Chapitre 6.1

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Pour la deuxième fois en deux jours, mon réveil fut quelque peu... Délicat.


Une douleur sourde m'oppressa les tempes avant même que je n'ouvre les yeux, et je poussai un grognement digne d'un troll des forêts. Je roulai sur le côté, cherchant à tâtons l'interrupteur de la lampe de chevet. La lumière pourtant douce me fit plisser les yeux.


Sans surprise, j'étais toujours dans le lit de Kilian. Il s'était installé dans l'ancienne chambre de ses parents mais, à l'instar de la cuisine, il avait complètement revisité la décoration. Le contraire m'aurait paru carrément glauque, si vous voulez mon avis.


Je n'avais jamais remis les pieds dans cette pièce après leur mort, mais je me souvenais des lumineuses nuances d'ocre qu'avait choisi sa mère, éclairées par une grande porte vitrée s'ouvrant sur une petite terrasse avec vue sur le jardin, à l'étage. Je n'avais même pas remarqué que Kilian avait gravi les escaliers pour me porter jusqu'ici, pendant ma petite crise d'hystérie.


Il était resté dans les couleurs chaudes, mais avec des teintes plus sombre, plus modernes, relevées de quelques touches piquantes ça et là qui contrastaient avec le reste. En face du lit, un pan entier de mur était peint en taupe, sur lequel il avait accroché un imposant tableau noir et blanc tout en longueur. De grands coups de pinceaux sombres traversaient la toile blanche, me rappelant un peu les étranges fouets charbonneux de Kilian. C'était probablement pour ça qu'il l'avait choisi, d'ailleurs. C'était un peu trop agressif à mon goût, mais ce n'était pas moi qui devait m'endormir devant tous les soirs, alors bon...


Je m'assis en gémissant, et posai les pieds sur le grand tapis bordeaux qui s'étalait sous le lit, par dessus une épaisse moquette crème déjà moelleuse. Monsieur tenait à son petit confort. Ou alors c'était moi qui était d'humeur grincheuse parce qu'encore une fois, je me réveillais toute courbaturée et la tête plus pesante qu'un chariot de melons. J'avais la vilaine impression d'avoir la gueule de bois...sauf que j'aurai clairement préféré avoir fait la fête la veille.


Il faisait nuit dehors, et la lampe de chevet diffusait une lueur chaleureuse et accueillante dans la pièce. J'avais vraiment envie de retourner me planquer sous les couvertures quelques minutes -ou même quelques mois- supplémentaires.


J'étais en train de retourner l'idée tentante dans ma tête, quand j'entendis des voix dans l'escalier.

Évidemment. Avec un loup-garou à l'affût dans la maison, impossible de gémir tranquille cinq minutes...


La porte s'ouvrit sur Kilian, suivi de près par la silhouette de Grey qui le dépassait d'une tête sans forcer. La lumière trop vive du plafonnier s'alluma sans prévenir, et j'étouffai un cri en fermant les yeux, puis tirai vivement le beau couvre lit bordeaux sur ma tête pour m'en protéger.


- Alors princesse, ça va mieux ?


Je grommelai quelque insulte incompréhensible à travers le tissu. Kilian et ses piques sarcastiques étaient de retour. Mon ami avait semble-t-il décidé que le quart d'heure « douceur et délicatesse » était révolu.

Chouette.

J'avais envie de ramper sous le lit maintenant. Mais peut-être savait-il aussi bien que moi que s'il ne me secouait pas un peu, je ne sortirais jamais de cette chambre. Pas volontairement du moins.

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