Chapitre 4.2

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Tout compte fait, j'avais bien des crocs, -de ceux qui s'allongent au besoin-, et Kilian grogna de douleur quand ils s'enfoncèrent dans sa chair. Bien fait pour lui.


Du sang gicla et se répandit dans ma bouche. Pendant un instant, je me figeai, vaguement dégoûtée par ce que je venais de faire. Je n'osais pas respirer, et encore moins déglutir.


Puis la faim qui me tenaillait revint en force, et un instinct qui ne m'appartenait pas prit le dessus.


Je me mis à boire sans réfléchir.


Ça n'avait pas vraiment le goût du sang. Ça avait plutôt goût de...pouvoir.


Le picotement familier qui s'éveillait au contact de la magie s'épanouit dans mon ventre. Ça ne me surprit pas vraiment. Kilian était un Touché, et plutôt puissant avec ça. C'était une des raisons pour laquelle je m'étais réfugiée chez lui. Ce qui m'étonna en revanche, ce fut de sentir ce picotement grandir, sans s'arrêter, jusqu'à devenir une résonance basse et tendue, un bourdonnement qui fit vibrer tout mon corps.


À ce moment, je crus qu'elle allait s'arrêter, se contenter de rester là à pulser telle une onde basse coincée sous mon crâne, mais non. À partir de mes crocs plantés dans le bras de Kilian, je sentis la résonance enfler et s'étendre, puis, presque comme si elle était douée d'une volonté propre, remonter, jusqu'à envahir son corps à lui.


Kilian grogna. Je crois qu'il était aussi surpris que moi, mais il ne se dégagea pas. Je réalisai alors que j'agrippais à présent fermement son poignet de mes deux mains, comme pour l'empêcher de s'enfuir. Je ne m'en étais pas rendue compte.


La tension monta encore. Ce n'était pas douloureux, juste...puissant. À l'image de cette bouffée d'exaltation délicieuse qui peut nous prendre parfois, qui nous donne envie de hurler ou de courir à en perdre la raison, parce qu'on ne sais pas si, en ne faisant rien, elle ne finira pas par nous déchirer de l'intérieur.



Alors, il y eut comme un déclic, et tandis que la résonance finissait d'envahir totalement le corps de Kilian, je pus toucher sa magie.


C'était étrange. Et délicieux. Comme si je me nourrissais de son énergie pure. J'avais déjà perçu le pouvoir de Kilian auparavant en quelques occasions, mais jamais avec autant d'intensité, jamais avec autant de détails.


Et des détails, il y en avait. La magie de Kilian ressemblait à de la dentelle fine. Souple et délicate, pleine de petits nœuds et d'entrelacs savamment orchestrés en une toile complexe et sublime. Un enchevêtrement de fils de soie gorgés de pouvoir.


Je ne pus pas m'en empêcher, je me vautrais dedans. C'était beaucoup trop bon.


Je ne sais pas combien de temps nous restâmes comme ça, allongés sur le carrelage de la salle de bain. Une poignée de secondes, ou plusieurs longues minutes ?


Mais la vibration enfla encore, jusqu'à devenir presque insupportable, oscillant entre plaisir et douleur.

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