18 | Intrus

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La première chose qu'il vit lorsqu'il ouvrit les yeux fut la fine silhouette de Sophie, debout dans la lumière du soir. Émergeant de leur sommeil profond, les yeux de Noé mirent un certain temps à faire le point. Et progressivement, les lignes floues de son champ de vision disparurent pour ne laisser qu'un décor net, propre, sans bavures.

Il se trouvait visiblement dans un salon. Une pièce chaude, illuminée par un doux coucher de soleil. Ses membres lui faisaient mal. Il était attaché. Et les cordes rêches qui le comprimait contre la chaise de bois dur commençaient sérieusement à répandre des plaques rouges sur sa peau endolorie.

Mais tout ceci ne le dérangeait guère. La seule chose, sur le moment, qui aspirait son attention, était la jeune brune qui se tenait contre la fenêtre en le fixant de ses grands yeux verts. Depuis la chaise où il était retenu, Noé n'arrivait pas à déceler sur le visage de la demoiselle, la nature du sentiment qu'elle éprouvait pour lui. Il sentait de la méfiance, peut-être même de la colère, mais les mots qu'elle cracha soudainement à son visage furent bien plus blessants qu'il aurait jamais pu imaginer.

– Va crever...

Noé, sous le choc, déglutit douloureusement. Sa bouche était sèche et la phase de sommeil forcée qu'il venait d'endurer n'arrangeait pas les choses.

– J'ai rien fait, moi, répondit il d'un ton triste.

La jeune brune lui jeta un regard de mépris avant de lui tourner le dos pour poser ses yeux  désintéressés sur la ville qui grouillait au dehors.

– On verra ça avec les autres, connard. En tout cas tu vas payer pour ce que vous avez fait.

Elle ne dit rien de plus. Il était inutile qu'elle gâche de sa salive pour un vaurien de la sorte. Rien ni personne ne pourrait lui faire changer d'avis sur le jeune homme ligoté derrière elle. Il avait fait le mal et répandu la mort chez les autres. Elle se devait d'être sans pitié. Qu'il souffre lui aussi à présent.

Le silence qui retomba alors dans la pièce permit à Noé de remettre en question l'endroit où il se trouvait. A part les quelque meubles qui indiquaient que ses ravisseurs ne l'avaient pas traîné dans une cave humide et isolée, le pauvre garçon ne disposait d'aucun autre indice lui permettant de deviner son actuelle localisation. Il ne savait pas combien de temps il avait dormi, ne reconnaissait pas les toits, au loin, à travers la vitre. Il était complètement perdu.

Soudain la porte s'ouvrit et entrèrent dans la pièce cinq jeunes personnes toutes plus différentes les unes que les autres. Noé leur lança un air méfiant tandis qu'ils prenaient place autour de sa chaise. Il y avait deux femmes ; une rousse et une blonde, ainsi que trois hommes, dont deux qui semblaient fortement ne pas avoir dépassé la vingtaine. Le détenu les dévisagea les uns après les autres avec ce regard craintif qui semblait demander qui d'entre eux allaient lui passer la corde au cou.

– Détends toi, petit. Maintenant qu'on est au chaud tu vas pouvoir parler tranquillement, fit la rousse dans un ton à mi chemin entre la colère et le réconfort. Je m'appelle Marie. Toi ?

– Pierre Petit, fit Noé sans hésitation. Mais je vous dis, je n'ai rien fais de mal.

Les autres le regardèrent sans grande considération. Au fond, il n'était qu'un subordonné sans importance, seulement bon à donner quelque informations.

– Et ça fait combien de temps que tu bosses pour l'OCAPI ?

– Depuis toujours. Enfin, depuis qu'elle est née.

Sophie claqua son poing sur la vitre.

– Il a participé à l'attaque de l'hôpital, ce chien !

NIRVANA [ EN PAUSE ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant