La promesse du désert

Chapitre 66

Mohammed avait la sensation que l'on venait de lui planter une lame en plein cœur. Allongée sur un lit couvert de draps immaculé de blanc, la jeune femme cherchait désespérément sa présence, les yeux bandés par un pansement taché de sang.

《 S'il lui arrive quelque chose je vous tuerais ! 》

Les menaces de Klaus Kreighton lui revinrent en mémoire. Il refusait d'avancer vers elle, incapable de prononcer un mot. Elle avait l'air si faible et si menue et pourtant...son corps se bataillait farouchement. Un énorme hématome sillonnait sa mâchoire. Elle avait les mains posées sur son ventre là où son enfant grandissait depuis plusieurs semaines sans qu'aucun des deux ne le sache.

- Tout est de ma faute, finit-il par dire en fixant sa poitrine se soulever à mesure que sa respiration s'accélérait.

Elle tendit sa main dans le vide, cherchant désespérément la sienne, plongée dans l'obscurité. Le cœur brisé, Mohammed s'avança pour prendre cette main fragile et suspendue dans le vide.

- Je suis en vie, murmura-t-elle d'une voix qui trahissait l'inquiétude qu'il pouvait lire sur ses lèvres tremblantes.

- Tu es...

Mohammed ne parvint pas à poursuivre ni même à réaliser qu'elle ne voyait pas.

- C'est temporaire, murmura-t-elle avec un vague sourire au bord des lèvres.

Les mâchoires serrées, Mohammed embrassa l'intérieur de sa main. Il laissa des larmes couler sur son visage sans prendre la peine de les essuyer.

- Je suis tellement désolé, murmura-t-il d'une voix qui se mit à trembler sans qu'il puisse la contrôler.

Elle poussa un gémissement de douleur, la tête toujours penchée sur le côté comme si elle essayait de le regarder dans les yeux.

- Rien n'est de ta faute Mohammed je...

- Je connaissais Raoul, coupa-t-il brutalement ; J'aurai dû me méfier de lui bien avant.

Elle inspira profondément en serrant sa main.

- Où est-il ? Demanda-t-elle d'une voix tremblante.

- Il a été arrêté, envoyé en prison, mais je vais le tuer...je vais lui arracher le cœur, siffla-t-il en caressant précautionneusement ses cheveux.

Elle déglutit avec difficulté. Les grimaces qu'elle esquissait étaient un déchirement au cœur.

- Anaya ? Ton garde ? Comment vont-ils ?

Mohammed embrassa son front avant de lui répondre. Elle s'accrochait à sa main comme à une bouée de sauvetage. Alors il se promit de ne plus la quitter.

- Anaya est légèrement blessée son mari est avec elle. Ahmed est encore au bloc opératoire.

- Oh mon dieu, murmura-t-elle d'une voix empreinte de culpabilité.

- Ahmed est un fier gaillard, il va s'en tirer, lui assura-t-il en déposant un baiser au creux de sa paume blessée.

- Et le bébé ? Es-tu au courant pour notre bébé ? S'enquit-elle en hoquetant.

Le bébé....Mohammed ne parvenait pas à inclure dans son cœur meurtri cette part de bonheur. Il comprit bien trop tard que c'est à cette nouvelle qu'elle se raccrochait pour survivre à son infirmité. Mohammed n'avait pas le droit de lui retirer cet espoir qu'il imaginait dans ses magnifique yeux.