Chapitre soixante-huit

1.2K 132 11
                                    


CLAIRE


♡♡♡♡

Je flotte...

Cette sensation de légèreté est agréable.

Je ne suis plus oppressée par ce poids sur ma poitrine. Je peux à nouveau respirer. Inspirer. Une action à laquelle on ne prête pas attention tant elle est naturelle. Expirer... Pour mieux me remplir d'air à nouveau. Et recommencer ainsi à l'infini... 

Mais quand cette fonction vitale est entravée, la première goulée n'en est que plus douloureuse pour les poumons, les bronches, la trachée. Et pourtant je me délecte de cette douleur. Je la recherche et la provoque. J'inspire et expire volontairement jusqu'à en avoir la tête qui tourne. Jusqu'à en voir des points noirs brouiller ma vision. Jusqu'à...

Je savoure cet état d'apesanteur où tous les bruits sont atténués comme si je me trouvais à l'abri dans un cocon. Tous mes sens sont engourdis. Je tente de bouger mes membres mais rien ne se passe. Je respire encore avec difficultés mais je suis en vie, du moins, c'est l'impression que j'ai. Depuis combien de temps suis-je dans cette position à la fois rassurante et protectrice ? Je n'en ai pas la moindre idée.

Je devrais ouvrir les yeux : mais je n'en ai pas la force.

Je devrais définir à qui appartiennent ces voix : mais je n'y arrive pas.

Je devrais essayer de comprendre ce qui m'arrive : mais à quoi bon.

Je devrais reconnaître cette chanson : mais elle est recouverte par un bruit.

Un bruit de fond tinte à mes oreilles comme des acouphènes de mélancolie. Cette mélodie fait écho à mon enfance, à mes souvenirs, à des moments de ma vie où un rien faisait mon bonheur. Mon esprit est paisible, je me sens pacifiée, et j'accepte de me laisser emporter par cette vague de nostalgie qui m'entraîne loin, très loin.

Trop loin peut-être...


Je me perds dans cet indicible néant :

« Qui tape aussi fort ?

Les cliquetis sont répétitifs et cadencés.

Tout comme pourrait le faire un pivert martelant l'écorce des arbres entourant la clairière. Je suis sur le dos, allongée dans l'herbe, les bras en croix, exposant les paumes ouvertes de mes mains vers le ciel bleu, sans le moindre nuage. 

Je profite de la caresse du soleil qui réchauffe mon corps et savoure cette brise naissante qui fait bruisser les feuilles entre elles. Le chant des oiseaux me berce pourtant parmi tous ces bruits mélodieux à mon oreille, il y a le plus beau de tous.

— Maman, maman !

— Oui mon bébé.

De sa bouille boudeuse, il se défend.

— Je ne suis plus un bébé.

— Tu as raison mon garçon.

— Regarde maman ! Ça, c'est un bébé.

Il me montre de son doigt un nid dans le creux d'un arbre avec des oisillons et leur maman.

— Tu as raison ce sont des bébés.

Mon boudeur laisse soudain la place à une grimace de dégoût.

— Beurk ! Tu me donnais à manger des vers toi aussi ?

A Pile ou Face - MILO | TerminéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant