Tara pliait ses vêtements avec un goût d'inachevé dans la gorge. Son frère lui avait terriblement manqué et après avoir mûrement réfléchi, Tara songeait sérieusement à réintégrer le centre.
- Je pourrais peut-être réintégrer le centre ?
Son frère se redressa de toute sa hauteur. Il n'avait pas l'air de cet avis.
- Je ne supporte plus de te voir dans cette chambre Tara, dit-il avec humeur ; Tu n'es pas folle.
- Je ne veux pas être la sœur qui s'insinue dans la vie de son frère, rétorqua Tara en se relevant du lit ; Que vas-tu faire si je reste à jamais enfermé dans ta maison ?
- Je vais t'aider trésoro, assura-t-il d'une voix grave et ferme.
Comment ne pas pleurer devant cette détermination ?
Comment cet adolescent avait-il pu s'émouvoir de cette petite fille cachée derrière son lit ? Aucun lien du sang ne les reliait, et pourtant, Klaus se comportait comme un véritable frère. Il avait soulevé l'Italie pour retrouver son agresseur et il était mort sous la force de ses mains. Elle lui était tellement redevable qu'elle avait du mal à s'imaginer dans sa villa, au milieu du bonheur qu'il méritait.
- Tu as déjà tant fait pour moi, murmura-t-elle en fermant les yeux.
Klaus ne répondit rien.
- Et je continuerais jusqu'à ma mort, affirma-t-il en inclinant sa tête ; Toi et Meredyce vous êtes ma vie, ne l'oublie jamais cara.
Esquissant un léger sourire, Tara termina de plier les vêtements qu'elle n'avait jamais utilisé et inspira profondément.
Le soleil filtrait dans la chambre et alors que le silence regagnait la pièce peu à peu, une haute et sombre silhouette se découpa subitement dans l'encadrement de la porte. Tara observa les chaussures du visiteur puis remonta lentement son regard sur les longues jambes de l'inconnu. Elles étaient musclées, incroyablement longues et dans cette interminable observation, Tara remonta doucement sa paire d'yeux sur le torse robuste de l'homme. Solidement charpenté, une chemise noire enfermait une musculature impressionnante. À mesure qu'elle détaillait le profil de l'homme, Tara sentit une boule se former au creux de son estomac. Car quand elle arrima son regard au sien, elle hoqueta le seconde suivante. L'inconnu n'était autre que le souverain en personne. Son nez aquilin, son profil redoutable, sa bouche sévère et ce regard froid.
Mon dieu !
Tara fit un bond en arrière ce qui alerta son frère. Mohammed réprima un soupir désespéré et ferma temporairement les yeux. La réaction de la jeune femme entait telle qu'il l'attendait. La peur marqua ses traits fins. À présent, il était comme les autres hommes, il était tout ce qu'elle fuyait. À partir de maintenant Mohammed était la peur vivante de la jeune femme.
Si elle avait pu sauté par la fenêtre elle l'aurait probablement fait, songea-t-il en déviant son regard vers le frère de cette dernière. Ce n'était pas exactement le profil qu'il attendait. Klaus Kreighton serait une difficulté supplémentaire. Il se posta devant sa sœur en le considérant froidement.
- Bonjour Tara, dit-il se pénétrant dans la chambre.
La jeune femme ne lui répondit pas. Elle le voyait comme un ennemi et Mohammed ne pouvait lui en vouloir. En revanche, il s'en voulait de ne pas pouvoir quitter cette chambre en lui souhaitant bon voyage. Le plus sage serait de la laisser partir. Elle ne représentait rien pour lui. Alors pourquoi se refusait-il à partir ?
- Klaus Kreighton, se présenta l'homme avec froideur ; Je sors de prison pour meurtre.
Il lui tendit sa main, sans le quitter des yeux. Le message était précis. Le frère de la jeune femme venait d'ouvrir les hostilités et si jamais il y répondait, il perdrait toutes ses chances qu'il laisse sa sœur dans son pays.
- Mohammed Al Zahar, je sors d'une longue convalescence.
Ils se serrèrent la main sans se quitter des yeux.
- Vous partez ? Demanda-t-il en faisant mine d'en être surpris.
- Le séjour s'achève, répondit Klaus en regardant sa sœur brièvement ; D'ailleurs je tiens à vous remercier pour les avoir accueilli si gentiment.
Mohammed esquissa un léger sourire au moment même où Tara pencha sa tête pour le dévisager.
Mohammed avait toutes les raisons de mettre un terme à cette conversation. La jeune femme était terrifiée, son passé chaotique se lisait sur son regard et son jeune âge lui donnait la désagréable impression d'être un pervers. Il haïssait les femmes depuis son mariage avec Amalia. Et malgré toutes ces raisons, Mohammed déclara :
- Je viens justement de m'entretenir avec madame Thomas. Je souhaiterais offrir aux filles un délai plus large.
Il marqua une pause dans laquelle le frère de la jeune femme fronça légèrement des sourcils.
- Les filles n'ont pas eu assez de temps pour se familiariser. De plus, madame Thomas ne s'en sort pas toute seule, c'est pourquoi une équipe s'apprête à venir lui prêter main forte.
- Combien temps ? Demanda-t-il sèchement.
- Deux mois, afin qu'elles puissent jouir des activités qui leurs seront proposé.
Klaus Kreighton posa son regard sur sa sœur cachée derrière lui. Mohammed eut bien du mal à ne pas s'imposer comme il le faisait chaque fois qu'on lui refusait quelques choses. Les yeux bleus de la jeune femme se posèrent enfin sur lui. Il n'avait jamais rien vu d'aussi comparable. Elle était petite, frêle, incroyablement timide. Elle avait de la terre sur le visage, son teint nacré usé par le travail, échauffé par le soleil.
- Ce choix revient à Tara, déclara Mohammed sur un ton calme ; Elle est libre de rester ou de partir.
Impassible Klaus Kreighton inclina silencieusement de la tête.
- Nous allons en discuter.
Mohammed demeura à son tour impassible. Il capta son regard et inclina sa tête.
- Mademoiselle...
Alors qu'il s'effaçait déjà, il entendit son frère lâcher un chapelet de jurons en Italien. Mohammed comprit que sa mission serait bien plus compliquée qu'elle ne l'était déjà.
Tara fixait l'entrée de la chambre, immobile. L'homme qu'elle avait jadis connu dans un fauteuil roulant n'était pas celui qu'elle venait de confronter. Il si était grand, si majestueux, chargée d'une puissante à la hauteur de son nom.
- Tara ? Tu le connais ?
Troublée, Tara hocha de la tête. Son ventre était noué, sa bouche sèche. Elle avait l'impression d'être happée par une force mystérieuse. Voilà pourquoi il était parti si longtemps. Pour achever sa rééducation. Et maintenant, Mohammed Al Zahar était redevenu un homme capable de se déplacer, capable de dominer chaque détail de sa vie. Non, il n'était pas un homme. Il était bien pire que cela. La force émanant de lui n'était pas comparable. Tout en lui inspirait une impression de force et de virilité indomptables.
- Il a été très gentil avec moi l'autre jour, murmura-t-elle à son frère.
- Alors pourquoi tu sembles terrifiée ? Demanda-t-il d'une voix grave.
D'une main tremblante, Tara se passa une main dans ses cheveux.
- Parce que la dernière fois il était dans un fauteuil roulant, expliqua-t-elle en s'entourant de ses bras ; J'ai été surprise de le revoir sous un angle différent.
Non elle n'était pas surprise elle étais complètement bouleversée.
- Tara, est-ce que cette proposition te semble acceptable ou tu veux rentrer avec moi ?
Devant ce choix cornélien, Tara resta muette, incapable de choisir entre la raison et cette force indomptable qui l'a poussé à accepter cette proposition.
VOUS LISEZ
La promesse du désert
Romance- Etes-vous muette ? Devant cette question, Tara se mit à trembler. Depuis ce soir d'été où sa vie a basculé, Tara tente de survivre chaque jour sans le moindre espoir en perspective. Mais alors qu'elle séjourne au Khazban avec le personnel de sa c...