Chapitre 10 : Steve

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Il n'était que huit heures et demi mais Steve n'arrivait plus à dormir. Après tout, il avait à côté de lui la femme la plus magnifique au monde. Il ne pouvait pas s'empêcher de caresser du regard sa peau encore rosée de la veille. Elle était si paisible, si pure mais en même temps si intouchable et distante. Il ne pourrait probablement jamais l'atteindre. Il ne voulait pas la quitter mais sa faim s'empressait de le tirer du lit. En sortant de leur chambre il a vu à quel point l'endroit était désert. Il ne voyait pas une seule âme autour de lui. Le ciel était complètement recouvert de nuages toxiques ce qui donnait l'impression d'être en pleine nuit. La seule place où il pouvait espérer manger était une espèce de bistrot à l'américaine.

A sa grande surprise, la plupart des tables y était prise. Il s'est donc dirigé vers une petite table au fond de la salle. Il se sentait mal à l'aise, presque tout le monde avait les yeux rivés sur lui. Ce qui était peu étonnant vu qu'il était le seul humain du bistrot. Le reste des clients étaient des âmes errantes. Le fait est que Steve et Diaz ne connaissaient pas les alentours du centre-ville et encore moins ce qui se trouvait en dehors de ceux-ci. Ils ont donc fait halte à Wératha, le quartier le plus ravagé de la ville, qui n'était déjà pas dans un bon état avant "l'apocalypse".

Ceci dit, tout ce qu'il voulait c'est prendre à manger et partir. La serveuse ne s'est pas fait attendre longtemps. Monstre ou non, il allait rapporter de l'argent à l'établissement. Steve a donc demandé deux burgers les moins chers et deux grands cafés. Il n'avait plus les moyens de jeter de l'argent par les fenêtres depuis sa fuite avec la fille du président. Contrairement à Diaz, ça n'allait pas être un problème pour lui. Il n'a pas toujours eu une vie de rêve. Le boulot de chercheur d'âmes qu'il avait obtenu était son premier job bien payé. Avant ça, il était réduit à observer des différentes créatures des heures durant. Uniquement pour prouver à l'armée qu'elles étaient inoffensives ou pas. Il vivait dans un petit deux pièces avec un autre observateur. Il avait de quoi manger, un minimum d'hygiène et ça lui suffisait. Ce n'est qu'il y a quelques mois qu'il a enfin commencé à gagner plus que le stricte nécessaire. Il a enfin pu louer un logement seul et s'acheter des produits de luxe comme un frigo et un grille pain. Ces choses là étaient devenues rares puisqu'elles n'étaient plus fabriquées. Mais de toute façon, plus personne n'avait les moyens de remplir un frigo ou de s'acheter du pain frais. Celui qu'ils prenaient, en général, était déjà tellement dur qu'il n'y avait plus besoin de le griller.

Pendant que Steve était en train de rêvasser en attendant son déjeuner, Diaz s'était enfin réveillée. Elle n'a pas trouvé son partenaire de crime en ouvrant les yeux mais ça n'avait pas l'air de l'inquiéter. Elle s'est donc déshabillée près du lit et s'est dirigée vers la douche profitant ainsi de sa solitude. L'eau était légèrement jaune mais elle n'avait pas le choix, elle s'attendait à ne plus retrouver son eau parfaitement propre pendant quelques temps. Au moins elle était chaude. Après quelques minutes elle est finalement rentrée dans la douche. La sensation d'eau rouillée sur la peau était drôle mais soutenable. Le savon de l'hôtel sentait la vanille ce qui lui rappelait l'odeur avec laquelle elle se réveillait tous les matins et qui provenait de sa cuisine. Elle ne regrettait pas d'être partie, loin de là, mais elle savait que ça allait être difficile pour elle. Elle s'est rincée une dernière fois avant de sortir et de s'envelopper dans un essuie qui avait la taille d'une couverture. Elle a commencé à frotter ses bras pour mieux les sécher ce qui la picotait un peu sans toute fois retenir son attention. Il n'y avait pas de miroir dans la chambre mais ce n'était pas plus mal. Elle se jugeait déjà assez narcissique. Elle s'est habillée et a mis l'essuie autour de son cou pour laisser ses cheveux sécher naturellement. Elle les compressait doucement avec ses mains en même temps qu'elle regardait par la fenêtre. Il pleuvait fort dehors et on ne voyait presque pas le soleil. Quelques mètres plus loin, elle distinguait vaguement une silhouette qui semblait avancer dans sa direction. Derrière elle, d'autres petites silhouettes suivaient. La première semblait faire des grands gestes. Après quelques mètres de course, il n'y avait plus de doute, c'était Steve. Il était poursuivi par des êtres étranges. Diaz s'est dépêchée d'ouvrir la porte. Elle ne comprenait pas ce qu'il se passait. Après être rentré, il a directement fermé la porte derrière lui et des dizaines de coups se sont abattus dessus.

- Alors, c'est quoi ton problème, - a demandé Diaz à peine paniquée.

- Et bien, ... j'existe, c'est ça mon problème.

Steve avait encore un peu de mal à s'exprimer, il était très essoufflé.

- Mais, je ne comprends pas, tu les a provoqué ? Qu'est-ce que t'as fait ?

Diaz commençait à s'impatienter, elle voulait tout savoir tout de suite.

- Ce sont des âmes errantes, elles en ont naturellement après nous. A leurs yeux nous sommes les riches égoïstes qui laissent la population à l'abandon. C'est normal qu'ils nous détestent puisque c'est à peu près le cas sauf qu'en plus de ça on les tue. Ils ne font pas la distinction entre quelqu'un qui gagne de l'argent de façon honnête ou pas. Tout ce qu'ils veulent c'est nous faire souffrir autant qu'eux.

Diaz n'en croyait pas ses oreilles, pour une fois c'était elle le monstre aux yeux de quelqu'un. Elle savait qu'elle était considérée comme une fille à papa, riche et naïve mais pas au point qu'on veuille l'assassiner.

Steve faisait les cent pas, il voulait trouver un moyen de s'échapper et rapidement mais il s'est arrêté net en voyant Diaz. Il n'y avait pas fait attention jusque-là mais sa peau pelait finement en laissant des traces rouges partout sur son corps. Il n'a pas cessé de la fixer pendant deux bonnes minutes ce qui a interpellé Diaz. Elle a alors regardé ses bras et a poussé un petit cri.

- Ne me dis pas que t'as pris une douche, - a dit Steve avec mépris tout en posant sa main sur le front de Diaz.

Elle était glaciale. Ce qui n'était pas une bonne chose. Elle allait être empoisonnée de la pire manière qui soit. Lentement, par les nombreux pores de sa peau. C'était le premier poison qui a été lâché sur cette ville. Les autres quartiers ont pris la peine de purifier l'eau mais celui-ci n'avait pas les moyens. Les habitants ici ont alors pris l'habitude de la purifier eux-mêmes. Chose que Diaz ignorait. C'était donc une raison de plus pour se tirer de cet endroit. La voiture n'était pas loin, on pouvait l'apercevoir par la fenêtre. Il fallait sortir pendant qu'elle tenait encore sur ses jambes. Toutes les créatures étaient entassées devant la porte, la voie était donc libre, pour le moment. Steve a ouvert la fenêtre qui s'est avérée moins fragile qu'elle n'avait l'air. La pluie lui mouillait déjà le visage.

- Ecoute, je vais passer en premier puis je te tirerai par la fenêtre. Dès que tu es dehors cours le plus loin possible à l'opposé de la porte, c'est-à-dire vers la droite, compris ? De mon côté, j'irai droit vers la voiture et je te prendrai à ce moment là mais surtout ne t'arrête pas, d'accord ?

Diaz n'avait pas du tout l'air d'accord. Tout ce qu'elle voulait c'est disparaître sur place.

- D'accord ?? - a répété Steve.

- Oui, oui ! J'ai compris, ne me mets pas encore plus la pression !

Ils sont alors sortis comme prévu, Steve puis Diaz. Tous les deux ont commencé à courir, chacun dans sa direction. Dès que Steve a atteint la voiture, il a sauté dedans. Elle était remplie d'eau étant donné que le toit était resté ouvert. Les créatures s'approchaient. Il a mis la clé dans le contact et l'a démarré sans aucun problème, puis a pris le temps de refermer le toit. Ce qu'il n'avait pas prévu par contre c'est que ces monstres savaient accélérer et l'une d'elles a réussi à s'accrocher au pare-choc arrière. Elle freinait le bolide. Steve se rapprochait de Diaz mais à la vue du monstre elle a complètement changé de direction. Il l'a perdue de vue. Il appuyait à fond sur le gaz mais rien ne changeait. Il avait toujours une charge derrière. D'un coup, il a entendu des pas lourds sur le toit ce qui allait compliquer les choses. Il était désormais seul sur l'autoroute avec ce passager indésiré et Diaz, elle, était laissée à l'abandon près du motel.

Héritage : Tome 1 : Amnesia CorpOù les histoires vivent. Découvrez maintenant