Chapitre 4 : Catori

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Ce matin était particulièrement chaud, même pour un esprit survivant du désert chimique. La chasse y devenait presque impossible, bien que ça ne changeait pas vraiment les probabilités habituelles. Il fallait toute fois se rapprocher de la forêt si on voulait espérer attraper un rat ou tout autre organisme vivant, soit-il ravagé par l'apocalypse ou non.

Catori n'était pas un esprit très grand mais fort habile quand il s'agissait de dresser ou de chasser des êtres. Elle avait ainsi acquis l'amitié d'un Makawee. Il portait ses flèches, son sac de couchage cousu avec amour durant sa première nuit dans le désert et tout le reste de ses affaires. Personne n'a jamais connu la vie d'un monstre pareil avant Catori.

Tous les deux, côte à côte, ils avançaient vers le Sud. Parfois ils tombaient sur des toits de maisons qui émergeaient du sable brûlant, parfois il y avait des pneus, des portières, des radius, des fémurs,... A deux kilomètres de leur destination, Catori s'est arrêtée net. Elle venait de sentir une odeur plutôt anormale par ces temps.

- Attends ! Ça sent l'humain !

Le Makawee n'a fait que pousser un grognement las en retour. Il avançait toujours comme s'il n'en avait rien à faire de ce que pouvait raconter Catori. Le problème n'était pas la compréhension, les Makawees comprennent tout, il avait simplement autre chose en tête pour y faire attention.

- Non t'as mal compris, je voulais dire le VRAI humain ! Pas comme ces carcasses pourries, - a expliqué Catori en désignant son corps.

Mais son ami était déjà assez loin pour ne pas l'entendre. Il était presque arrivé en haut de la dune qui se dressait devant eux. Catori a piqué un sprint pour le rejoindre, elle avait complètement oublié la règle qu'elle a établie lors de leur dernier voyage vers la forêt. "Ne jamais courir sur les dunes, on ne sait jamais ce qu'il peut se trouver en dessous", - avait-elle décrété. Quand elle s'en est enfin rendu compte, il était beaucoup trop tard. Elle était passée à travers une vitre brisée d'immeuble et dévalait maintenant un nombre inconnu d'étages étant donné que le bâtiment était en pente. Elle allait devoir trouver un tunnel ou remonter par là d'où elle était venue. La deuxième option allait être compliquée étant donné qu'elle n'avait qu'une lampe torche sur elle. Une fois en bas, elle se sentait tout à fait sereine. Les ongles encastrés dans les murs, les traces de sang sur les poignets de portes, les intestins par terre, tout cela elle en avait vu assez pour s'y habituer.

La seule chose qu'elle n'avait pas prévue c'était qu'un immeuble pareil pouvait regorger de ces bêtes dégoutantes, appelées "iwiiwi". Peut-être est-ce à cause du bruit qu'ils font qui ressemble assez fort au grincement d'un doigt sur une vitre. D'autres disent que c'est venu d'un peuple Hawaïen s'étant réfugié il y a quelques temps dans les environs. Apparemment, les petits monstres ressemblent à des tas d'os lorsqu'ils sont couchés. Catori en voyait partout, c'était pratiquement impossible des les distinguer d'un vrai tas d'os immobile.

Elle continuait son aventure dans le fond de la tour quand elle est tombée sur un énorme orifice, dix fois plus haut qu'elle, éclairé par les quelques rayons de lumière qui peinaient à arriver pleinement jusqu'en bas. Ça avait l'air d'une ancienne ligne de métro, bien que les cartes dont elle a fait connaissance peu de temps avant indiquaient clairement qu'il n'y en avait jamais eu par ici. C'était peut-être une ligne clandestine, inconnue de la populace.

Catori a dû marcher pendant plus de 20 minutes avant d'entendre des premiers signes de vie. A sa droite, se trouvait une petite porte d'à peine un mètre carré. Il y faisait sombre mais un être ou un objet n'arrêtait pas d'y faire du bruit. Elle s'est approchée en espérant trouver autre chose qu'une suite de tunnels interminable. La porte semblait bloquée, même en fonçant dessus Catori n'a pas réussi à l'ouvrir.

Elle avait perdu la notion du temps. Marcher, marcher et encore marcher, c'est tout ce qu'elle savait faire. Elle allait laisser tomber mais elle a entendu des bruits de pattes sourds derrière elle. Pourtant, quand elle s'est retournée, il n'y avait personne. La porte, par contre, semblait légèrement entrouverte. Elle a fait demi-tour pour découvrir ce qu'il s'y trouvait, elle a passé son nez pour s'aider des odeurs mais quelque chose l'a attrapée par les cheveux et l'y a entrainée toute entière. Le sol éraflait sa peau, tant bien que mal elle essayait de se débattre mais en vain. La chose l'avait jetée dans une cage dans le noir le plus complet.

Pendant ce temps, le Makawee continuait sa route, il ne s'inquiétait pas pour Catori. Elle s'en est toujours bien sortie. Il ne restait plus que 3 ou 4 km jusqu'à la forêt. Il était fatigué, il manquait d'eau. Et tout le monde sait qu'un Makawee ne doit jamais s'énerver. Il a commencé à grogner de plus en plus. Puis, un peu plus loin il a vu deux silhouettes. Il ne les voyait pas très bien mais il savait qu'elles étaient bien réelles. Il marchait de plus en plus vite pour les attraper.

Quand il n'était plus qu'à 20 mètres d'eux, il a vu que c'étaient un homme et une femme. Cette dernière essayait de lui parler mais l'homme, qui était face au Makawee, a tellement écarquillé les yeux qu'on aurait cru qu'ils allaient sortir de leurs orbites. La petite s'est tournée vers lui tête baissée. Elle n'a eu que le temps de pousser un cri avant de se retrouver en l'air dans la main en métal géante du monstre. Il n'avait qu'à légèrement compresser ses doigts pour l'écraser complètement. L'homme, lui, était choqué à tel point qu'il n'a pas bougé d'un poil. Ils allaient mourir tous les deux. La proie du Makawee manquait d'air et s'est évanouie, il a alors perdu tout intérêt pour elle et l'a balancée par terre. Il s'en est donc pris à l'autre pauvre créature qui ne bougeait toujours pas. De ses énormes doigts il l'a soulevé par les deux bras et a commencé à les étirer. Quand sa peau s'est déchirée d'un centimètre, il a pu entrevoir un tissu semi-transparent et bleu. Son visage s'est dédoublé et son sang s'écoulait peu à peu.

Mais quelque chose de plus intéressant a interpellé le Makawee avant qu'il ne tue l'un d'entre eux. Il est parti en courant, là d'où il était venu. Catori était de nouveau là, avec un bidon d'eau dans les bras. Il a voulu la rejoindre mais au moment de la toucher, elle a disparu. Ce n'était qu'un mirage. Le Makawee était désormais très énervé et a commencé à frapper le sable avec ses gros poings. Il a tapé tellement fort que ce qui était en fait une paroi en métal s'est écroulé sous ses pieds. Lui aussi, maintenant, était dans ce tunnel non répertorié.

Héritage : Tome 1 : Amnesia CorpOù les histoires vivent. Découvrez maintenant