La promesse du désert

Chapitre 73

Lorsqu'elle entendit la magnifique musique, le premier réflexe de Tara fut de vouloir retirer son bandage mais Mohammed l'en empêcha. Les mots moururent dans sa gorge. Des larmes accompagnaient la fabuleuse mélodie qu'elle n'avait jamais oublié.

- Quand je vous ai vu entrer dans ma boutique j'ai crû que je rêvais, déclara le vieil homme d'une voix tremblante.

Tara sanglota en reconnaissant la voix de l'antiquaire. Malgré les années passées, elle se souvenait de sa voix comme si c'était hier.

- C'est vous, souffla-t-elle la gorge nouée ; Mais comment...je...

- Comment aurais-je pu oublier votre visage ? Comment aurais-je pu oublier cette nuit ?

Tara aurait pu s'effondrer si Mohammed ne la tenait pas par la taille. Elle ne le voyait pas mais entendait la voix du vieil homme trembler.

- Je regrette tellement, murmura-t-il d'une voix émue ; Si j'étais resté plus longtemps...

- Oh mon dieu non ! S'écria Tara en sentant des larmes ruisselaient sur ses joues ; Vous n'avez pas à vous en vouloir.

Mohammed était le seul à pouvoir voir le visage de cet homme et en eut le cœur déchirer. Son expression reflétait de la culpabilité, une énorme peine. Il était affaibli, cherchant ses mots.

C'était un véritable déchirement.

- Quand je suis rentré chez moi ce soir-là et qu'il parlait d'une jeune fille agressée près de l'église catholique, j'ai tout de suite su au fond de moi que c'était vous.

Le vieil homme marqua une pause pour s'approcher d'elle.

- Pendant des jours et des jours j'ai hésité à venir vous rendre visite à l'hôpital mais je n'ai jamais trouvé la force suffisante pour y aller.

Instantanément, des larmes lui montèrent aux yeux.

- Alors j'ai retiré cette boîte à musique de la vente et je l'ai gardé précieusement dans l'espoir qu'un jour, je vous reverrais.

Tara ferma les yeux au plus fort en se remémorant la magnifique ballerine illustrée d'or qui l'avait fascinée au point de...

- Je me souviens de cette jeune fille regardant rêveuse cette boite à musique mais qui ne pouvait pas se l'acheter.

Tara sentit la main tremblante de l'homme saisir la sienne.

- Elle a vous maintenant, murmura-t-il d'une voix émue ; elle vous appartient désormais.

- Oh mais...je ne peux pas accepter ! S'exclama-t-elle en hoquetant.

- C'est un cadeau habibti, murmura Mohammed en caressant ses beaux cheveux.

- Acceptez mon enfant...

L'antiquaire lui prit la main pour lui faire toucher la boite à musique. Des émotions intenses la saisirent à la gorge. Elle la cala contre sa poitrine par peur de faire tomber cette précieuse boite à musique. Tara aurait dû la refuser...elle aurait dû se rebuter à l'idée de tenir dans ses mains ce qui avait tardé son départ....ce qui avait fait d'elle la proie facile de ce monstre. Mais au lieu de ça, Tara la garda précieusement contre elle, incapable de maîtriser ses larmes.

- Merci infiniment, murmura-t-elle en essayant de trouver sa main dans l'obscurité.

Après toutes ces années Tara gardait une image très précise de cet homme.