Le film avait démarré depuis une bonne demi-heure, mais je n'en avais pas suivi un traître mot. Je m'étais contorsionnée, prétextant être mal installée à cause de mon ventre qui s'arrondissait de jour en jour, me rapprochant petit à petit du jeune homme. Mon corps me brûlait, le désirant ardemment. Je me sentais complètement démunie, et cette perte de contrôle me mettait extrêmement mal à l'aise.
Avant, je lui aurais tout bonnement sauté dessus. Je l'aurais embrassé, aurais commencé à me déshabiller, à le déshabiller. Dans ce domaine, je maîtrisais parfaitement la situation. On aurait couché ensemble, peut être qu'on se serait revu, aurait remis le couvert, deux ou trois fois. Puis je serais passée à autre chose, prétextant le rappeler mais ne donnant plus jamais signe de vie, changeant même de numéro de téléphone comme il m'était si souvent arrivé de faire.
Mais tout ça était du passé. En cinq mois, j'avais tellement changé. Cette évolution dans ma façon de voir l'avenir me frappa alors subitement. Bien sure, je l'avais déjà remarquée, par des petites choses. De nouveaux désirs étaient apparus, de nouvelles lubies. Mais jamais je n'avais poussé mes réflexions au point de songer à remettre tout mon mode de vie en question. Jamais, à part maintenant, installée à côté d'Eric, les yeux rivés sur le téléviseur. Etais-je prête à me lancer dans quoi que ce soit d'un temps soit peu sérieux? Arriverais-je à rester fidèle? A accepter toutes les contraintes qui allaient de paire avec la monogamie? Oui je l'étais.
Quelque chose au fond de moi me souffla que je l'étais depuis un moment déjà. Depuis le jour où j'avais fais ce choix. Ou j'avais choisi mon fils à ma vie d'insouciance. Mais le vouloir ne suffisait pas toujours. Je connaissais Eric depuis un mois. Un tout petit mois. Nous nous étions certes énormément rapprochés, et on se voyait plusieurs fois par semaine. Le reste du temps, on s'appelait ou on s'envoyait des messages. Mais malgré cette fusion qui semblait y avoir entre nous, jamais il n'avait tenté quoi que se soit. Jamais il n'avait eu un geste déplacé, ou une attitude qui m'aurait laissé penser que je l'attirais. Peut-être nous n'étions pas si proche que ça finalement? Peut-être fantasmais-je, toute seule dans mon coin? Peut-être...
-A quoi penses-tu?
-A nous. Répondis-je du tac au tac, sans même réfléchir.
Eric souleva un sourcil interrogatif tandis que j'ouvrais la bouche, réalisant l'erreur monumentale que je venais de dire. Avec lui, toutes mes barrières tombaient et les filtres que je m'imposais au quotidien n'étaient d'aucune utilité. J'aurais bien aimer pouvoir figer Eric à cet instant précis afin d'appeler Alice. Elle aurait su me conseiller et me souffler des répliques. Elle aurait su me mettre en confiance et m'éviter de me ridiculiser. Elle aurait su m'expliquer ce qui se tramait dans mon cœur. Elle aurait....Mais Alice n'était pas là pour m'envoyer une bouée de sauvetage. J'allais devoir apprendre à nager en eaux troubles, seule dans un océan glacial. Mais ce regard...J'ai toujours aimé les yeux bleus. Une sorte de fantasme qui me rendait complètement folle.
Je me rapprochai d'Eric, incapable de lutter contre ce magnétisme. Mon regard passa de ses yeux à sa bouche, et inversement, Je me mordillai la lèvre inférieur, l'humidifiant de ma langue. Mon coeur tambourinait dans ma poitrine, martelant ma cage thoracique dans un rythme effréné, tel une proie qui se retrouverait acculée dans le coin préféré de son bourreau. Nos regards se croisèrent à nouveau. Il en avait autant envie que moi, je pouvais le ressentir. Le fait qu'il ne m'ait toujours pas repoussé alors que quelques millimètres nous séparait désormais aidait aussi beaucoup à m'en persuader. Et après? Non, je ne voulais pas penser à après. Je continuai de me rapprocher jusqu'à sentir son souffle chaud contre ma peau. Jusqu'à ce que nos respirations saccadées n'en fassent plus qu'une. Jusqu'à m'enivrer de son parfum qui me faisait perdre la tête.
