Le Relk : Sous les Légendes (part.1)

Jour 5 : Partie 3 : Un nouveau message

   Une fois retourné auprès des autres, je raconte nos épopées à Eileen dans l'espoir d'en apprendre plus sur le Dragon.

- Je n'ai jamais vu Zirnitra, Léo... s'extasie-t-elle. C'est une chance que vous ayez pu le voir !

- Je pense être le seul à l'avoir aperçu, sa tête émergeait des rochers.

- Zirnitra est surnommé le grand Dragon noir par son corps entièrement recouvert d'écailles noires et dures comme de la lave séchée. On dit qu'il passe la moitié de l'année dans sa demeure, que vous avez visiblement découverte grâce à Cha, et l'autre moitié à chercher les pierres précieuses du Relk. Une année, il a même attaqué Cryl à cause des pierres qui se cachaient dans de la ville.

Alors que son Chamoil remue vigoureusement la tête à l'énonciation du nom du Dragon, la mono ajoute :

- Il y a une pierre qu'il apprécie tout particulièrement, elle est appelée l'Ozestone. La légende de cette pierre raconte qu'elle a la particularité de renfermer les larmes des Jaspas. Et tu sais ce qu'on dit sur les larmes des Jaspes...

Devant mon ignorance, elle roule des yeux.

- Elles ont des vertus guérisseuses, dit-elle.

Alors Ethan passe son visage près de moi et lance d'une voix malicieuse :

- On dit aussi qu'elles ont des vertus séductrices... La personne à qui on les fait boire tombe sous notre charme.

Je fronce les sourcils et lance un regard interrogateur à la mono, qui émet un rire avant de lancer à Ethan :

- Arrête avec tes bêtises, ça n'a rien à voir. (Elle se tourne vers moi) C'est une rumeur qui a longtemps courue sur le continent, mais rien n'a été vraiment prouvé.

Ethan me fait un clin d'œil malicieux avant de faire avancer son Chamoil, et je le suis du regard jusqu'à ce qu'il arrive près de Hazel.

Tentant d'oublier ce qu'il a voulu me faire comprendre, je continue mon chemin, ignorant les remarques déplacées que fait Cha, qui semble avoir compris certaines choses.

L'image de Zirnitra hante mes esprits. En quoi le feu peut-il être une menace pour lui, Dragon ? Tout ça me dépasse.

Après quelque temps de marche encore, nous débouchons sur une petite clairière en bordure du Bois-Dormant. Une rivière y chemine entre les rochers, révélant un agréable clapotis. Nous descendons de nos montures et sommes un instant déséquilibrés.

- Vous avez devant vous la Rivière d'Ervil. Les cascades ne se trouvent pas très loin, mais nous aurons l'occasion de les voir plus tard. Nous allons faire une pause déjeuner ici-même.

Alors un seul regard que j'échange avec les gars et nous nous retrouvons en maillot de bain, prêt à sauter dans l'eau. Eileen nous retient un instant.

- Faites bien attention, cette rivière représente la frontière entre Cryl et Ervil. Il se peut qu'il y ai des Délios à traîner dans le coin.

J'acquiesce sans trop l'écouter ; je peux me défendre quand je veux et leur botter le derrière avec mes flammes. Alors nous sautons en bombe dans l'eau peu profonde et transparente, et commençons à nous battre comme des gosses, trop contents d'être dans l'eau si fraîche sous ce soleil de plomb.

Les autres ne tardent pas à nous rejoindre et bientôt, tout le monde est à l'eau. Je me bagarre avec Emma, qui commence à m'envoyer des rasades en pleine figure. Keziah a remarqué qu'on s'entendait bien, et je me fais un malin plaisir à déconner avec elle pour le faire rager. Je la prends en sac à patate sur mes épaules et la balance plus loin dans l'eau, en faisant attention à ne pas nous rapprocher des rochers de la berge.

Je vois plus loin Hazel rigoler avec Ethan. Secouant la tête, je fais demi-tour pour rejoindre les gars, qui s'amusent désormais à sauter dans l'eau depuis la liane qui pend d'un arbre, au-dessus du lac.

Mais en essayant à mon tour, une créature me percute violemment dans ma chute, et m'envoie dévaler l'autre côté de la berge. Je rencontre un tronc d'arbre et m'affale contre le sol de la forêt, sonné. Un regard autour de moi m'informe que je suis seul, en caleçon, au milieu de la forêt. J'essaie de trouver des traces de la rivière, mais ne la vois nulle part.

- Tu es perdu, Mohito ?

Mohito* ? Je tourne la tête en direction de la voix mais ne distingue personne dans les sous-bois.

- Qui est là ? je lance alors et ma propre voix résonne étrangement dans la forêt.

Un homme émerge alors entre les arbres et s'approche de moi. Dans l'obscurité, ses yeux étincellent comme deux rubis.

- Alors c'est toi, Léoden Alzac ? me demande-t-il.

Devant le mépris avec lequel il a prononcé mon nom, je lui lance un regard méfiant.

- J'ai une lettre pour toi, m'informe-t-il.

Il s'approche encore et me tend la main pour m'aider à me relever.

- Qu'est ce qui te fait rire ainsi ? me demande-t-il.

- Je ne sais pas qui vous êtes.

- Je m'appelle Eluen.

Le sourire sur mon visage ne parvient à s'effacer que lorsqu'il me tend la lettre, sur laquelle je reconnais l'écriture.

- D'où vient-elle ?

- Tu n'as pas besoin de le savoir, lis-la juste et donne-moi ta réponse.

Mon sourire revient faiblement. Quelque chose de cet homme m'effraie.

- Je ne vous fais pas confiance, dis-je alors.

Le Délios montre des dents.

- Je m'en tape, je ne te demande pas de me faire confiance, fulmine-t-il. Lis cette fichue lettre et déguerpis d'ici.

Je la lui prends donc des mains et l'ouvre.

Léo,

Si tu lis cette nouvelle lettre, c'est que tu es arrivé à Ervil. Je te propose de venir me rejoindre sur les terres des Délios, dans un endroit appelé le Blax Bel. Je te retrouverais là-bas et nous pourrons enfin discuter.

Tu sais comment me faire parvenir ta réponse.

H.

Je lance un regard à la créature face à moi.

- Pourquoi ne vient-il pas directement me voir ? je lui demande alors.

- Tu comprendras quand tu le verras.

- Et si je refuse ?

Son visage devient cramoisi et ses canines percent entre ses lèvres.

- Ainsi, je n'ai pas le choix, fais-je en brûlant le papier d'une flamme entre mes doigts, plus en guise de provocation que d'acceptation du rendez-vous.

Il ne me quitte pas des yeux, sentant la tension s'installer entre nous. Et deux pas en arrière marquent la fin de sa mission.

Quelques secondes plus tard, il a disparu.