12 | Intervention

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« Place de Bretagne » fit la douce voix du tramway.

– On descend, fit Marie en sautant dans la nuit.

– Sans blague.

Julien, peut-être était-ce son seul défaut, avait toujours tendance à se transformer en un grincheux bon à rien lorsqu'il était nerveux. Une attitude qui rendait Marie complètement folle et qui l'amenait chaque fois à prendre sur elle pour ne pas lui envoyer son poing dans la figure. Malgré les apparences, leurs deux ans de relation avaient laissé en eux des colères insoupçonnées.

Il faisait sombre. Le soleil était en train de disparaître derrière les immeubles de Nantes, et la rue se vidait petit à petit. Chacun rentrait chez soi. Ce soir là, soufflait un vent doux, presque chaud, et les deux électroniciens dont l'air caressait tendrement les visages, se sentaient presque bien dans cet atmosphère de détente et de solitude.

Au dessus d'eux, la tour se dressait magistrale et terrifiante. Noir sur noir. Immobile dans le ciel nocturne. Les quelque lumières jaunes qui scintillaient encore à l'intérieur ne suffisaient pas à la rendre amicale. Il y avait dans ce gratte ciel un certain air de cruauté, et les deux frissonnèrent lorsque leurs yeux se posèrent là, tout en haut de ce monument immense.

– Tu as compris toutes les étapes hein ? Lui demanda Marie.

– J'ai tout compris, me fais pas chier.

Marie réprima un violent coup de tibia dans la cuisse de son compagnon et serra les poings.

– Quand est-ce que tu vas cesser de faire le connard...

Ils marchaient à pas modérés sur la grand place plongée dans la nuit. Dans le silence, Marie montra du doigt une large ouverture sous la tour. Une descente sombre, seulement éclairée par des néons vacillant aux lumières blafardes.

– C'est le parking, fit elle.

– Espérons que tu ne te sois pas planté.

– Je me trompe jamais.

– Rectification. Tu ne t'es jamais trompé. C'est pas pareil du tout.

Pour le coup, Julien avait raison. Marie avait beau avoir placé la sécurité avant tout, avoir œuvré des jours entiers à vérifier les plans pour s'assurer qu'ils ne tombaient pas sur un nid de vigiles énervés, la probabilité qu'ils y restent dépassait largement les cinquante pour cent. Ce n'était pas du tout un fait à négliger.

Ce qu'ils cherchaient à faire, c'était placer un pare feu autour de la zone et ainsi inhiber toute tentative de seconde attaque de la part du criminel. Mais pour cela il fallait impérativement passer par un arrêt complet des systèmes. Comme cela, au redémarrage, le pauvre gars allait se retrouver avec des machines discrètement surveillées et absolument incapables de faire du mal à une mouche. On ne s'en doute jamais vraiment mais l'étape de démarrage d'une machine grouille souvent de failles de sécurité prêtent à être exploitées.C'était ça leur plan, couper le courant, laisser le temps à leurs complices de pénétrer le système et se tailler loin d'ici.

Prudemment, les deux se glissèrent dans le conduit souterrain lugubre. S'ils croisaient quelqu'un c'était foutu. Alors ils marchaient doucement en posant délicatement leur semelles sur le sol de béton blanc. Ne pas faire de bruit surtout. Ne pas faire de bruit.

Ils étaient au niveau moins un. Le local des générateurs de tension se trouvait au niveau zéro, c'est à dire dans la tour, et les deux avaient un mauvais pressentiment concernant le fait d'entrer complètement dans ce cube de la mort. Autour d'eux, des voitures en stationnement. Des dizaines de véhicules sales et immobiles qui semblaient les épier tous les deux.

NIRVANA [ EN PAUSE ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant