"Peut-on rire de tout ? Peut-on rire avec n'importe qui ? A la première question, je répondrais oui sans hésiter [...].
S'il est vrai que l'humour est la politesse du désespoir, s'il est vrai que le rire, sacrilège blasphématoire que les bigots de toutes les chapelles taxent de vulgarité et de mauvais goût, s'il est vrai que ce rire-là peut parfois désacraliser la bêtise, exorciser les chagrins véritables et fustiger les angoisses mortelles, alors oui, on peut rire de tout, on doit rire de tout. De la guerre, de la misère et de la mort. Au reste, est-ce qu'elle se gêne, elle, la mort, pour se rire de nous ? Est-ce qu'elle ne pratique pas l'humour noir, elle, la mort ? Regardons s'agiter ces malheureux dans les usines, regardons gigoter ces hommes puissants boursouflés de leur importance, qui vivent à cent à l'heure. Ils se battent, ils courent, ils caracolent derrière leur vie, et tout d'un coup ça s'arrête, sans plus de raison que ça n'avait commencé, et le militant de base, le pompeux P.D.G., la princesse d'opérette, l'enfant qui jouait à la marelle dans les caniveaux de Beyrouth, toi aussi à qui je pense et qui a cru en Dieu jusqu'au bout de ton cancer, tous, tous nous sommes fauchés un jour par le croche-pied rigolard de la mort imbécile, et les droits de l'homme s'effacent devant les droits de l'asticot."
"Je crois qu'on a le droit de rire de tout. Mais rire avec tout le monde, ça, peut-être pas. [...] Le rire est un exutoire et je ne comprends pas qu'on dise qu'il ne faut pas rire de ce qui fait mal. Ça fait moins mal quand on en a ri. A la fin de l'été, quelqu'un que j'aimais énormément est mort d'un cancer. Mais le cancer, comme Yves Montand, c'est des choses dont il faut rire. Moi quand je parle de cancer, je parle de mes proches, pas des proches d'autrui."
Pierre Desproges -
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Mes pensées. Mes mots. Un tout.
PoetryRecueil de textes, de pensées, de réflexion, j'écris ce que je ressens personnellement, ce à quoi je réfléchis, ou ce que la vie m'évoque.