7ème mois - Partie 2

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Nous étions allongés, côte à côte, fixant le plafond comme si notre vie en dépendait. Je me triturai les mains tout en prenant la parole.

-Je suis désolée.

-Ce n'est rien...

Je me sentais tellement mal. Jamais cela ne m'était arrivé auparavant. Je ne comprenais pas ce qui se passait, mais j'avais la conviction que ma grossesse y était pour quelque chose.

-Non Eric! Ce n'est pas...Rien! J-Je ne comprends pas ce qui se passe. Jamais...Je t'assure que jamais je n'ai eu ce genre de...soucis.

Je me passai les mains sur le visage, honteuse et senti le corps chaud du jeune homme m'entourer.

-Tu es enceinte Marion. Tu vis un bouleversement hormonal énorme! C'est tout à fait normal...D'autant plus qu'il ne reste que deux mois avant que le petit naisse...D'ailleurs...

Eric laissa sa phrase en suspend et me lança un regard interrogateur. D'ailleurs...quoi? Je ne savais pas encore lire dans les pensées, pas à ma connaissance en tout cas. Je répondit par un regard interrogateur.

-D'ailleurs...? Demandai-je en attente.

-As-tu réfléchis au prénom?

A son regard, je compris que lui y avait énormément songé. Il caressa doucement la courbure de mon ventre tandis que je listai mentalement tous les prénoms qui pouvaient me venir en tête.

-Gaël...

Il grimaça.

-Joffrey...

Visiblement non.

-Gertrude?

Il éclata de rire à ma dernière proposition, et m'embrassa sur la tempe.

-Tu n'y as pas réfléchi, n'est-ce pas.

Ce n'était pas une question et je confirmai ses dires. Effectivement, je n'avais pas encore pris le temps d'y songer. Avec tous les événements de ces derniers mois, ce n'était franchement pas ma préoccupation principale. Mais maintenant que le sujet avait été lancé, je me rendais compte qu'il était plus que primordial de se mettre d'accord sur l'appellation de ce petit d'homme.

Nous nous levâmes alors et nous préparâmes à sortir. J'avais ma visite mensuelle avec Elizabeth Novak, ma sage femme, dans peu de temps et je n'avais pas spécialement envie d'être en retard. C'était le genre de femme toujours souriante, très aimable et gentille à condition que vous ne soyez pas en retard. Il était d'ailleurs recommandé d'arriver en avance car si vous aviez le malheur de la faire attendre, elle était capable de ne pas vous recevoir. Ou de vous en reparler plusieurs semaines après.

*

On arriva devant le cabinet de la sage femme avec cinq minutes d'avances. Je m'installai en pouffant de rire dans la salle d'attente, Eric à mes côtés. La porte de la salle de consultation ne tarda pas à s'ouvrir et elle nous accueilli avec un grand sourire.

-Bonjour Mademoiselle Grégoire. Entrez, je vous en pris. Monsieur. Nous lança-t-elle d'un ton enjoué.

-Bonjour Elizabeth. Lui répondis-je avec un sourire, soulagée que l'on se trouve dans un de ses bons jours.

-Installez-vous. Alors comment se passe la grossesse?

-Pas mal fatigante. J'ai heu...Je lançai un regard à Eric avant d'enchaîner, quelques soucis de sécheresse, enfin les rapports sont assez délicats.

-Ho ne vous inquiétez pas, cela arrive à beaucoup de femmes. Voyez, regardez...

Elizabeth se lança alors dans une explication du fonctionnement du corps féminin, schémas à l'appui. Je déconnectai rapidement, acquiesçant avec le sourire par moment, répondant par l'affirmatif à d'autres. Je ne comprenais pas cet acharnement du corps médical à nous faire un cours magistral sur le fonctionnement de notre corps à chaque consultation et à chaque question posée. Moi j'attendais simplement une réponse claire, nette et précise à une interrogation claire, nette et précise.

Une fois le professeur Elizabeth à cours d'arguments, elle sembla se décider à reprendre son rôle de sage femme. Ainsi, elle me posa diverses questions. Notamment si je sentais bien mon bébé bouger, si j'avais des contractions, des brûlures quand j'allais uriner. Toutes ces questions me mettaient légèrement mal à l'aise. Non pas que je n'étais pas habituée à y répondre, mais le faire devant Eric prenait une dimension différente. J'avais l'impression de souiller ce qui se passait entre nous avec mes réponses. Je jetai alors un coup d'œil inquiet vers lui. Il était là, assis, discret, un léger sourire sur les lèvres, me regardant avec douceur. Je me sentis quelque peu soulagée, bien que l'idée de mettre des limites à ce qui, dans notre couple, peut être dit ou non, entendu ou non, se rangea dans un coin de mon cerveau.

La jeune femme me demanda ensuite de m'installer sur la table d'auscultation et ferma les rideaux. Je lui en fus reconnaissante. Après la discussion dont Eric venait d'être témoin, je n'avais pas spécialement envie qu'il assiste à ce spectacle: Moi, les deux pattes en l'air, subissant un toucher vaginal pas plaisant du tout.

-Alors, le col est bien fermé, long. Ok! Tout est bon. Rassurez-vous, votre fils ne semble pas prêt à quitter le nid! Vous pouvez vous rhabiller.

Une fois prête, la sage femme me remit une ordonnance pour du fer et pour de nouvelles prises de sang et nous laissa partir.

-Ho mon dieu...C'était humiliant! M'exclamai-je une fois dehors sous le regard hilare d'Eric. Arrête de te moquer mon coeur!

-C'était...innovant comme sortie. J'ai particulièrement aimé la discussion sur ton pipi. Me charia-t-il avec un clin d'oeil.

Je lui donnai une petite tape sur le bras tout en maugréant dans mon coin. Il était encore tôt et on décida d'aller faire quelques courses. Marcher dans les rues au bras d'Eric me paraissait toujours aussi étrange. Je me sentais parfois encore un peu mal à l'aise, comme si tous les regards étaient rivés sur moi à me juger. Mais je m'y sentais aussi tellement bien que j'essayai de faire abstraction de cette étrange sensation. Même si je n'étais plus la fille volage et insouciante que j'étais encore il y a un peu plus de quatre mois, j'avais parfois du mal à avoir un autre regard sur moi-même. Attention, je n'étais pas malheureuse ou mal dans ma peau, bien au contraire, mais le fait d'avoir changé du tout au tout en si peu de temps était pour moi assez perturbant. Je prenais mes repères petit à petit dans cette nouvelle vie que j'adorais, mais il me faudrait encore pas mal de temps avant que tout cela me semble complètement naturel.

-Au fait Marion, j'ai quelque chose de prévu samedi soir. Voilà, mon frère se marie et nous allons fêter son enterrement de vie de garçon. On va certainement aller boire un verre avec tous ses amis.

-Pas de problème mon cœur, je devais faire une sortie avec Alice un de ces quatre, se sera l'occasion. Ne te bile pas pour ça.

Il en profita pour me parler un peu de sa famille. Il fallait aussi organiser une rencontre avec ses parents avant la naissance. Étant donné la situation, mieux valait ne pas trop tarder. D'après ce qu'il me disait, ils étaient plutôt ouverts et cool, mais je doutais fort que voir débarquer leur fils avec un bébé sous le bras leur plairait. Je n'étais déjà pas convaincue par le fait que ça ne les dérangerait pas de le voir arriver avec une fille enceinte au bras, qui plus est enceinte d'un autre, alors l'option après accouchement n'en parlons pas...

9 mois |Terminé|Où les histoires vivent. Découvrez maintenant