XIX

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— Pas maintenant, chuchota Yoongi.

Je le dévisageai un instant avant de plier la feuille et de l'enfouir dans ma poche.

Difficile ensuite de se concentrer sur les autres textes. Yoongi me tendit une nouvelle page. Son poème sur le piano ; il l'avait retravaillé comme je le lui avais suggéré, par vers courts et espacés.

— Ravi de voir que tu fais ce que je te dis! m'exclamai-je d'une voix suffisamment forte pour que sa mère nous entende.

La séquence couleur de Lisa nous plut beaucoup. Jungkook nous avait remis le début d'un texte... correct. On a encore discuté sur le récit de Chanyeol. Le papier bleu au fond de ma poche pesait de plus en plus lourd. Un courant d'air froid s'engouffra dans la pièce. Mme Min.

— Yoongi, mon chéri? N'oublie pas ta leçon de chimie. Elle se tourna vers moi. Yoongi espère tellement faire médecine... euh... Hoseok.

Yoongi ne m'adressa pas un regard.

[...] À peine arrivé dans «notre» ruelle, je sortis le papier bleu de ma poche.

Pour Hoseok.

C'est plus facile d'écrire que de parler. Je suis désolé de ce qui s'est passé hier dans la ruelle.

Je regardai autour de moi, m'attendant presque à le voir là, les yeux posés sur moi.

Je suis terrifié à l'idée que si les autres apprennent la vérité, ils me prennent pour un cinglé et ne veuillent plus ni me voir ni me parler.

Je me suis affolé, quand j'ai compris que tu avais découvert ce que je faisais. En même temps, c'était formidable de pouvoir en parler à quelqu'un. Après, je me suis senti beaucoup mieux mais malgré ça, je suis retombé dans le piège.

Tu es le seul à savoir. Papa est adorable, mais trop occupé, il ne voit jamais rien. Quant à Maman, elle est obsédée par une seule chose, que je profite de toutes les chances qu'elle n'a jamais eues. Je ne peux rien leur dire.

Je ne veux plus faire ça, et en même temps lorsque je me fais mal, c'est le seul moment où j'ai le sentiment d'avoir mon mot à dire. D'une certaine façon, cela rend les choses moins effrayantes.

Je sais que tout ça peut sembler stupide et tu vas sûrement me prendre pour un fou. Si tu ne veux plus qu'on se voit, je comprendrai. Merci de m'avoir écouté et merci d'être mon ami.

Yoongi

P.-S. : J'aime vraiment tes poèmes.

À la maison, j'ai relu sa lettre jusqu'à la savoir par cœur. Après j'ai enfourché mon vélo et sillonné les collines dans toutes les directions jusqu'à la tombée de la nuit. Du coup, j'ai dû rentrer par les sentiers pédestres. Quelques promeneurs ont protesté, mais sans attirer mon attention! Ils s'imaginaient peut-être qu'ils couraient un danger!

J'ai relu la lettre pour la dixième fois. Puis les poèmes d'un type que j'avais découvert à la bibliothèque. Il y en avait un, notamment, sur une jeune fille en train de marcher «Étincelante lame de lumière dans l'éclat du soleil». Yoongi aurait pu ressembler à ça, si seulement...

[...] Vendredi matin, je quittai la maison en laissant derrière moi deux adultes exaspérants de bonne humeur. L'été touchait à sa fin : matinées fraîches et journées lourdes.

Alors que j'approchais du lycée, une silhouette enjouée, décidément, m'apostropha.

— Salut, Hope!

Depuis quelques jours, Taehyung m'affublait de ce diminutif stupide.

— Ça marche pour samedi après-midi?

FAUSSE NOTE yoonseokOù les histoires vivent. Découvrez maintenant