Et tant d'autres histoires

4: L'alliance d'un amour silencieux

Il en avait entendu parler bien sûr, tout le monde était au courant. Il avait d'abord cru à une stupide rumeur, l'idée était bien trop absurde, tellement inenvisageable qu'elle en était dérisoire. Puis, lors d'une discussion anodine, il avait eu la confirmation. Elle l'avait lancé comme ça, comme si c'était sans intérêt, comme s'il s'était déjà fait à l'idée... Comme si ça n'allait rien lui faire.

Oh bien sûr elle n'avait jamais su l'impact que ça avait eu sur lui, les choses étaient sûrement mieux ainsi. Et elles étaient mieux ainsi depuis un an désormais.

Tout était calme et plat dans sa vie. Le silence prolongé de Red John était anormal bien sûr, mais il n'avait pas trouvé d'éléments qui lui permettraient de comprendre. Peut-être était-il mort anonymement ? Peut-être prenait-il une retraite ? Aucune solution ne lui paraissait être la bonne, et cela faisait pourtant un an qu'il les passait toutes en revue.

Puis, régulièrement, il repensait à ce qu'elle avait dit, à ce qu'elle vivait désormais, rayonnante. Il n'avait jamais cherché à la garder pour lui seul, et il le regrettait désormais. S'il avait su qu'un jour Teresa Lisbon aurait une relation durable avec un simple mortel –autant qu'un mauvais garçon au sourire enjôleur et au diplôme de commercial tout neuf puisse l'être– il aurait ri.

Oui mais il était là le problème, Patrick Jane ne riait pas. Il ne se moquait pas d'elle, il ne l'embêtait plus beaucoup d'ailleurs, mais elle s'y était accommodée avec son joli sourire, celui qui disait qu'elle pouvait affronter le monde sans peur tant que le mauvais garçon était là. Jane n'avait même pas fait l'effort de retenir son nom alors que Lisbon le fréquentait depuis un an désormais. De ce qu'il savait, il avait emménagé chez elle depuis quelques mois.

Il n'aurait su dire pourquoi il sentait son cœur se serrer à chaque fois qu'elle décrochait son portable en rougissant légèrement, pourquoi parfois il avait cette subite envie de l'enlacer, ni pourquoi il avait ce besoin égoïste et fou de la garder pour lui. Il avait toujours su que le partage n'était pas de ses qualités, mais il n'avait jamais imaginé un jour avoir à partager Lisbon...

Et puis, c'était arrivé comme ça, au bout d'un an, il avait compris qu'elle n'était plus à partager, elle était déjà toute à lui. Elle l'aimait, ce n'était pas qu'une histoire. Elle voulait vivre avec lui, et pas seulement s'amuser et roucouler. Elle voulait de ce mauvais garçon aux cheveux noirs de jais qui la serrait dans ses bras sur une photo de son bureau, et elle l'aimait si fort qu'un jour, il le sentait, elle lui dirait oui.

Il n'aurait su dire quelle type de blessure ça lui causait, ni si les dommages étaient irréversibles. Tout ce qu'il savait, c'est qu'il n'avait rien vu venir, et que de toute façon il avait les mains vides. Elle lui avait échappé avant qu'il ne comprenne, avant qu'il n'imagine un seul instant que peut-être il pouvait encore aimer quelqu'un.

-Jane ?

Le consultant se redressa sur son canapé, interrompu dans ses sombres pensées par VanPelt. La grande rousse lui adressa un sourire désolé, puis s'approcha timidement.

-Tu n'es pas venu à la fête, constata-t-elle.

-J'ai dû oublier, mentit-il.

-C'est dommage, Lisbon était rayonnante au bras de Danny. C'est un bon gars tu sais ? Même les frères de Lisbon l'apprécient, ils ont accepté qu'il l'épouse.

Jane leva les yeux vers Grace et elle se sentit soudain mal à l'aise.

-Ça n'a pas l'air d'aller, c'est pour ça que tu n'es pas venu aux fiançailles de Lisbon et Danny ? s'enquit-elle.

-Je me sens un peu nostalgique, mentit-il à moitié en montrant sa main où son alliance brillait encore.

Il accompagna son geste d'un léger sourire, pour éviter que Grace ne s'apitoie sur un mensonge.