La (véritable) histoire de la cigale et la fourmi

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Depuis toujours on a menti

Sur la cigale et la fourmi ;

On vous a raconté des fables

Où la fourmi est bien affable,

Gentille et travailleuse,

Ha oui, la bonne blague !

C'est une dépouilleuse :

La fourmi au goulag !

Aujourd'hui il est plus que temps

De dénoncer les charlatans :

Je remets les pendules à l'heure

Et vais redonner son honneur

Au Cigalon, pauvre chanteur,

Contre tous ses calomniateurs !

En vérité mes chers amis,

Rien de pire que les fourmis !

La cigale est bien brave,

Elle chante et bois, espère,

Mais n'aura pas d'hiver

Autre qu'en tant que larve ;

Cachée au creux des radicelles

Elle remplira son escarcelle :

Sous terre et sur l'érable,

Quel besoin improbable

De grains, de vermisseaux ?

Elle boit direct au bon tuyau

En choisissant son arbrisseau.

Adulte, du pareil au même :

Y'a plus de jus ? Pas de problème !

On va plus loin, et voilà tout,

Mais la fourmi la pousse à bout :

Sans sommation elle la harcèle,

Lui fait jouer la balancelle

Pour lui voler ses trous à sève.

Si par malheur elle l'attrape

C'est ni une ni deux : elle frappe

Et pour la dévorer, l'achève !

Pauvre de moi, car mes yeux saignent :

Les bêtises qu'on vous enseigne

Sous le couvert de La Fontaine :

Chanson, point ! Prenez de la peine !

Vraiment, qui donc est le mendiant ?

La vérité est ennuyeuse :

Oui, la cigale est travailleuse,

Et la fourmi va la volant

Ou même mieux, la dévorant !

Alors je dis aux bien-pensants :

La peste soit de vos morales,

Moi je les trouve immorales !

Laissez crever bien sagement

Qui vient vers vous l'âme bohème

Et ceux qui chantent leurs poèmes,

Ou mieux encore, les indigents ?

Ha oui, vraiment ? C'est affligeant !

Surtout gardez bien votre argent

Vos grains et toutes vos bassesses

Étouffez-vous de vos richesses,

Crevez donc sur votre trésor !

J'irai chanter et boire encore,

Car c'est la fourmi qui a tort,

Moi la cigale je l'adore !

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© Clelia Maria CASANOVA – 13 mai 2018



Et voilà, chose promise, chose due ;-)  Poème sous forme de fable (si, si...) ; en partie en vers de 8 syllabes, ou en vers de 6 syllabes (normalement... ^^").

Les cigales appartiennent à l'ordre des Homoptères (qui signifie « ailes homogènes » : en gros leurs ailes sont entièrement membraneuses). Elles ont un rostre, qui leur permet de « forer » des trous dans les écorces des arbres, et n'ont donc aucun besoin d'être nourries par qui que ce soit, fourmis y compris.  Et la cigale meurt avec l'été... L'hiver elle n'existe que sous forme de larve, qui elle vit sous terre, et se nourrit sur les racines, toujours grâce à son rostre.

Et oui, les artistes peuvent gagner leur vie tout seuls, et même engraisser au passage plus d'un profiteur vivant de leurs talents, n'est-ce pas ?

Dédié à ma cigale préférée, bien entendu : Okubo-sama ;-)

Par contre ce poème est LONG :-D Après ça, vous risquez de manger du haïku souvent O:-), le temps que je me remette de son écriture... Mais on verra bien ! ;-)

En Vers et contre tousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant