrête de tourner autour du pot. Tu n'es plus une adolescente, merde à la fin!

-....Ça fait 6 mois....

Bon, voilà, c'était dit. Alice, papa, maman, Sophie, Louis, sachez que je vous aime très fort, mais mon père va me trucider dans 5...4....3....2...1....

-C'est une blague j'espère?

Aie...Quand mon père commençait ainsi, c'était mauvais signe. La suite risquait d'être pire que ce que je croyais.

- Mais comment ça tu es enceinte? Enceinte? Insista-t-il en haussant le ton sur le dernier mot. De 6 mois. Et tu ne nous as rien dis. Tu te fous de la gueule de qui Marion hein? Et qui est le père? Hein? Qui est-ce? J'attends...

Ha..j'avais dis que c'était ça le pire? J'avais oublié ce détail. Des sueurs froides me traversèrent le dos tandis que mon rythme cardiaque se prenait pour un étalon en plein galop. Un instant, j'eus envie d'impliquer Eric, me défilant et tant pis pour la suite. Mais je ne me sentais pas capable de m'enliser dans ce mensonge. Je pris une grande inspiration afin de me donner du courage avant de reprendre, la voix chevrotante.

-Je..Je ne connais pas son nom...

-De mieux en mieux, ironisa mon père. Décidément Marion, tu te surpasses!

-Charles! Ça suffit. S'exclama alors ma mère, les yeux humides.

Une larme coula sur ma joue tandis que je sentais mon fils rouler sous ma peau comme s'il essayait de me consoler, de me dire qu'il était là. Ma mère me prit dans ses bras et me murmura des paroles rassurantes.

-Non mais qu'est ce que tu fous Marlène! Rugit mon père, rouge de colère. Elle fait des conneries monumentales et toi tu la confortes là-dedans?! Il va falloir que tu grandisses un peu, Marion. Non mais dans quel monde crois-tu vivre?

-Charles, enfin! Mesure tes paroles!

-Et puis quoi encore? Il faut bien que cette demeurée apprenne ce qu'est la vie! Avec quoi comptes-tu l'élever hein? Mon argent? Tu ne pouvais pas songer à te faire avorter?

-Quand j'ai su que j'étais...il était déjà trop tard...Murmurai-je à travers mes sanglots.

-Non mais qui m'a donné une fille aussi conne! Vociféra mon père, avant de se passer une main sur la figure et de terminer dans un quasi-murmure, tu es vraiment une déception...

-Charles! Riposta ma mère d'une voix plaintive, complètement dépassée par la situation tandis que mon père, lancé, l'ignora royalement.

- ...Et en plus tu ne connais pas le père? Mais ma pauvre fille, à quoi tu ressembles là? Hein? Enceinte jusqu'aux yeux, sans emploi, sans compagnon. Tu couches avec le premier venu et tu lui fais un môme? Tu es quoi ma fille? Une catin?

Mon père cracha ce dernier mot avec dédain et fureur. Il était complètement déchaîné, les yeux révulsés, se laissant complètement submerger par sa colère. Ma mère me lâcha alors afin d'aller se poster face à son mari. Elle posa délicatement une main sur son torse, certainement dans le but de l'apaiser.

-Charles enfin! Qu'est ce qui te prend?!

-Je ne suis pas seule....Répondis-je dans un murmure qui se perdit dans la vague de déchaînement de mon paternel.

-Ho toi ne te mêles pas de ça! Continua mon père en la repoussant d'un geste sec. C'est de ta faute si on en est là!

-Comment...? Couina ma mère, alors qu'une première larme roula le long de sa joue.

-Tout à fait! TA faute. Insista mon père, comme si le désarroi de sa femme ne l'atteignait pas. Si tu ne la couvais pas autant, elle aurait peut-être une chance de se servir de ce qui lui sert de cerveau, enfin en admettant qu'elle en ait un.

9 mois |Terminé|Où les histoires vivent. Découvrez maintenant