L'homme qui n'aimait pas les...

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Grognant encore à cause des propos tenus par ce général vampire, Dorian ne pouvait rester concentré sur sa lecture. Et pourtant... Cet ouvrage... Cette perle de Oscar Wilde semblait banaliser son quotidien dans cet univers hors norme qui faisait sa dramatique routine depuis ce jour d'automne qui , sur quelques lignes de Platon, avait changé sa vie... Il était affalé sur un canapé, sourcils froncés, son regard semblant vouloir traverser la fenêtre alors qu'il fixait, morose, l'extérieur. La nuit n'allait pas tarder à tomber, le ciel se teintait d'écarlate, inquiétant dans son éclat de splendeur le calice. Menaçant, le ciel le ramenait à cette nuit là, lorsque le Sugaar avait arraché le coeur palpitant de cet inconnu sous ses yeux. Il n'oublierait jamais le regard de pure détresse et douleur qui était resté ancré au sien jusqu'au bout... Il n'oublierait jamais son impuissance et sa révulsion... Sa lâcheté et son inutilité... Alors que dans ce regard étranger la lumière de la vie s'éteignait...

S'il avait été à même de se battre, peut être que Furie ne serait pas mort... S'ils avaient été à même  de se battre, eux les calices dits fragiles, peut être que Tyché ne serait pas mort, violemment tué par des sorciers qui avaient profité de sa faiblesse, de sa précarité,  de la distance avec son vampire...Peut être aurait-il, lui, pu aider Furie un minimum,  ce jour là ... Poussant un soupir à en fendre l'âme, il se redressa. Il avait besoin de la présence rassurante de son vampire... Il avait besoin de se sentir en sûreté. Il était las de rester sur ses gardes... Eago lui avait pourtant promis de ne pas traîner. De ne pas le laisser seul plus d'une heure... Or il était seul depuis le début de l'après midi... Il s'inquiétait, naïvement, espérant que rien de fâcheux n'était arrivé à son vampire. Il savait fort bien qu'il l'aurait ressenti à cause du (ou grâce) lien.. Il savait aussi que le vampire était tout à fait apte à gérer une situation problématique... Donc il se savait inconscient de quitter cette pièce pour aller le chercher alors que le général vampire, ce O'maley, lui avait explicitement ordonné de ne pas en bouger... Il grogna à ce souvenir. Ce général refusait d'entraîner des calices mais se permettait de leur donner des ordres à tout vas...

Il quitta le bâtiment avec une vive impression de faire une bêtise. Il se mordit la lèvre inférieure de frustration. Ne pas bouger serait pire que de se risquer à l'extérieur...Il refoula de son mieux cette crainte primaire, se dirigeant vers ce qui semblait être un bâtiment administratif, plus grand que celui qu'il venait de quitter.

Il entendait des voix chuchoter mais ne voyait personne. Il savait que de nombreux vampires occupaient la base mais espérait ne pas en croiser. IL savait que les probabilités de ne pas en croiser étaient mince pour ne pas dire ridicules... Pourtant, il pensait pouvoir trouver Eago et ce sans attirer l'attention.

Des ricanements, des grognements, des pas feutrés... Il sentait en lui une peur panique grimper, broyant ses entrailles avec violence. Tout son être lui hurlait de se sortir de cette situation. Il avait l'impression d'être acculé alors que c'est la légère pénombre du crépuscule qui l'entourait. Il savait son instinct dans le bon, à moitié conscient du caractère anormal de sa situation... Cette terrible situation... Qu'un calice soit entouré de vampires mais sans son vampire à ses côtés était quelque chose de contre nature, d'insultant... D'impensable.... C'est laisser le calice dans un situation de faiblesse, de précarité, qui n'est pas sensée se produire...

L'odeur et l'aura distincte de tout calice en fait un être parfaitement identifiable pour les autres vampires. Ils se savent en non-droit s'ils venaient à porter la main sur l'un de ces êtres. Protégés pas la nature, la loi, le monde des Créatures... Seuls les renégats osaient... Et connaissaient un fin innommable.Quelques vampires trop prompts, pas assez disciplinés, se risquaient parfois à blesser quelques calices qui les auraient provoqués, consciemment ou inconsciemment. L'intolérance, le sarcasme, voir la moindre once de répartie pouvait animer la colère de ces être millénaires parfois trop présomptueux. Pourtant, un calice ne doit obéissance qu'à son vampire... Les vampires trop susceptibles mordaient souvent sur leur chique, peu enclins à faire face à la colère d'un lié... D'autres tentaient d'intimider, violemment ou non, les calices. Comme l'avait fait Corto quelques mois plus tôt au sommet des Cinq Familles.

- Que fais-tu seul, calice, lança un vampire en tenue militaire, sans étoiles sur ses épaulettes, signe de son grade inférieur, apparaissant à deux mètres devant lui. Dorian s'arrêta, soupirant d'agacement. Le terme calice dans la bouche de ce vampire était sorti comme une injure, plein de mépris et de dégoût... Craché avec une aversion sans égal.

- Je...

- Ne sais-tu pas que c'est une base occupée essentiellement pas des vampires ?

- Si mais...

- De nombreux bleu sont indisciplinés, commenta un autre vampire à sa gauche.

- Et les indisciplinés ne respectent pas toujours la législature portant sur le caractère intouchable des calices.

- Tu joues à un jeu dangereux en te promenant seul, au crépuscule.

- Peu de vampires interviendront si tu venais à être brutalisé.

- Qui est ton vampire ? Je ne connais pas cette odeur... Sûrement pas un américain.

Les cinq vampires qui se tenaient autour de lui attendaient sa réponse, le fixant avec sévérité. Dorian , agacé d'être constamment menacé, grogna :

- Le nom de mon vampire n'est pas votre affaire. J'ai besoin de le trouver...Alors écartez-vous.

L'ordre ne passa pas. Des grognements naquirent dans les gorges des soldats... Dans sa colère, Dorian n'y prêtait guère attention. Il avait besoin de son vampire et ces vampires se mettaient entre lui et Eago... Le lien le poussait à se révolter malgré sa position peu avantageuse qui l'aurait fait blêmir d'horreur quelques mois plus tôt...

Un sixième vampire rejoignit la joyeuse compagnie. Il haussa un sourcil, l'odeur du calice effleurant ses sens. Il s'exclama, son éclat de voix faisant sursauter Dorian tant il ne s'y attendait pas :

- Ha ! Le calice du Lord Eago ! Quel plaisir d'enfin vous rencontrer ! Je suis le sergent Moon ! Eago et moi avons combattu ensemble lors de la Grande Traque ! Mais... Je ne vois pas Eago ! Où est-il ?

 Je ne vois pas Eago ! Où est-il ?

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