-Je...
Il glissa sa main droite sur ma joue, emmêlant ses doigts dans mes cheveux. Ce simple contact m'électrisa, m'offrant la dernière dose de courage qu'il me fallait afin de réduire la distance entre nos lèvres affamées. Sa bouche était chaude, Douce. Son haleine n'était peut-être pas très fraîche, mais je m'en fichais. La mienne devait-être pire. Rien de tout cela n'était prémédité. Aucun de nous n'avait eu le temps de se préparer, d'anticiper. Je sentis le désir monter doucement en moi, fourmillant dans mon bas ventre et j'accentuai le baiser de façon plus passionné, laissant mes mains glisser sur les bras d'Eric, s'aventurer doucement sous son teeshirt, remonter à coup d'ongles sur son torse chaud. Brusquement, le jeune homme rompit notre fougueuse étreinte. Il prit alors mes mains entre les siennes et me regarda avec une infini douceur.
-Je n'ai pas envie de tout précipiter Marion. Je..Tu me plais beaucoup et je...J'ai l'impression de tomber amoureux de toi. Mais...
-...Mais je suis enceinte. Le coupai-je, vexée et frustrée.
-Marion, ce n'est pas ça. Je veux simplement qu'on prenne le temps de se connaître... Il laissa sa phrase en suspend, comme pour réfléchir à la façon dont il allait la finir. Disons, comme un couple?
Je restai silencieuse le temps de comprendre ce qu'il était en train de me demander.
-Tu...Tu me demandes de devenir ta petite amie, en somme?
-C'est l'idée oui, veux-tu...sortir avec moi?
-Et je pourrai donc t'embrasser autant que j'en ai envie...
Il éclata d'un grand rire avant d'acquiescer. Sa façon d'officialiser les choses avait quelque chose d'enfantin, mais qui me touchait énormément. Je me mordis les lèvres, pesant le pour et le contre. J'en avais envie bien évidemment, mais me lancer ainsi me terrifiait quelque peu. La panique me submergea quelques instants, compressant mon cœur dans un étau. Accepter, c'était renoncer aux autres hommes, renoncer à séduire, renoncer à jouer de mes charmes pour autre qu'Eric. Accepter, c'était aussi risquer d'avoir le cœur brisé et de ne jamais m'en remettre. Accepter, c'était donner une chance à mon fils d'avoir un père dans sa vie....Mais Eric en avait-il conscience?
-Tu...Tu sais que je suis enceinte?
Il acquiesça. Je réfléchissais encore un instant. Après tout, ma grossesse était encore à mi-chemin. On avait bien le temps de voir si notre relation fonctionnerait ou non. Si elle fonctionnait, je donnais à mon fils la chance d'avoir une figure paternelle à ses côtés. Si cela ne fonctionnait pas, je pourrai toujours prétendre que rien de tout cela ne se serait passé et enterrer Eric au fond de mon cœur. Je pris une grande respiration afin de me donner du courage.
-Alors c'est d'accord. Je veux...sortir avec toi.
Je me retins de rire. J'avais vraiment l'impression de me retrouver au collège. Mais le baiser qu'il me donna alors brisa l'image chaste que je pouvais avoir. Ho que non, nous n'étions vraiment plus au collège et je n'avais pas l'intention de me contenter de petits baisers et de lui tenir la main en souriant. Même si je comptais prendre mon temps pour une fois, je ne pouvais empêcher mon esprit d'être assiégé d'images déconseillées au moins de dix-huit ans.
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9 mois |Terminé|
General Fiction« On ne pense pas toujours aux conséquences de nos actes. Seul l'instant compte. Ce que l'on ressent, ce que l'on voit, ce que l'on touche. Rien ne compte. Rien n'a d'importance. A part le plaisir. Un maximum de plaisir. Il était dans la même agenc...