Héritage : Tome 1 : Amnesia Corp

Chapitre 7 : Steve

- La robotisation du corps militaire devrait être notre priorité ! - s'énervait le Général Utah.

- Je ne veux rien savoir, les Phantoms sont des entités assez puissantes pour nous protéger tous, - a protesté la directrice adjointe de l'Alliance.

Ces deux là étaient de très bons amis fut un temps, avant la catastrophe, avant l'hérésie et la panique. On disait même qu'ils étaient plus que des simples amis. Mais depuis quelques temps, leur réunions étaient devenues de plus en plus pathétiques. Chacun voulait avoir le dernier mot sur la nouvelle politique de traitements médicaux des races. Le fait est que, la direction de la No Legacy Alliance, qui regroupe d'ailleurs quatre des races les plus importantes, ne voulait pas accepter la dure vérité que les unités militaires dans cette ville sont insuffisantes. Leur principal but était influencé par l'élite d'Amnesia Corp, cette affreuse concentration d'esprits médiocres. Tout le monde les craignait, ils avaient l'argent, ils avaient leurs propres unités de sécurité, qui ne répondaient qu'à eux. Ils étaient intouchables et surtout insensibles à toute la misère autour d'eux. Ce qu'ils chérissaient le plus était l'architecture. Mais pas n'importe laquelle, l'architecture humaine. Ils déversaient des milliers de centaines d'unités dans des projets d'expérimentation les plus fous.

Le Général Utah, évidemment, connaissait mieux que quiconque les problèmes qui pouvaient survenir, il avait une vision complète du tableau. Les Phantoms n'étaient que mille et seulement cinq cent d'entre eux étaient des vrais militaires et policiers de formation. Tous les autres, n'étaient que des civils qui n'avaient plus rien à perdre et qui avaient acquis une puissance dont eux même n'avaient pas toujours conscience. Contrairement à Amnesia Corp, les âmes qui s'étaient emparées des corps appartenant maintenant aux Phantoms, étaient en parfaite harmonie avec les âmes originelles de ces enveloppes charnelles. C'est ce qui doublait leur force, ils avaient en eux non pas un mais deux esprits. Ce que Utah voulait, était évidemment de donner une chance aux nouveaux militaires de survivre dans ce monde rempli désormais de créatures les plus féroces.

- N'oubliez pas notre dernier investissement, - les a interrompu Steve Merill, un jeune businessman que les autorités d'Amnesia Corp ont déniché il n'y a pas si longtemps de cela.

Il se tenait dans le cadrant de la porte, regard désinvolte et déjà trop confiant pour son âge. La plupart des membres de ce comité ne comprenaient pas comment une telle personne, sans la moindre expérience a pu se frayer un chemin parmi tant d'autres candidats bien plus adéquats pour son boulot. Mis à part son business douteux, il faisait aussi partie de la cellule marketing d'A.C. Pour tout vous dire, il en était le chef. Sur de soi, il s'est approché du projecteur au bout de la salle. Il avait entre les mains la présentation de sa dernière trouvaille, ce qu'ils pensaient être la solution à tous leur problèmes.

- Je n'ai pas besoin de vous rappeler que, dans cette ville, il y a désormais quatre races. Quatre races officielles. Pourtant, il en existe des dizaines d'autres.

Tous ses spectateurs ont échangé un bref regard, l'air de dire qu'ils perdaient leur temps. Ce n'était pas une nouvelle pour eux, loin de là. Mais ils ne se doutaient pas que ce que Steve allait leur montrer dans quelques instants allait réellement les intéresser.

- Jusque là nous n'avons utilisé que des Phantoms pour se défendre et pour faire régner l'ordre, deux âmes en parfaite harmonie dans un seul corps. Mais récemment, nous avons fait une découverte on ne peut plus utile. Un esprit encore plus puissant, un esprit qui ne craint rien ni personne, un esprit invincible. Son enveloppe corporelle a délibérément abandonné son âme d'origine pour s'allier à une autre qui n'est pas tourmentée par les souvenirs, qui était née "âme". Son avantage est qu'elle transmet au corps les aspects physiques d'un esprit, rien ne peut l'arrêter. Mis à part...

Il n'avait pas eu le temps de finir sa phrase qu'une dame, visiblement en rage, avait interrompu sa présentation avec son entrée foudroyante dans la salle. Elle s'est approchée d'un pas sur de Steve et lui a arraché ses feuilles, après quoi elle ne s'est pas gênée pour balancer le projecteur à terre. Cette dame n'était autre que la fille du président de l'Alliance.

- Vous vous foutez de moi, - a-t-elle crié en fixant l'assemblée - c'était donc vous les fautifs tout le long ?! Vous n'avez pas honte ??

Tout le monde sauf Steve comprenait de quoi elle parlait.

- Un nettoyage ? Vous appelez ça un nettoyage ? Tuer des millions de personnes juste pour assainir le territoire ? Mais vous êtes malades ! Que diriez-vous si je venais faire un nettoyage chez vous, hein ?? Vous n'aviez pas le droit de leur ôter la vie comme ça, sans aucun soupçon d'humanité et de raison ! C'est un crime ce que vous avez commis !

- Allons allons, ma fille, calmez-vous, - l'a interrompu la directrice adjointe, - vous ne comprenez donc rien à la gestion d'un pays ma chère.

- Pardon ? Je ne comprends rien ? J'ai été élevée dans la politique et à aucun moment on ne m'a appris à jouer au dieu, décider du destin de qui que ce soit !

- Ils ont eu une mort difficile, il faut l'admettre mais nous n'aurions pas eu le résultat recherché sans cela.

- Allez brûler en enfer ! Vous et votre petite élite ! Dès que la population saura ce que vous avez fait, vous disparaitrez de ce monde, vous aurez une mort bien plus atroce, je vous le promets !

Avec ses mots la jeune femme est sortie, de la même manière qu'elle est entrée. Steve ne savait pas quoi faire. Il était totalement dépassé par ce qu'il venait d'apprendre. Tout son joli monde s'était écroulé en l'espace d'une minute. D'un coup, son plan, sa présentation n'avait plus aucun sens. Lui qui croyait rendre un service aux autorités qui avaient clairement perdu le contrôle de la situation à cause d'une catastrophe supposée jusque là naturelle. Il a ramassé ses feuilles. L'assemblée ne faisait plus attention à lui, elle était plongée dans des discussions qui évoquaient des actes encore moins légaux. Il a marché jusqu'à la porte, s'est retourné et a balayé la salle du regard une dernière fois. Il savait que, comme partout dans le monde, il y avait dans cette ville de la corruption, des complots, tout, tout mais pas ça. Il est finalement sorti sans dire un mot. Dehors, la jeune femme venait de raccrocher le téléphone dans une cabine semblable à celles des années 40 au Royaume-Uni. Elle a posé son regard sur lui, visiblement dégoûtée de la façon dont les riches peuvent gouverner ce monde.

Steve a pris une grande inspiration. Il a fait quelques pas jusqu'à la cabine et s'est arrêté en face. Il a ensuite ouvert la porte vitrée. La dame ne comprenait pas ce qu'il lui voulait. Pour elle, il était de mèche avec ces personnes immondes à qui il a soigneusement présenté son projet. Mais il n'y était aucunement lié et n'était absolument pas dépendant de qui que ce soit.

- Je m'appelle Steve, enchanté, - a-t-il dit en tendant sa main vers elle.

Hésitante, elle a tout de même rendu le geste par politesse.

- Que me voulez-vous Steve ? - a-t-elle enfin demandé après 10 secondes de silence.

Il a souri en ramenant son regard d'ailleurs vers elle et cette expression ne voulait dire qu'une chose.

- Je vous propose un deal, un deal que vous vous devez d'accepter.

Elle a réfléchi un instant, elle ne lui faisait pas confiance mais, après tout, était-ce une raison de le laisser partir sans entendre ce qu'il a à dire ? Quelques instants se sont écoulés avant qu'elle ne se décide à parler.

- Je m'appelle Diaz, enchanté.