Une pluie chaude s'abattait sur cette route sablonneuse, créant par deçà et là, de fins torrent le long de la chaussée. Le ciel grisâtre surplombé la ville tandis qu'aucun bruit ne se faisait entendre. De nombreuses personnes dormaient dans cette rue habituellement bondée. Ils étaient tous plongés dans un profond sommeil, ce sommeil qui emporte l'âme bien loin de l'esprit. Jamel, un homme d'une trentaine d'année avait sa tête posée sur le ventre opulent d'une femme enceinte, ces yeux semi-clos faisaient ressortir sa peau basanée. Son tatouage derrière l'oreille désignait le nom d'une jeune fille, Cherazane, ornée d'un coeur. Quant au corps du jeune homme, son bras gauche se situait à cinquante mètre de là, le reste était dissimulé sous cette montagne de membres. Deux cent cinquante cadavres et pas un corps membré. La pluie rougeâtre coulée le long de la chaussée, laissant s'échapper toute trace d'humanité. Ce sol couvert de membres, d'entrailles et des tripes, calciné par le feu de l'horreur et de l'infamie prouvait pour la énième fois, la monstruosité de ces hybrides.
Jamel, lui, ne profitera pas du dessin que lui avait fait sa petite fille, Cherazane. Elle ira, le déposer sur le mémorial qui sera érigé au nom de ces victimes, où figurera le nom de son père, à la cinquante-sixième ligne. Elle ira lui remettre son dessin, non pas le sourire aux lèvres, mais les larmes aux yeux. Elle pleurera, comme son pays, elle pleurera comme le monde entier pleure cette infamie.Bagdad - Karrada - 03/07/2016
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Mes pensées. Mes mots. Un tout.
ŞiirRecueil de textes, de pensées, de réflexion, j'écris ce que je ressens personnellement, ce à quoi je réfléchis, ou ce que la vie m'évoque.